C’est dans les Anciens abattoirs de Casablanca, reconvertis en « fabrique culturelle », que nous rencontrons Saïd Taghmaoui. Celui qui figure parmi les acteurs marocains ayant le mieux réussi à s’exporter (après avoir été révélé avec La Haine, il ratait de peu le César 1996 du meilleur espoir) y tournait les prochains clips de Skrillex et Damian Marley, le week-end du 6 et 7 septembre.

Ce labyrinthe de rues et de bâtiments abandonnés recouvert de tags sur 5 hectares dégage une atmosphère de liberté, où l’imagination d’un réalisateur peut facilement se perdre et se métamorphoser à l’envi.

C’est ainsi qu’au détour d’un mur on retrouve le terrain de chasse d’un tueur à gage chez Damian Marley, ou, au fond d’un bâtiment, la prison d’un boxeur de rue chez Skrillex.

Partir pour mieux revenir. C’est en rencontrant à Los Angeles, lors des MTV Awards, il y a à peine 1 mois, le réalisateur américano-iranien Nabil Elderkin (à qui on doit les clips de Jay-Z, Lana Del Rey, Arctic Monkeys, Kanye West ou Frank Ocean), que Saïd s’est vu proposer de venir tourner au Maroc, comme pour renouer avec ses origines.

Après avoir saisi l’opportunité d’« exercer son métier » à l’international quand, en France, « il y avait encore beaucoup de ségrégation, avec peu d’acteurs [me] ressemblant et pouvant accéder à des rôles principaux », Saïd Taghmaoui a décidé de rentrer chez lui, au Maroc. En effet après les strass et les paillettes d’Hollywood, c’est chez lui que l’acteur vedette veut œuvrer à l’élaboration de « films non clichés, dans la lignée d’Ali Zaoua prince de la rue [drame social de Nabil Ayouch, dans lequel Saïd Taghmaoui a joué, sorti en 2001]». Et de révéler ses projets : il est en train de « développer une maison de production », afin comme il le dit lui-même de « redonner leurs lettres de noblesses à tous les corps du cinéma, chacun à sa place ».

Mais c’est également le réalisateur Nabil Elderkin qui tombe sous le charme du pays, au point qu’il veuille « acheter une maison ici ». Et de dire les louanges de ce pays, « au savoir-faire atypique et inédit », mais d’autant plus « naturel et humain » comparé aux méthodes « robotiques » du cinéma américain. Ce pays où tout est plus « simple », quand pour « avoir un lieu comme les abattoirs, aux États-Unis, on aurait payé des millions de dollars ! », s’exclame-t-il finalement.