Le conseil de gouvernement a adopté, jeudi 31 juillet, le projet de loi relatif au droit d’accès à l’information. Ce projet, qui a été proposé en 2013, avait suscité de nombreuses réactions et critiques de la part de la société civile et des médias.
Pour élaborer cette seconde version, le gouvernement a chargé une commission ministérielle de réexaminer la première version présentée par l’ex-ministre de la fonction publique, Abdeladim Guerrouj.
La nouvelle mouture élaborée sous la houlette du ministre Mohamed Moubdii, et qui devrait entrer en vigueur dès sa publication dans le bulletin officiel, répond en partie aux doléances formulées par la société civile et l’ICPC (Instance centrale de la prévention de la corruption), mais en enterre d’autres.
Une administration qui communique plus
Le texte garde les grandes lignes de la première version et apporte quelques plus. Ainsi, le deuxième article de la nouvelle loi, accorde désormais aux étrangers résidants au royaume -au même titre que les citoyens marocains- le droit d’accéder aux informations et aux documents détenus par les instances étatiques (administrations publiques, parlement, appareil judiciaire, établissements publics). Cela concerne les rapports, études, procès verbaux, statistiques, circulaires ou encore décisions de justice, mais aussi les textes de loi (lois organiques, projets et propositions de loi). Cette liste correspond en tout point à celle qui figure sur le texte initial.
L’administration est toujours tenue de publier le plus possible d’informations, via tous les moyens possibles de publication. Elle doit aussi fournir les informations relatives aux services qu’elles offrent au public et à leurs interlocuteurs. La personne qui accède à ces informations a également le droit de les réutiliser et d’y accéder gratuitement. Jusque là, rien ne change.
La « sécurité », notion toujours aussi vague
La nouvelle mouture du texte maintient quelques avancées, en tête desquelles le droit « de protection des sources d’informations ». Une disposition jusque-là absente de la législation marocaine, et qui a longtemps joué des tours, principalement aux journalistes.
Pour trouver les dispositions qui posent problème, il faut bien fouiller et comparer les deux textes. Le département du ministre Mohamed Moubdii a en effet interchangé l’ordre des articles.
L’article 19 qui excluait plusieurs secteurs de ce droit dans la première mouture, a désormais été scindé en deux articles. La deuxième mouture renvoi à l’article 7, qui complète la liste des domaines réservés.
Les informations relatives à la défense nationale, à la sureté interne et externe de l’Etat, à celles concernant la vie privée des individus ou encore aux délibérations du conseil des ministres et du conseil du gouvernement demeurent excluent du droit d’accès à l’information.
Ce premier point avait été vivement critiqué par Transparency Maroc. L’économiste et membre de cette association, Azzedine Akesbi, avait pointé du doigt dans TelQuel des formulations « très vagues quand on parle de sécurité du pays ». Cela demeure donc toujours le cas dans la nouvelle mouture.
Une restriction de plus
Il en va de même pour les informations qui pourraient porter atteinte aux «capacité de l’Etat à gérer sa politique monétaire, économique et financière », toujours frappées du sceau du secret.
Pire, la deuxième version de ce projet de loi a prévu une modification concernant l’article 14. Le texte initial stipulait que « la personne responsable devra répondre à la demande (d’information) dans un délai de deux jours lorsque l’accès à l’information est nécessaire ». La nouvelle version ajoute qu’il n’est pas possible d’accéder à l’information que si le demandeur y a un intérêt direct, avec l’obligation de déclarer de manière claire l’usage qui en sera fait.
En revanche, Mohamed Moubdii a tenu sa promesse concernant d’autres dispositions, parmi lesquelles le retrait de la disposition empêchant des poursuites judiciaires à l’encontre d’un fonctionnaire qui ne divulguerait pas une information « de bonne foi » (ancien article 39). La mesure a disparu du nouveau texte, qui répond ainsi à une des principales doléances d’Abdeslam Aboudrar, président de l’ICPC.
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