Souvenirs. Le sixième roman de Moha Souag est un hommage aux femmes artistes qui ont traversé avec ténacité les épreuves de la vie.
C’est bien connu, les trains servent moins à se déplacer qu’à remonter le temps. Abdelhalim, le narrateur de Nos plus beaux jours le sait dès le départ, dès « la vieille garde de Casablanca, bien assise sur les souvenirs éculés de ses années de faste ». Ce journaliste, à l’automne de sa vie, profite des quelques heures de voyage jusqu’à Marrakech pour dérouler le fil du passé, les fils entrecroisés de trois histoires. La sienne, entre veille et somnolence, entre les notes de l’article qu’il doit écrire et le souvenir de cette « Saloua des hauts quartiers d’Anfa » qui tenta de l’imposer à sa famille dont le nom « faisait trembler la moitié du pays ». Il y a aussi l’histoire d’El Haja Halouma, célèbre cheikha dont Abdelhalim retrace la biographie. Et les récits de la pimpante Mouna, chorégraphe de retour de Paris, qui agrémente le trajet à la manière d’une Shéhérazade moderne.
Moha Souag a toujours fait preuve d’une grande sensibilité à la situation des femmes. Celles qui traversent ce livre sont animées d’une passion. Mouna a choisi de revenir transmettre son art de la danse aux jeunes du Maroc – son récit est un discret hommage à Lahcen Zinoun. Quant à El Haja Halouma, privée d’éducation, mariée contre son gré, défigurée par son mari, elle n’a eu de cesse d’aller à la rencontre de son idole Abdelhalim Hafez, pour se rendre compte, au soir de sa vie, qu’elle « n’avait pas rêvé ses rêves [mais] ceux des autres », avant de renaître par la danse.
Cette trame, somme toute classique, donne une fois encore l’occasion à Moha Souag de déployer son talent de conteur. Si certains rebondissements semblent tirés par les cheveux, on savoure sa façon de raconter avec tendresse le charme de l’anodin.
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