C’était il y a un an. Dans son discours à l’occasion de la fête du trône, Mohammed VI définissait le rôle de l’opposition. Celui de “formuler une critique constructive et proposer des alternatives raisonnables, dans le cadre d’une compétition responsable pour trouver des solutions concrètes aux préoccupations et aux problèmes réels des citoyens”. Depuis, le Maroc a voté, et le paysage politique s’est artificiellement polarisé entre le PJD vainqueur et le PAM, triste second. La majorité au parlement est menée par les islamistes et les rangs de l’opposition sont occupés par les Pamistes. Cette opposition doit aujourd’hui être jugée. Ce n’est un secret pour personne, ce journal s’est toujours fermement opposé à l’idéologie islamiste. Il aurait été aisé de choisir un camp, celui des anti-islamistes, des progressistes, celui dont le PAM se prévaut. D’ailleurs, un influent publiciste de la place nous avait gentiment suggéré de prendre partie pour le tracteur. Seulement voilà, le PJD a travaillé, argumenté et convaincu, et le PAM a usé des vieilles méthodes. “C’était le seul moyen de limiter la déferlante islamiste”, justifiait un proche du parti d’Ilyas Elomari. A supposer que les soldats du PAM avaient de bonnes intentions, l’enfer dans lequel ils ont plongé la scène politique est une réalité.
Le PAM est loin d’incarner l’opposition que Mohammed VI disait vouloir pour le Maroc. Et ce n’est pas ce parti qu’il faut blâmer – il compte des membres de valeur et compétents -, mais bien ceux qui l’ont dopé. Car en gonflant le PAM, on a privé toute opposition légitime d’émerger. Impossible d’exister dans l’ombre d’un tracteur qui broie tout sur son passage. Pendant les élections d’octobre, nous avons récolté des dizaines de témoignages de pauvres bougres payés pour remplir les meetings de ce parti. D’autres ont été fermement invités par les moqaddems à voter pour le PAM, et la “générosité” des hommes d’affaires a été plus que sollicitée. Pendant la période électorale, un ancien militant de gauche acquis à la cause pamiste nous expliquait même en quoi la fin justifiait les moyens. Effrayant. Aujourd’hui, ce parti est incapable d’assurer l’intermédiaire dans la crise d’Al Hoceïma, où il est pourtant seul aux commandes. Pire, aucun parti marocain ne compte dans ses rangs autant de Rifains, qui demeurent inaudibles auprès de la population de la région. Alors à quoi sert le PAM ?
Comme les autres partis de l’administration avant lui, le PAM a été une réponse tactique pour contrer un parti dominant. Depuis plus de 50 ans, depuis la création du Front pour la défense des institutions constitutionnelles (FDIC) par Ahmed Reda Guedira, c’est la même tendance lourde, inefficace, et surtout absolument pas stratégique. La preuve par la situation politique actuelle. Il faut que le Palais lâche prise, aucune menace sérieuse ne pèse sur lui. Il a la meilleure garantie : une légitimité unanimement reconnue par les Marocains. Au lieu d’utiliser cette force pour contraindre, il faut la préserver précieusement en laissant les citoyens assumer leurs choix. Qu’ils se trompent. Ils rectifieront. L’erreur du PAM est désormais passée, il ne faudrait pas céder à la même tentation en 2021, avec le RNI par exemple. Un exemple innocent, bien sûr.
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