Après #BalanceTonPorc et #MeToo, c’est au tour du hashtag #MosqueMeToo (Mosquée moi aussi) de faire du bruit dans les médias. Le mouvement a été lancé le 6 février par un post de l’écrivaine américano-égyptienne Mona Eltahawy.
L’idée ? Briser le tabou des violences sexuelles subies par les femmes de confession musulmane dans les lieux de culte et lors d’évènements religieux, comme le pèlerinage à La Mecque en Arabie saoudite où affluent chaque année près de 2 millions de fidèles, dont une moitié de femmes.
I have shared my experience of being sexually assaulted during Haj in 1982 when I was 15 in the hope that it will help fellow Muslim women break silence and taboo around their experience of sexual harassment/abuse during Haj/Umra or in sacred spaces. Let’s use #MosqueMeToo https://t.co/uDsZFDolgX
— Mona Eltahawy (@monaeltahawy) February 6, 2018
« J’ai partagé mon expérience après avoir été abusée sexuellement pendant le hajj en 1982, quand j’avais 15 ans, dans l’espoir d’aider les femmes musulmanes à rompre le silence et le tabou autour de leur expérience de harcèlement sexuel/abus pendant le hajj/oumra ou dans des endroits sacrés. Utilisons #MosqueMeToo« , peut-on lire dans le post de Mona Eltahawy, qui compte à ce jour 287.000 abonnés sur Twitter. Une agression dont elle avait déjà parlé dans son livre « Voiles et Hymens: Pourquoi le Moyen-Orient a besoin d’une révolution sexuelle« , paru en 2015.
Selon l’hebdomadaire français Marianne, ce mouvement trouve en fait sa source dans un long témoignage publié le 5 février sur Facebook par une jeune Pakistanaise, Sabica Khan.
Dans la publication, repartagée 2.000 fois, mais aujourd’hui supprimée, elle dit s’être fait pincer les fesses « d’une façon très agressive » lors de son pèlerinage.
« Je me suis sentie terriblement violée, incapable de parler. Je savais que cela ne me servirait à rien d’en parler, parce que personne ne me croirait, sauf peut-être ma mère« , écrit-elle. Voici la photo du post supprimé dont le magazine français avait fait une capture d’écran.
Témoignages d’agressions
Depuis la publication de Mona Eltahawy, des internautes musulmanes racontent leurs agressions et confient leur ressenti face à l’omerta. L’éditorialiste de la BBC, Aisha Sarwari, relate par exemple que lorsque l’une de ses amies a protesté après s’être fait peloter, les autres pèlerins lui auraient dit de « laisser passer« .
One of my friends was groped during hajj and when she made a fuss she was asked by fellow hajis to let it go.
— Aisha Sarwari (@AishaFSarwari) February 6, 2018
La militante féministe française, Henda Ayari qui avait porté plainte contre l’islamologue Tariq Ramadan en octobre 2017 pour viol, soutient elle aussi le mouvement affirmant avoir été « elle-même témoin (d’agressions sexuelles) lors de (s)on pèlerinage à la Mecque« .
De son côté, l’Écossaise Anggi Angguni conserve elle aussi d' »horribles souvenirs » de La Mecque. « Les gens pensent que La Mecque est l’endroit le plus sacré pour les musulmans, donc personne n’y ferait rien de mal. C’est entièrement faux« , écrit-elle, avant de préciser ce qui lui est arrivé dans la ville saoudienne.
« Un jour quelqu’un a touché mes seins et les a pressés. J’étais choquée. Le type derrière moi a soudain fait semblant de ne rien avoir fait et est parti. J’étais choquée, et ce que j’ai fait, c’est que j’ai juste pleuré en silence« , raconte-t-elle.
Mais les témoignages sont encore peu nombreux comparés aux flots de récits déversés sur la toile via les hashtags #MeToo et #BalanceTonPorc. Pour la journaliste Aisha Sarwari, « les femmes musulmanes comme les autres femmes souffrent de harcèlement, mais quand cela arrive dans un contexte religieux, on leur demande de se taire au nom d’une cause plus grande. C’est à la fois injuste et oppressant« , écrit-elle dans un autre post Twitter.
D’autant plus que depuis que le mouvement a été lancé, le 5 février, plusieurs comptes ont été rendus inaccessibles et plusieurs posts ont été supprimés. Comme le rapporte Marianne, une jeune Indonésienne racontait, par exemple, dans un message par la suite effacé, avoir été harcelée sexuellement à La Mecque et à Médine pendant le pèlerinage alors qu’elle avait 20 ans. « C’était dégoûtant et ça m’a perturbée. Je l’ai dit immédiatement à mes parents, mais je n’ai pu donner les détails que l’année dernière« , témoigne-t-elle.
Le magazine ajoute qu’il est parfois difficile de déterminer la fiabilité du témoignage de certains utilisateurs, leurs comptes étant anonymes et peu actifs jusque-là.
Et parce que chaque hashtag compte son lot de haters, le mouvement #MosqueMeToo n’est pas épargné. Sur Twitter de nombreux utilisateurs accusent ces femmes de vouloir « salir l’islam« . Mona Eltahawy affirme qu’elle a d’ailleurs été insultée, accusée de détruire l’islam pour gagner de la notoriété avec cette campagne.
Ils veulent vraiment salir l'Islam avec l'affaire #MosqueMeToo mais plus vous critiquez les Musulmans plus leur foi grandis. Même si 90% ne croit plus aux médias français ne nous divisons pas et soyons soudé et uni face à cette perversité.
— Maudit Salo (@sheshevuitton) February 10, 2018
Donc maintenant des féministes ont inventé ce #MosqueMeToo pour dénigrer et insulter encore une fois l'islam et les musulmans ! Mais à quel moment, ils.elles se rendront compte que rien ne pourra effacer ou détruire l'islam !
Et cette haine ne fait que renforcer MA FOI !
— Rozé (@Uclan87) February 10, 2018
Pour l’instant, les autorités saoudiennes n’ont fait aucun commentaire ou allusion à ces allégations.
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