Gouvernement. Choubani le mal-aimé

Décrié à l’hémicycle et boudé par nombre d’associations, 
le ministre des Relations avec le parlement et la société 
civile a le don pour se faire des ennemis.

A  chaque fois qu’il s’exprime ou prend une initiative, il reçoit une volée de bois vert. Lahbib Choubani, qui figurait en tête des ministres à ne pas reconduire dans l’équipe Benkirane II, a même réussi à se mettre à dos ses collègues de la majorité. A la mi-septembre, en plein Conseil de gouvernement, il exhibe un rapport sur les ministres les moins présents au parlement. La palme revient à Aziz Akhannouch et Mohamed Ouzzine. Le problème est que certains ministres ont été inclus dans la liste alors qu’ils avaient de solides « alibis » : voyages à l’étranger ou pour accompagner le roi lors de ses visites dans plusieurs villes du Maroc. Le rapport Choubani ne verra jamais le jour. Mais le ministre PJD va encore faire parler de lui. Début novembre, des présidents de groupes parlementaires de l’opposition, qui 
n’apprécient pas son comportement, s’apprêtent carrément à adresser une lettre à Abdelilah Benkirane pour le relever de ses fonctions. Ils n’en feront rien, mais leurs griefs sont toujours là.

Le « mufti constitutionnel »

Au parlement, on reproche surtout à Lahbib Choubani de s’écarter de son rôle de médiateur entre les élus et le gouvernement pour s’ériger en maître absolu. « Les annales du parlement retiendront que Lahbib Choubani est le seul ministre des Relations avec l’hémicycle à avoir voulu prendre la parole après le vote en plénière d’une Loi de Finances », ironise Abdelkader El Kihel, député istiqlalien. Et c’est le président Karim Ghellab qui est intervenu en personne, la séance ayant été suspendue, pour lui faire entendre raison. A la mi-novembre, Choubani a carrément fait capoter la séance de la commission qui examinait le budget de son département : suite à une prise de bec entre une parlementaire PJD et une députée USFP, il s’est attaqué à l’opposition, dont les représentants se sont retirés. « C’est lui qui a un problème avec l’opposition, il considère chacune de nos initiatives comme une attaque contre l’Exécutif », estime Milouda Hazib, présidente du groupe parlementaire du PAM. « Le plus grave est qu’il s’érige parfois en mufti constitutionnel et n’accepte pas d’être contredit », enchérit un autre élu de l’opposition.

Certains parlementaires regrettent les prédécesseurs de Choubani, comme Mohamed Bouzoubaâ ou Saâd Alami, appréciés pour leur sens du consensus. Quant aux principales associations du pays, elles ont carrément choisi de faire sans lui.

Un dialogue compromis

Quand le ministre a lancé le dialogue national sur la société civile, en mars dernier, plusieurs ONG ont annoncé qu’elles n’y prendraient pas part. Un boycott en réaction au « cadrage idéologique » imposé par son ministère. « Nous nous sommes retirés parce que l’Etat s’est montré dirigiste », déclarait récemment Kamal Lahbib, vice-président du Forum des Alternatives Maroc (FMAS), dans les colonnes de TelQuel. Début décembre, pas moins de 2500 acteurs associatifs se sont d’ailleurs réunis à Bouznika pour débattre entre eux des problématiques des ONG au Maroc. Et surtout pour proposer des pistes de travail et de réflexion. Lahbib Choubani a jusqu’à mars 2014 pour présenter le résultat d’un an de dialogue qui s’annonce d’ores et déjà tronqué. Le ministre n’en sera pas moins attendu sur plusieurs points : législation, financement, approche participative… Il n’aura pas droit à l’erreur.    

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