A Casablanca, la BAD prépare son marché de l'investissement

Le 27 juillet à Casablanca, la Banque Africaine de Développement a rencontré les institutionnels, investisseurs et porteurs de projets marocains intéressés par le premier "Africa Investment Forum",une initiative qui pourrait booster les financements de projets publics et privés sur le continent.

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Africa Investment Forum de la BAD : étape casablancaise du road-show, le 27 juillet au Mövenpick Hôtel

Chaque année l’Afrique a besoin de 170 milliards de dollars pour se développer. Pourtant son déficit de financement continue de se creuser. C’est le constat dressé par la Banque Africaine de Développement (BAD), et qui l’a amenée à imaginer un ambitieux projet pour connecter les investisseurs de toute la planète avec les porteurs de projets africains. C’est la première fois que la BAD joue le rôle d’intermédiateur, sans participer elle-même au financement de tous les projets qu’elle mettra en avant sur une nouvelle plateforme numérique dédiée.

« Les besoins sont clairement identifiés : infrastructures, eau et assainissement, électricité…« , explique Olivier Eweck, directeur des syndications, cofinancement et solutions client à la BAD. « De l’autre côté, il y existe des fonds de pension et beaucoup d’argent ailleurs. Mais dans les grands forums internationaux tels que Davos, l’Afrique a une place minimale, elle n’attire pas assez les investisseurs. Donc l’idée est de faire en Afrique un forum uniquement pour les projets africains, pour mettre en relation ces deux mondes et faire ce match-making nécessaire », poursuit-il.

Identifier les projets bancables

Casablanca est la troisième étape du « road-show » de la Banque Africaine de Développement en Afrique du Nord, après Tunis et Le Caire. La BAD devait ensuite se rendre le 29 juillet à Alger, mais a reporté sa rencontre algérienne à la rentrée. Alors que le Maroc est le premier portefeuille de la BAD, commencer ce tour du continent par l’Afrique du Nord n’est pas dénué de sens pour le directeur général de la BAD pour l’Afrique du Nord, Mohamed El Azizi : « Alors que les avoirs gérés par les investisseurs institutionnels africains devraient quasiment doubler passant d’environ 634 milliards de dollars actuellement à 1100 milliards de dollars à l’horizon 2020, les opportunités d’investissements, porteuses de rendements intéressants, sont nombreuses et en progression en Afrique du Nord« , estime-t-il.

Une centaine d’acteurs économiques marocains, institutionnels, publics et privés se sont retrouvés le 27 juillet à l’hôtel Mövenpick de Casablanca pour nouer les premiers contacts. La CGEM, l’AFD, Proparco, l’OCP, Masen, mais aussi la représentation marocaine de la Bank of China faisaient partie de ceux ayant répondu présent – en pleine période estivale -, à l’invitation de la BAD.

L’objectif pour la BAD : « Mettre en place une réserve de projets bancables » en amont du rendez-vous qui se tiendra en Afrique du Sud. Et, du côté des porteurs de projets marocains, l’espoir de nouer des premiers contacts avec des investisseurs. Cela, avec des critères d’entrée très larges, confie Olivier Eweck : « Il y aura différentes tailles de projets sur la plateforme, l’idée de l’ouvrir vraiment au plus grand nombre, avec des critères de sélection minimaux en termes de concepts et parfois d’études de faisabilité« .

Développer la coopération sud-sud pour le Maroc

L’Africa Investment Forum pourrait aussi représenter, pour les entreprises marocaines, de nouvelles fenêtres de développement en Afrique. « Au Maroc, il y a des mécanismes de financement de projets qui sont déjà là, notamment via les banques commerciales, et qui fonctionnent plutôt bien. L’ AIF pourra servir à les compléter, mais aussi à accompagner les entreprises marocaines qui vont de plus en plus en Afrique. Nous voulons les aider dans ces partenariats, notamment pour des zones du continent qu’elles ne connaissent pas bien, et où elles ont besoin d’outils d’atténuation des risques. Cette coopération sud-sud est primordiale pour nous », explique le directeur des syndications de la BAD.

Samya Benmlih, responsable de la coopération internationale à l’Agence marocaine pour l’énergie durable Masen, explique qu’un tel forum représente pour les nombreux projets développés par l’agence des opportunités de financements étrangers. Elle évoque par ailleurs les ambitions africaines de Masen qui entend exporter son expertise dans l’énergie renouvelable dans plusieurs pays du continent.

Pour Yazid Safir, représentant Afrique du Nord de Proparco, la filiale de l’AFD dédiée au secteur privé – qui bénéficie déjà de plusieurs financements de la BAD – l’AIF permettra d’une part de trouver de nouvelles sources de financement, mais également d’identifier de nouveaux projets sur le continent.

L’un des porteurs de projets présents à cette rencontre, qui développe pour le compte d’un groupe saoudien un projet hydraulique d’ampleur dans la région de Beni Mellal, est convaincu que ce forum lui ouvrira de nouvelles sources de financement : « Avec une banque commerciale classique, la question des risques de garantie se pose avec acuité. La BAD a une lecture des projets où la composante développement est prioritaire par rapport à l’intérêt commercial« .

En parallèle du road-show, les équipes de la BAD préparent le grand forum qui aura lieu à Johannesburg du 7 au 9 novembre et qui pourrait rassembler entre 1000 et 2000 participants. Le mot d’ordre de cet événement : pas de discours, que des transactions. Les porteurs de projets peuvent déjà s’enregistrer en ligne sur la plateforme numérique dédiée « 100% transactionnelle ».

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