L’agression sexuelle de la jeune Imane en plein jour dans un bus de la société M’dina Bus a suscité l’émoi et les réactions de toute part. Plusieurs interrogations ont notamment porté sur la responsabilité de la compagnie dans de telles circonstances. Nos confrères du 360.ma annoncent même que la société délégataire pourrait être visée par une enquête du parquet.
Notons qu’ au-delà du drame d’Imane, les vols, agressions à l’arme blanche, et autres actes de vandalisme sont le lot quotidien des bus de la capitale économique. « Il ne faut pas déplacer le problème chez l’entreprise privée. Ces agressions et incidents relèvent de la sécurité publique« , nous explique Moulay Youssef El Ouedghiri, directeur du capital humain, et responsable de la communication de M’dina Bus. Il rappelle au passage que « les bus, comme les trains ou le tram, sont considérés comme un espace public et sa sécurité relève de la responsabilité des pouvoirs publics« .
À en croire notre interlocuteur, lorsqu’un usager est agressé, l’entreprise et sa responsabilité ne sont donc pas engagées. Cela se limite à l’aspect moral de la chose, car l’usager qui a payé son ticket est couvert par l’assurance pour responsabilité civile contractée par l’entreprise et peut de ce fait prétendre à être indemnisé.
Le responsable de la communication de M’dina Bus indique que la société a investi « depuis 2013 dans un système de vidéosurveillance et de communication via Radio« . « 80 % de notre flotte est équipée de quatre caméras – une positionnée au-dessus du conducteur et les autres à l’intérieur du bus et couvrant tout l’intérieur -, le reste est équipé de deux caméras seulement pour des raisons techniques« , poursuit notre interlocuteur.
Pourtant cet arsenal de caméras n’a pas permis à l’entreprise de prendre connaissance de l’agression sexuelle d’Imane avant la publication de la vidéo filmée par téléphone sur les réseaux sociaux, trois mois après le drame. « Bien que nos caméras soient reliées à un centre de contrôle, nos équipes ne peuvent pas visionner en direct les caméras des 700 bus en circulation« , oppose El Ouedghiri.
Il affirme que l’entreprise n’avait aucun moyen d’être informée de l’incident à moins que le chauffeur ou le contrôleur ne le déclarent. Selon ce dernier, les employés de l’entreprise ont des consignes « claires » quant à l’attitude à adopter face à de telles situations: arrêter le bus, contacter les contrôleurs et alerter le poste contrôle ainsi que le responsable civil (qui travaille pour M’dina Bus) qui doit déposer plainte auprès des autorités.
D’ailleurs, l’entreprise délégataire adresse à la fin de chaque mois un rapport au ministère de l’Intérieur, et aux gouverneurs les statistiques des violences constatées dans l’exercice de ce service public.
Par conséquent, le dispositif de vidéosurveillance sert seulement « à traiter les agressions et autres incidents a posteriori en fournissant des preuves aux éléments de la sûreté nationale pour qu’ils puissent faire le suivi des plaintes et interpeller les agresseurs« .
D’après les chiffres communiqués par M’dina bus, en 2016 il y a eu plus de 5.265 incidents recensés contre 3.165 une année auparavant et 2.480 en 2014. Sur trois ans, M’dina bus a déclaré aux autorités près de 11.000 affaires. dans le seul quartier de Hay Hassani, plus de 1.240 incidents ont été enregistrés en 2016.
Parmi ces incidents, des attaques à l’arme blanche et aux sabres qui « ont failli coûter la vie à un contrôleurs. Il s’en est sorti avec une blessure au visage qui a nécessité 36 points de suture et une marque à vie« , précise Moulay Youssef El Ouedghiri. Les employés sont couverts par l’assurance de l’entreprise lors de tels incidents, car ils sont considérés comme des accidents de travail.
Pour sa défense, M’dina Bus brandit également un argument légal. « Quand bien même on renforcerait la présence des contrôleurs sur certaines lignes, non seulement ils sont eux-mêmes en danger face à des délinquants parfois armés, mais ils n’ont aucune autorité pour les arrêter« , avance le directeur du capital humain de la société.
La solution? « Mettre en place une police du transport », déclare sans détour Moulay Youssef El Ouedghiri. « Nous mettons tous les moyens logistiques nécessaires, mais il faut que les autorités se mobilisent pour la mise en place d’une brigade dédiée aux transports en commun« , ajoute-t-il.
Une revendication portée par l’entreprise depuis plusieurs années, mais qui n’a jamais trouvé d’écho favorable. Pourtant, ce ne serait pas une première au Maroc. En 2012, la veille du lancement de la première ligne du tramway de Casablanca, une convention a été signée avec la Direction générale de la sûreté nationale pour mobiliser environ 200 agents. Des éléments de la police ont été déployés dans chaque rame. Ils ont été présents en force durant la première année de lancement du service, et ont été reconduits lorsque la situation l’exigeait.
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