Hassan Meniani, journaliste de formation, s’intéresse à 1.420 racines de mots utilisés en darija dans son livre « Les origines du dialecte marocain« . Son dictionnaire est un exercice qu’il a voulu faire pour « rendre hommage à la richesse du dialecte marocain, qui a longtemps été traité à tort comme une langue de l’ignorance ». Pour lui, « la darija marocaine est l’un des dialectes les plus riches en termes de synonymes inspirés de l’arabe classique ».
Meniani estime par ailleurs que la langue marocaine puise à 70 % dans l’arabe classique. Des mots comme « zlaq » dont la racine du mot est « inzalaqa » (« glisser ») gardent une proximité avec leur racine en arabe classique.
L’auteur relève une autre tendance de mots qui « sont arabes alors que généralement, on ne les croit pas arabes ». Il cite par exemple: « wech« , « ssret » (« avale »), « charef » (« vieux »), « bezez« (« de force »), « kharbeq » (« désordonné »).
L’amazigh est la deuxième langue à laquelle la darija emprunte. La langue autochtone influence « le dialecte dans sa phonologie » selon les régions. On apprend que des mots de la darija comme « skssou » (« couscous »), « tabrouri » (« grêle »), « babouch » (« escargot »), « khouchef » (« se lancer »), « bissara » (« purée de fèves »), « fertetou » (« papillon« ) sont des mots amazighs.
Meniani estime que la colonisation française a contribué à « l‘évolution du dialecte marocain« . Il explique que l’analphabétisme a disposé la société marocaine à remplir des vides dans son vocabulaire « spécifiquement ceux concernant la construction, l’agriculture, l’industrie et le commerce« . C’est ainsi que les mots tirés de la langue française sont adaptés aux règles de la langue arabe, au féminin comme au pluriel. Par exemple: le mot « place » en darija devient « blassa« , et « blayss » au pluriel. Le dictionnaire souligne que « kabout » (manteau) a pour origine française le mot… « capote », tandis que « zoufri » (célibataire) tire sa source du mot « ouvrier ».
D’autres influences coloniales européennes ont apporté à la darija, à l’instar de la langue portugaise dont on a hérité les termes « bagno » (« récipient »), « garro » (inspiré de « cigarro »: « cigarette »), « manta » (« couverture ») ou encore « kouzina » (« cuisine »). D’autres mots d’origine espagnole perdurent à ce jour dans le jargon avec des mots comme « rwida » (« roue ») dont la racine est « rueda ».
On retrouve même quelques influences de la culture ottomane. Le mot « dogru » a ainsi donné naissance à l’expression « doughri« , qui renvoie à quelqu’un ou quelque chose de droit. Hassan Meniani conclut en rappelant que le dialecte marocain a aussi influencé les langues des cultures qu’il a côtoyées.
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