Ford a annoncé mardi 26 mai, l’ouverture d’un bureau de vente à Casablanca et d’un bureau d’achat à Tanger. La vente de véhicules de la marque américaine dans le royaume remonte à 1921, depuis qu’Auto Hall commercialise ses véhicules. L’accélération de son implantation, si elle est concrétisée cette semaine, s’inscrit également dans un long processus qui remonte à 2010, sous le gouvernement d’Abbas El Fassi.
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À l’époque, Ahmed Reda Chami est aux manettes au ministère de l’Industrie. Depuis son arrivée au gouvernement en 2007, il a établi la liste des constructeurs potentiellement intéressés par une installation au Maroc. Peugeot, General Motors, Volkswagen, BMW, Fiat, Toyota… La liste est longue. Chami croit aux atouts du royaume pour un constructeur international. Le contrat-cadre avec Renault est déjà sur la table, mais le gouvernement veut élargir le champ des possibles.
Si un constructeur désire s’implanter en Afrique, il ne faudrait pas que le Maroc manque l’occasion. Si une marque devait investir au Maroc, il ne faudrait pas que le ministère soit à côté du deal. « Il fallait que l’on apparaisse sur l’écran radar des constructeurs. Ma hantise était qu’une marque investisse sans nous consulter », se souvient Ahmed Reda Chami. Alors, armé d’une belle présentation sur le Maroc, le ministre joue les VRP autour du monde. À Séoul, en Corée du Sud, il rencontre les responsables de Kia. Sa seconde visite, en 2009, témoigne de la longueur de processus pour l’installation d’un constructeur automobile. D’entrée de jeu, Chami prévient qu’au terme de cette seconde visite il espère que des décisions concrètes seront prises. Le vice-président de Kia calme obligeamment ses ardeurs en lui citant un proverbe coréen : « Pour faire tomber un arbre, le bûcheron doit frapper au moins dix fois ». Dont acte. Chami se dit prêt à revenir encore huit fois pour conclure un deal.
Direction Detroit
Lorsqu’en 2010, les négociations débutent avec Ford, le ministre est rôdé à l’exercice et à la patience. Le rapprochement avec le géant américain a lieu grâce à un réseau noué au fil des années. Par l’intermédiaire de Hamid Ben Brahim, alors président de MATIS Aerospace, une filiale de la RAM et de Boeing, le ministre se rapproche de Seddik Belyamani fraîchement retraité de Boeing et consultant en aéronautique. Lors de ces années chez l’avionneur américain, Belyamani a côtoyé Alan Mulaly, désormais PDG de la Ford Motor Company. La boucle est bouclée. Ahmed Reda Chami s’envole pour Detroit.
L’ancien ministre se souvient de l’entretien avec Mulaly : « Sur son bureau, le PDG avait une petite feuille préparée par son équipe et qui contenait les chiffres du sourcing de Ford au Maroc. Ils prévoyaient d’atteindre rapidement les 100 millions de dollars d’achats de pièces détachées ». Ford bénéficie déjà d’une expérience réussie au Maroc, Chami veut transformer l’essai. Son but est de convaincre Mulaly d’installer une usine d’assemblage au Maroc. Ce ne sera pas pour cette fois. Une usine marocaine aurait besoin de débouchés européens. Or, les Européens patinent dans la crise et n’achètent plus de voiture. Les usines Ford en Europe sont déjà en surproduction. Chami et Mulaly s’engagent néanmoins à développer mutuellement l’achat de pièces détachées au Maroc. Ford en doublant ses achats. Le ministre en développant les réseaux de fournisseurs.
Cette semaine, Ford a à nouveau annoncé qu’elle doublait le sourcing. Même scénario qu’il y a 5 ans ? Peut-être. À la différence près que le marché européen reprend progressivement de la vigueur et que l’usine Ford de Valence pourrait ne plus y suffire. Le marché africain est par ailleurs en pleine expansion. Les grands groupes mondiaux tentent de s’y imposer, notamment en développant de nouvelles gammes low-cost.
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