Suite à notre analyse du projet de loi instituant l’activité des banques participatives, la banque centrale a souhaité préciser certains aspects de ce texte.
Notre analyse économique parue le 31 janvier (« Schizophrénie bancaire », TelQuel n°605) traitait du projet de loi bancaire qui ouvre la voie à l’exercice des banques islamiques au Maroc. Le propos visait à montrer l’hésitation du gouvernement à entrer de plain-pied dans cette branche de la finance. Trois arguments ont été mis en avant pour appuyer l’analyse. Pour chacun d’entre eux, voici la réaction de Bank Al-Maghrib
1. Nous avons dit dans notre analyse que le capital des futures banques participatives doit être détenu à 51% par des investisseurs marocains. Une mesure que nous avons jugée restrictive et injuste par rapport aux règles régissant l’activité des banques classiques. Bank Al-Maghrib réfute cela de manière catégorique : « Une telle disposition n’a jamais figuré dans une loi bancaire marocaine et a fortiori dans le projet de loi approuvé par le gouvernement. L’accès au marché bancaire est soumis à l’agrément du comité des établissements de crédit qui s’assure notamment que le postulant dispose des capacités financières, humaines et techniques nécessaires pour respecter les dispositions de la loi bancaire et celles de ses textes d’application », signale Bank Al-Maghrib dans un courrier adressé à TelQuel. Nous avons clairement commis une erreur, et nous nous en excusons auprès de nos lecteurs et des autorités monétaires du pays.
2. Notre deuxième argument appuyant ce que nous avons appelé la « schizophrénie bancaire » s’est basé sur le nom donné à ces banques. Alors qu’elles sont appelées dans le monde entier « banques islamiques », le Maroc a décidé de les baptiser « banques participatives ». Une appellation que nous avons interprétée comme une fuite en avant de nos autorités, car avouer aujourd’hui le caractère islamique et donc « halal » de ces banques reviendrait à dire que les banques d’aujourd’hui ne le sont pas. Voici la réponse de Bank Al- Maghrib : « Outre le fait que certains pays comme la Turquie ont adopté la même appellation, le projet de loi bancaire pose les jalons d’une industrie bancaire nouvelle basée sur le principe de partage des profits et des pertes, d’où l’appellation banques participatives ». Dont acte.
3. Pour faire la lumière sur le sentiment de gêne qu’évoque pour nos autorités monétaires le mot « islamique », nous avons dit que les banques participatives sont interdites de toute communication autour du caractère halal de leur produit. Et que le Conseil supérieur des ouléma devra au préalable valider leurs campagnes de communication et marketing. « Aucune disposition du projet de loi bancaire approuvé par le Conseil de gouvernement ne met à la charge de l’instance de conformité, en l’occurrence le Conseil supérieur des ouléma, la mission de contrôler les campagnes de communication ou les campagnes marketing des banques qui seront autorisées à exercer cette activité », signale Bank Al-Maghrib dans son courrier. Nous souhaitons ainsi préciser que l’avant-projet de loi, préparé par les services de la banque centrale, portait clairement cette intention. Preuve par l’article 67 de l’avant-projet de loi, consultable sur le site du secrétariat général du gouvernement depuis septembre 2012 : « Le comité Charia pour la finance a notamment pour mission de donner un avis préalable sur le contenu des campagnes de communication des établissements de crédit ». Cet article que nous avons jugé trop interventionniste a été allégé dans la version définitive du projet de loi, et dilué dans deux articles : le 58 et le 64. Le premier instaure un contrôle au préalable des « modalités de présentation » des produits bancaires islamiques, qui sont fixées « par circulaire de Bank Al-Maghrib après avis du comité des établissements de crédits et avis conforme du conseil supérieur des ouléma ». Le second, lui, prévoit même la création d’un comité d’audit qui aura, entre autres, pour mission le contrôle en aval « des conditions imposées pour la présentation au public d’un produit ». Les deux articles sont plus light, moins directs, mais confirment que le conseil des ouléma aura bel et bien un droit de regard sur la communication des banques participatives.
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