Les Marocains du Stylers Crew ont remporté, fin juillet à Abidjan, le concours de football freestyle des huitièmes Jeux de la Francophonie. Deux semaines après leur exploit, telquel.ma est allé à leur rencontre. Portrait de ces talentueux artistes et de leur spectaculaire discipline, largement méconnue au Maroc.
5, 4, 3… Le public reprend le décompte du speaker. 2,1… La salle se tait. Tous les regards se tournent vers la juge, qui tient les mains des deux capitaines. Elle se baisse, prend une grande inspiration…et soulève le bras de Soufiane Msalek! Le jeune homme s’effondre, la tête entre les mains. Ses coéquipiers exultent, sautent, arrachent leur t-shirt de joie. Quatre ans après s’être inclinés en finale -déjà contre une équipe française- les Marocains du Stylers Crew ont pris leur revanche, s’adjugeant leurs premiers Jeux de la Francophonie.
Une victoire qui allonge un palmarès bien fourni : quintuple champion du Maroc entre 2010 et 2015, champion d’Afrique en 2013, top 16 aux championnats du monde RBSS en Italie (2012), top 5 du meilleur show aux Mondiaux de Prague (2014-2015)… Depuis sept ans, les représentants du Royaume font partie des références internationales du football freestyle.
« C’est un lifestyle »
Leur aventure commence lorsque les six compères découvrent les acrobaties de Ronaldinho, dans une campagne de publicité pour un célèbre équipementier. Footballeurs amateurs, ils se filment en train d’imiter la star brésilienne, postant leurs prouesses sur les réseaux sociaux. Séduits les uns par les autres, ils conviennent de se retrouver « dans la vraie vie ». Le courant passe. Stylers Crew est né. Les six ados ne cesseront d’innover pour concevoir de nouvelles figures, dans ce sport/art mêlant football, danse, théâtre, gymnastique et cirque.
« Entre football et football freestyle, il y a la même différence qu’entre un joueur de cartes et un magicien qui ferait des tours avec« , s’amuse Yacine Saïdani. L’inventeur du nom Stylers Crew (« qui allie plusieurs styles dans une même équipe ») vante la créativité de sa discipline. « Il m’arrive d’imaginer des enchaînements le soir avant de dormir. C’est un lifestyle!« , s’exclame l’étudiant en management de 25 ans.
Moins de 100 000 dirhams de recettes annuelles
Très facile d’accès -il suffit d’un ballon- le football freestyle se pratique aussi bien en démonstration qu’en compétition, individuelle ou en groupe. Un jury note la technique et la difficulté des gestes, l’originalité de la chorégraphie, la coordination ou encore l’esprit collectif. « Les tournois nous font connaître dans le milieu, mais c’est les shows qui nous révèlent au grand public, et nous permettent de gagner de l’argent« , explique Othmane Djedidi, le doyen de la team, du haut de ses vingt-huit printemps.
L’argent, voilà encore et toujours le nerf de la guerre. Si en Europe, les freestylers les plus connus s’entraînent six heures par jour et peuvent dégager jusqu’à 250 000€ de chiffre d’affaires annuel, l’emploi du temps de nos semi-pros marocains ne leur autorisent que deux à trois séances hebdomadaires, sans coach, et ils n’engrangent pas plus de 100 000 dirhams au total. Ici, les sponsors sont beaucoup plus rares. Les rémunérations des prestations, promotion de marques et autres festivals, demeurent aléatoires.
Les magiciens du ballon rond ont bon espoir que la situation évolue. Dans quelques semaines, deux d’entre eux participeront au lancement d’un Comité national des sports urbains, qui devrait ensuite se transformer en fédération. Objectifs : structurer des clubs, développer une pratique qui ne compte aujourd’hui que soixante-dix adeptes et, plus globalement, donner de la valeur aux sports extrêmes. Quels meilleurs ambassadeurs, pour cela, que les pionniers surdoués du football freestyle?
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