La Coalition contre les abus sexuels sur les enfants (Cocasse) présente son rapport 2015 ce 26 novembre à Rabat. D’après les statistiques avancées par l’association, 935 agressions sexuelles sur mineurs ont été répertoriées en 2015, contre 850 en 2014 et 768 en 2013.
Difficile de savoir si les actes ont été plus nombreux ou bien si les victimes et leurs familles osent davantage parler et dénoncer. D’après les chiffres avancés, ces agressions concernent majoritairement les garçons, bien plus que les filles (635 contre 300). Ces chiffres sont certainement en deçà de la réalité puisqu’ils ne prennent en compte que les faits relatés à la Cocasse ou bien ceux relayés par la presse.
La Cocasse différencie plusieurs fléaux. Il y a les agressions sexuelles et viols sur mineurs qui se déroulent dans le milieu familial (plus de 58 % des cas recensés en 2015), qui restent peu connues. Elles sont souvent dues à des pulsions sexuelles ponctuelles. Il y a des enfants victimes de pédophiles, que la Cocasse définit comme étant une personne ayant une attirance sexuelle envers les impubères et qui transforme ses fantasmes en pratiques.
Parmi eux, des étrangers, qui abusent d’enfants dans le cadre du « tourisme sexuel ». Parmi les touristes, certains choisissent le Maroc comme destination pour assouvir leurs envies, d’autres ne prévoient pas à l’avance de tels crimes mais se laissent « tenter » une fois sur place. Certains de ces actes sont pratiqués contre rémunération, il s’agit alors là de prostitution enfantine. « Le Maroc est devenu l’une des destinations privilégiées des abuseurs », estime la coalition, qui cite les villes de Marrakech, Agadir, Essaouira et Tanger. Enfin, pour la Cocasse, les mariages précoces font également partie de cette violence sexuelle. On peut parler d’abus puisque les actes ne sont pas consentis étant donné qu’il s’agit de mariages forcés.
Des enfants prostitués souvent « reconnus coupables »
La Cocasse pointe du doigt plusieurs problèmes. D’abord, la loi. Le viol n’est pas considéré comme un crime contre une personne, mais contre l’ordre des familles et la moralité publique. Le code pénal puni le viol de mineurs de 10 à 20 ans. Dans les faits, les pédophiles écopent de peines moins importantes. « Je pense que les juges n’arrivent pas à considérer que l’abus sexuel est un acte abominable, ils n’arrivent pas à ressentir les dégâts sur l’enfant », nous explique Khalid Semmouni, président de la Cocasse. Ensuite, la coalition regrette que l’enfant qui se prostitue « est souvent reconnu coupable » et « placé dans un centre ».
Aussi, l’organisme explique qu’il est difficile pour un enfant d’avoir accès aux services de police parce qu’il doit être accompagné d’un parent ou d’un tuteur pour déposer plainte. Enfin, la Cocasse dénonce l’absence d’une assistance médico-légale gratuite pour les enfants abusés, comme cela est pourtant prévu.
Le rapport félicite quand même la prise de conscience du fléau : « Le phénomène au Maroc n’est pas un tabou, c’est déjà un énorme pas ». « Ces dernières années, il y a un changement, de plus en plus de familles ne veulent plus se taire et ont le courage d’aller voir la police », nous explique Khalid Semmouni. Parmi les recommandations citées dans le document : des cours d’éducation sexuelles et de droits de l’Homme à l’école, la lutte contre la corruption des agents de police, le rôle à jouer des agences de voyage (prévention auprès des clients et boycott des hôtels connus pour recevoir des touristes sexuels), des spots de sensibilisation de la population marocaine et la sensibilisation des juges, avocats et policiers.
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