Trier les déchets, le défi "citoyen" du gouvernement à l'horizon 2023

10,5 millions de tonnes. Telle est la masse de déchets produite par les industries et les ménages marocains chaque année. La problématique du tri et de la valorisation des ordures était le sujet de la table ronde organisée le 5 juin et présidée par Nezha El Ouafi, la secrétaire d’état chargée du Développement durable.

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Nezha El Ouafi, secrétaire d'Etat chargée du Développement durable Crédit: Rachid Tniouni / TelQuel

Réunir l’ensemble des acteurs concernés par le tri et la valorisation des déchets (ménagers et assimilés) était l’un des motifs de cette table ronde, organisée le 5 juin par Nezha El Ouafi. Une occasion également pour les intervenants de plancher sur le programme national de valorisation des déchets (PNDM), lancé en 2008, et à horizon 2023. Le but de ce projet : atteindre un taux de recyclage de 20 % en 2020, avec uniquement 2 % du budget (680 millions de dhs). Cela, en prenant en compte l’organisation, le développement et la filière de tri-recyclage-valorisation. A noter, que le taux de recyclage actuel est de 10 %. Un chiffre que le gouvernement espère faire progresser en misant, notamment, sur l’implication des citoyens.

Le tri, « une responsabilité civile »

« Le geste gratuit est-il possible pour le marocain ?« , demande Abderrahim Kssiri, président de l’association des enseignants des sciences de la vie et de la terre (AESVT), aux participants de la table ronde.  Et de poursuivre : « Ce problème est avant tout culturel« . Selon le président, « la rapidité de la transition géographique en est peut-être aussi l’une des causes. En tout cas, si la responsabilité est civile, son éducation est une responsabilité politique« .

Pour que le citoyen se sente concerné par cette problématique environnementale, Abderrahim Kssiri insiste sur le fait qu’il faut surtout « susciter son intérêt « . Une démarche qui « passe par son implication dans des projets communautaires, des initiatives de quartiers, de groupesL’objectif est de créer un engagement civique endogène et viral afin de relever le challenge de la gestion des ordures ».

D’autres intervenants, dont Mohamed Chaibi, président de la Coalition pour la valorisation des déchets et Mohamed el Amraoui, ingénieur environnementaliste pour le bureau d’études CID, dénoncent l’inertie des communes et des mairies en matière de tri et de valorisation des déchets. Ces spécialistes estiment que « la communication sur le sujet est défaillante » et qu’elle « n’utilise pas tout le potentiel qu’octroie l’ère des réseaux sociaux ». D’une même voix, ils plaident pour « une approche de communication cohérente » qui doit-être « définie sur le long et le moyen terme, afin de mettre en oeuvre un changement culturel profond« .

A titre d’exemple en matière de bonne gestion des déchets et de « propreté« , le président de l’AESVT cite le quartier Hay Riad, à Rabat. Lequel serait « comparable à n’importe quel quartier d’une ville européenne« .

Trier, une « opportunité économique et sociale »

Tour à tour, les intervenants de cette table rondes ont ensuite exposé les « bienfaits » de la valorisation et du tri des déchets. En plus d’être un enjeu environnemental et sociétal de taille, une stratégie de gestion des ordures intelligente peut aussi s’avérer être une activité génératrice d’emplois. Le centre de tri sélectif d’Oum Azza en est l’un des exemples. Le site traite plus de 850.000 tonnes de déchets par an, pour le compte de 13 communes de la région de Rabat. Aussi, près de 153 anciens récupérateurs de déchets ont été embauchés par le centre de tri. Formés et encadrés, ils disposent maintenant d’horaires, de revenus et d’une couverture sociale.

« Représentant près de 850 millions de dirhams et entre 11.000 et 21.000 emplois, il est crucial, voire obligatoire, d’intégrer ce secteur informel. Mais, actuellement, les tentatives d’organisation sont très limitées. Presque aucune coopérative ou organisation de chiffonniers n’a été créé », avance Mohamed el Amraoui. Atwafouq, une coopérative œuvrant sur un site de déchet au sud de Rabat, et en coopération avec le Centre de tri d’Oum Azza, agit toutefois dans ce sens. Mais est actuellement l’une des seules.

Et d’ajouter : « Trier, c’est aussi un moyen d’épargner la dépense de devise dans l’importation de matière première et peut favoriser l’émergence de nouvelles filières industrielles pouvant exploiter les différentes matières triées ». 

A ce propos, Mohamed Chaibi, rappelle « qu’il ne faut pas oublier la réelle priorité : l’éducation du citoyen », puisque « le meilleur déchet reste toujours celui qu’on ne produit pas ».

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