L’école pour les moins de six ans est encore loin d’être généralisée. Seulement 65% des élèves entre 3 et 4 ans sont inscrits à l’école préscolaire, qui est très variée. L’essentiel de l’enseignement est traditionnel, c’est-à-dire effectué dans des écoles coraniques (61%). Seulement 27% des près de 700 000 élèves préscolarisés sont dans un système moderne. « Les choses sont dramatiques si nous continuons ainsi« , commente Taieb Chkili, président de la Fondation marocaine pour la promotion de l’enseignement préscolaire (FMPS) qui divulgue les chiffres à l’issue de deux jours de colloque sur la question à Rabat du 13 au 14 décembre.
Au Maroc, l’enseignement est obligatoire à partir de six ans. « Pourtant, l’enseignement préscolaire est le socle d’un enseignement primaire, collégial et secondaire de qualité« , explique Taieb Chkili. Une constatation partagée avec Philippe Maalouf, responsable de l’éducation à l’UNESCO au Maghreb : « D’après nos études de l’UNESCO, un enfant qui a suivi le préscolaire réduit le risque de redoublement ou d’abandon pour le primaire« . Selon lui, le préscolaire est le moment où l’enfant développe sa curiosité et se prépare pour les cycles suivants, jusqu’à l’université et le marché de l’emploi.
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L’une des inquiétudes des experts est de voir le fossé se creuser entre les zones urbaines et rurales. « Même pas 10% des enfants préscolarisés sont dans un système correct dans le rural« , estime Taieb Chkili, où le privé ne se développe pas faute de moyens pour payer pour la majorité des foyers. Pour y remédier, la FMPS a trouvé une façon de gérer ses 300 classes réparties sur tout le territoire marocain. « Dans les villes, les frais sont plus élevés que dans le rural, afin que ces bénéfices permettent de faire fonctionner les écoles rurales« , explique l’ancien ministre de l’Education de 1988 à 1993.
Pour arriver à une généralisation et à des services de la petite enfance de qualité, la formation des éducateurs et éducatrices doit être modernisée et généralisée selon Taieb Chkili. « L’idée est d’avoir une approche didactique et de ne pas seulement apprendre à réciter, mais plutôt par le jeu et les échanges« , explique le président de la fondation. « Il faut aussi passer de façon transitoire d’une langue maternelle à l’arabe littéral pour préparer le primaire« , continue-t-il.
Où est l’Etat ?
Mais selon lui, tout ce travail n’est pas possible si l’Etat ne montre pas sa volonté d’agir. « Alors que le préscolaire est inscrit comme une priorité par le Conseil supérieur de l’éducation, nous ne voyons pas de stratégie sur le plan pratique« , critique le président de la fondation qui appelle à « instaurer une stratégie et une gouvernance à même de généraliser à court terme l’enseignement préscolaire dans notre pays ».
Ce travail avait commencé à être réalisé par le ministère de Mohamed Hassad avant qu’il ne se fasse limoger. « Nous avions prévu de généraliser le préscolaire d’ici 2027 avec une première phase en janvier d’émergence avec l’ouverture de 456 salles de classes, inutilisées dans les écoles primaires« , détaille Taieb Chkili. Était aussi prévu la formation de 400 éducatrices et éducateurs. Une réforme en stand-by depuis le départ de l’ancien ministre.
« La multitude d’interlocuteurs est un frein à la généralisation d’un système préscolaire cohérent. L’éducation nationale, les affaires sociales, les Habous, le système associatif et le privé s’en occupent… Il faut une unité de gouvernance qui assure la cohérence des différents critères et modalités d’architectures de ce modèle de préscolarisation« , estime Taieb Chkili.
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