L'arrestation d'Al Amoudi impactera-t-elle la liquidation de la Samir ?

Cheikh Al Amoudi, patron de Corral group, le principal actionnaire de Samir avant sa mise en liquidation a été arrêté en Arabie Saoudite. Quelles incidences sur la procédure judiciaire ?

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L’annonce de l’arrestation en Arabie Saoudite de Mohammed Hussein al-Amoudi, l’ex-actionnaire majoritaire de la raffinerie Samir dans le cadre d’une importante purge organisée dans le royaume wahhabite interpelle aussi au Maroc .

Cette arrestation va-t-elle impacter la procédure de liquidation de la Samir en cours? À l’heure où nous publions ces lignes, le syndic Mohammed El Krimi chargé de la liquidation est resté injoignable. Cela dit, les dispositions du code de commerce nous permettent de clarifier quelques points. « La procédure de liquidation judiciaire est ouverte lorsque la situation de l’entreprise est irrémédiablement compromise. (…) Le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens, même de ceux qu’il a acquis à quelque titre que ce soit, tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée », dispose l’article 619 du code de commerce. En des termes plus simples, les actionnaires et dirigeants sont dessaisis de tous leurs droits sur l’entreprise. C’est le syndic nommé par le tribunal qui préside aux destinées de l’entreprise dans le cadre de la procédure judiciaire. À la lumière de ce texte, al-Amoudi n’a plus aucun droit de gestion sur l’entreprise depuis le jour où la liquidation judiciaire a été prononcée. Son arrestation n’a donc à priori aucun impact sur le cours de la procédure.

Cette arrestation pourrait par contre entraver une autre procédure que le syndic et juge-commissaire pourrait engager contre Al Amoudi et son acolyte et ex-directeur général de Samir, Jamal Baamer, si les résultats des audits effectués concluent à de la mauvaise gestion. Selon des informations dont disposaient Telquel, le syndic et le juge commissaire ne voulaient ouvrir ce chapitre qu’une fois la cession de Samir actée.

L’article 706 du code de commerce dispose qu’« en cas de redressement ou de liquidation judiciaire d’une société, le tribunal doit ouvrir une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire à l’égard de tout dirigeant contre lequel peut être relevé un des faits ci-après: 1) avoir disposé des biens de la société comme des siens propres ; 2) sous le couvert de la société masquant ses agissements, avoir fait des actes de commerce dans un intérêt personnel ; 3) avoir fait des biens ou du crédit de la société un usage contraire à l’intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement ; 4) avoir poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu’à la cessation des paiements de la société ; 5) avoir tenu une comptabilité fictive ou fait disparaître des documents comptables de la société ou s’être abstenu de tenir toute comptabilité conforme aux règles légales ;6) avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l’actif ou frauduleusement augmenté le passif de la société ; 7) avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière ».

Pour rappel, al-Amoudi a été appelé à plusieurs reprises à effectuer des augmentations de capital pour renflouer les caisses de la société et rétablir son équilibre financier. Il a promis à plusieurs reprises des sommes, dont la dernière était de 6 milliards de dirhams, sans jamais passer à l’acte. Ce qui a conduit la société à la procédure de liquidation judiciaire.

Cela est-il suffisant pour conclure qu’El Amoudi et Baamer ont conduit la Samir à la faillite ? Peut-être pas. Toutefois les audits effectués sur les comptes de la société par les équipes du syndic permettront d’éclairer sur comment ces deux hommes ont dirigé une si grande entreprise sans que le principal actionnaire n’y mette un dirham de ses fonds propres. Et c’est à ce niveau que l’arrestation d’Al Amoudi pourrait contrecarrer les plans du syndic et du juge commissaire.

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