Portrait: Kaoutar Yaiche, la voix marocaine du développement durable à l'ONU

A 24 ans, Kaoutar Yaiche a présenté son engagement pour le développement durable au Maroc lors d'un atelier de l'ONU sur le financement des objectifs énergétiques 2030. Portrait.

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Kaoutar Yaiche, 24 ans, lors de l'atelier sur le financement des objectifs énergétiques de l'ONU. DR

« J’étais la seule Marocaine, et même d’Afrique, dans le panel« , déclare avec une pointe de fierté Kaoutar Yaiche, ingénieure en énergie. La jeune femme a été sélectionnée pour participer à l’événement organisé au siège de l’ONU le 18 avril, et consacré au financement des objectifs 2030 de développement durable (ODD).

« La question est de savoir comment financer ces objectifs, car cela demande des budgets énormes« , précise la jeune femme de 24 ans qui a fait entendre la voix du Maroc et a évoqué ses expériences sur le terrain lors de son intervention en tant que membre du panel onusien. En effet, les investissements annuels dans les ODD sont estimés à 6.000 milliards de dollars, soit 90.000 milliards de dollars sur quinze ans, selon Peter Thomson, président de l’Assemblée générale des Nations unies lors de cet événement nommé « SDG Financing Lab ». La jeune ingénieure a été sélectionnée après un long processus de candidature. Elle a en effet été choisie avec une vingtaine d’autres femmes de la région MENA, parmi 400 candidates.

À la fois engagée dans le secteur privé et le milieu associatif, elle a pu défendre son credo: développer les partenariats public-privés (PPP). « Les PPP permettent d’apporter une expertise technique en plus de financer les projets énergétiques de développement durable« , explique-t-elle. « Le Maroc est l’exemple même du succès de ce système avec Noor, le plus gros projet de solaire au monde« , défend Kaoutar Yaiche qui travaille pour Gait Industries au Maroc, société privée qui réalise des projets liés aux énergies renouvelables pour les particuliers et les entreprises.

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Kaoutar Yaiche plaide pour l’amélioration de l’efficacité de la collecte des recettes fiscales afin de mobiliser les ressources domestiques et développer le PIB du pays. « Le but est aussi de fixer une régulation et des lois claires pour attirer les investisseurs étrangers« , souligne-t-elle.

kaoutar yaiche onuSelon la jeune ingénieure, les acteurs privés sont incontournables dans le développement durable. « Il y a suffisamment d’argent dans le secteur privé pour financer le développement durable, mais ils ne savent pas comment investir« , observe-t-elle. Elle estime que le secteur privé est frileux, car il n’a pas suffisamment d’informations sur les projets ou les pays où investir. « Il faut aussi que les gouvernements se mobilisent pour élaborer des projets avec des budgets plus importants pour attirer les investisseurs« , considère-t-elle.

Brillant parcours

« J’ai donné pour exemple l’action de recyclage de papier que nous avons initié au Maroc avec mon association« , explique encore Kaoutar Yaiche qui a fondé l’Association nationale de l’environnement et des énergies renouvelables (ANEER) alors qu’elle était encore étudiante. L’ANEER a par exemple signé des conventions avec plusieurs imprimeries et écoles à Rabat pour récupérer directement le papier dans leurs locaux et ne plus passer par le secteur informel. « Nous avons remarqué que le taux de papier qui est recyclé est plus élevé. Ce qui entre dans l’objectif numéro 13 de l’ONU: recycler plus de papier, couper moins d’arbres, absorber davantage le CO2 et combattre le changement climatique« , résume l’ingénieure.

Un projet qu’elle a développé lors du programme de leadership pour les femmes entrepreneurs, « She Entrepreneurs Programme », à l’Institut suédois de Stockholm. « Cela a commencé comme une initiative, mais le but est de transformer ce projet en entreprise sociale« , explique-t-elle.

Son engagement contre le réchauffement climatique a commencé dès 2012, alors qu’elle était en classe préparatoire à Fès pour intégrer les écoles d’ingénieur. « Quand j’ai entendu parler du lancement du projet ambitieux Noor, je me suis dit que l’avenir du Maroc et du monde entier se trouvait là« , témoigne-t-elle. « Autant faire ma carrière dans quelque chose qui a un impact sur l’environnement« , conclut celle qui a intégré la filière « Énergie éolienne et solaire » de l’École d’ingénieur des mines de Rabat. Elle en sort avec son titre d’ingénieur en 2015.

« Il y a encore beaucoup de projets à réaliser au Maroc dans les énergies renouvelables, mais d’ici quatre ou cinq ans, je souhaite m’orienter vers une carrière de management afin de maîtriser le domaine financier de l’environnement et du changement climatique« , ambitionne la jeune femme.

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