Six pitchs de dirigeants africains pour attirer les investissements chinois

À l'issue du China Africa Investment Forum, hommes d'affaires, représentants de gouvernement ou institutionnels ont défilé devant les investisseurs chinois pour leur présenter des opportunités d’investissements.

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Moualy Hafid Elalamy et Othman Benjelloun discutent en marge du China Africa Investment Forum. Crédit : CAIF 2017/Flickr

Au deuxième jour du China-Africa Investment Forum de Marrakech, la salle plénière s’est vidée, laissant des chaises de velours rouge orphelines de spectateurs. Mais dans les salons confinés du chic Four Seasons, les businessmen africains, marocains et chinois discutent à voix de basses de prochains potentiels projets ou partenariats. « Les (rencontres, ndlr)  B2B qui ont mis en relation les directeurs et opérateurs des différents continents semblent être fructueux et j’espère que cela donnera de véritables business« , a espéré le ministre de l’Industrie et de l’investissement, Moulay Hafid Elalamy, dans son discours de clôture, avant d’accueillir sur scène six opérateurs chinois et de leur lancer un joyeux: « Welcome to Morocco ».  Suite à ce cérémonial, six décideurs africains se sont succédés devant sur cette même scène pour présenter des projets susceptibles d’intéresser des investisseurs originaires de l’Empire du milieu.

Lire aussi : Comment l’Afrique, avec en tête le Maroc, drague les investisseurs chinois

Mohamemed VI Tanger Tech City

À l’issue d’une vidéo promotionnelle du projet, le secrétaire d’Etat à l’investissement Othman El Ferdaous fait une piqûre de rappel au sujet du projet ambitieux lancé en collaboration avec le groupe Haite aux environs de Tanger.  Pour susciter l’intérêt de l’audience, le secrétaire d’Etat rappelle que la future Mohammed VI Tanger Tech City  ne se situe qu’à 14 kilomètres de l’Espagne et donc de l’Europe.  Othman El Ferdaouis s’appuie également sur les liens historiques entre le Maroc et la Chine pour faire la promotion du projet en rappelant que les deux pays étaient sur la même route commerciale aux XIVe et XVe siècles du temps de Magellan. Histoire d’ancrer dans le temps de futurs investissements potentiels.

Le Maroc en tant que hub financier

La BMCE Bank of Africa a plaidé sa cause en tentant de convaincre les investisseurs qu’il étaint interessant pour les entreprises de démultiplier leurs activités dans les pays africains à partir du  « hub financier » qu’est le Maroc. « A partir de notre filiale en Angleterre, nous touchons l’intégralité des pays d’Afrique », affirme  Mohamed Agoumi, directeur général délégué en charge des activités internationales du groupe BMCE Bank qui compte des représentations dans 23 pays.

Premier argument avancé pour convaincre les investisseurs, la fiscalité avantageuse du royaume.  » D’abord, vous êtes exonérés d’impôt sur les sociétés pendant cinq ans puis vous bénéficiez d’un taux réduit de 8% pour les 20 années à suivre «  explique  Mohamed Agoumi devant une audience chinoise à l’oreille bien tendue.

Deuxième argument présenté, le positionnement stratégique du royaume. « Même si le Maroc n’est pas compétitif en matière d’énergie, il l’est en matière de salaire et de logistique puisque vous êtes à environ deux jours de camion des capitales européennes, et une semaine des ports d’Afrique de l’ouest« , a-t-il plaidé.

Le responsable de la BMCE a aussi mis en avant la possibilité de profiter des accords de libre échange qu’a signé le Maroc  avec l’Europe et les Etats-Unis, afin d’aider les investisseurs chinois à construire leurs business modèles en pensant à ces variables. À la question d’un investisseur pour connaître les taux d’intérêts pratiqués par la BMCE, Mohamed Agoumi répond : « Je vous recommande d’emprunter en devise où les taux pratiqués sont les mêmes qu’à l’international, pouvant aller jusqu’à 2,8% pour nos meilleurs clients« , explique-t-il. « Nous avons beaucoup de liquidité du fait du taux de correspondants à travers le monde« , conclut le banquier.

Plus de Chinois à la CFC 

Manal Bernoussi, représentante de Casablanca Finance City (CFC) a milité pour que les entreprises chinoises suivent l’exemple des géants Huawei et Bank of China en obtenant le statut CFC.  « Nous sommes présents en Afrique pour couvrir les activités africaines, au lieu de le faire depuis les bourses de Londres ou de Paris« , explique-t-elle. Elle garantie un accompagnement dans les démarches administratives, notamment pour les contrats de travail d’étranger et la carte de séjour. « Nous ne sommes pas un paradis fiscal même si les taxes sont attractives« , précise-t-elle à la fin de sa présentation. Un message reçu même si l’un des opérateurs chinois semblait plus intéresser par les besoins du CFC en solution IT et en infrastructures.

Une rive aménagée à Bamako

C’est un projet d’envergure qui a été présenté par Moustapha Ben Barka, secrétaire général adjoint à la présidence du Mali. Il a exposé l’ambition du pays de transformer sa capitale, Bamako, en réaménageant les rives du fleuve Niger qui la traverse. « Beaucoup de foncier est inexploité et inexploré, c’est un projet sur des centaines d’hectares où nous devons investir 700 millions d’euros« , explique le Malien qui espère susciter de l’intérêt auprès des investisseurs chinois, mais aussi des partenaires marocains.

Il a notamment demandé à la BMCE une assistance dans la mise en place de la structure financière du projet et à Moulay Hafid Elalamy de l’aider à trouver des investisseurs chinois . « Nous avons à la fois besoin de constructeurs pour les routes et immeubles, mais aussi de financements structurés, dont une partie sera publique, et l’autre privée« , détaille-t-il suite aux questions de certains opérateurs chinois qui cherchent à se positionner. La société chinoise d’assurance-crédit à l’international SinoSure se dit par exemple prête à « garantir des financements mais il faut d’abord des investissements privés« , explique son représentant de la région Afrique du Nord, de l’ouest et centrale, Liu Yumeng, basé en Egypte.

Une smart city au Ghana 

Construire le premier parc technologique d’Afrique de l’Ouest, la Ghana Cyber City. C’est le pari de Yaw Owusu, fondateur de la société Gateway innovation, qui espère ensuite répliquer le modèle en République démocratique du Congo. Incubateur, université, data center … Près de 200 millions de dollars d’investissement sont nécessaires.

« Nous avons besoin de capital« , explique l’homme d’affaire ghanéen qui explique « avoir déjà construit et commercialisé une marque« . Un opérateur chinois de l’assemblée le félicite, en lui disant que ce projet lui semble proche de la smart city Shenzhen, où le ghanéen avoue s’être déjà rendu en 2007. « Mais quelles sont les conditions préférables pour que l’on s’y implante ?« , demande l’opérateur chinois qui possède une société de technologie. « Nous accueillons déjà des sociétés chinoises. Nous pouvons assurer et faciliter votre arrivée au Ghana, vous réserver une place dans la Ghana Cyber City, vous aider dans la protection de la propriété industrielle, ainsi qu’au niveau des taxes« , répond-il.

14 milliards de dollars à Madagascar

Après des projets précis mais ambitieux, c’est au tour d’Augustin Andriamanamoro, ancien ministre malgache des télécommunications, de s’exprimer. Il détaille l’ambition large du président de Madagascar de porter le taux de croissance du pays au dessus de la barre des 8% et de réduire ltaux de pauvreté à 48% contre 92% actuellement.

Après une brève présentation de son pays, inconnu pour certains opérateurs chinois de l’assemblée, il énumère les projets « qui nous tiennent à coeur« . Mise en place de structures pour l’énergie, l’agriculture, le tourisme, actifs financiers, industrie, ports… « Nous avons besoin au total de 14 milliards de dollars, dont des investissements privés, car nous comptons remplir notre objectif en cinq ans« , explique le représentant malgache. Il précise que des opérateurs seront invités à se rendre à Madagascar au mois de janvier prochain.

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