Maroc 2.0. La révolution par le Net

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L’actualité nous le rappelle tous les jours : la sphère Internet est devenue le meilleur moyen d’investir l’espace public et de jouir pleinement d’une liberté d’expression peu commune. Tour des horizons virtuels du royaume.

 

Dans le même dossier :

« Le Web est un souffle d’air frais », une interview d’ Yves Gonzalez-Quijano, chercheur en sciences politiques, professeur de littérature arabe et auteur de l’ouvrage Arabités numériques (Ed. Actes Sud), sur http://bit.ly/YIK7ub

 

Dimanche 13 janvier, les bénévoles réunis grâce à l’appel du groupe Facebook “Anfgou et régions, nous ne pouvons être indifférents” quittaient les montagnes du Moyen-Atlas, après avoir distribué, le temps d’un week-end, denrées alimentaires, couvertures et vêtements chauds, à près de 1000 familles réparties dans 7 villages de la région. Créée en décembre 2012 sur le réseau social, la page appelant au soutien et à la solidarité contre le froid à Anfgou a réussi à mobiliser près de 600 000 dirhams de donations, 1000 bienfaiteurs et plus de 2500 internautes qui “likent” (aiment et soutiennent, du moins virtuellement) l’initiative. Le même jour, dans plusieurs villes du royaume, les forces de l’ordre ont guetté, en vain, les hypothétiques manifestations de la “jeunesse du 13 janvier”, mouvement lancé sur Facebook à travers plusieurs pages incitant le “peuple marocain” à faire sa “révolution”. Si la marche de protestation escomptée n’a pas eu lieu, sa seule possibilité, confusément annoncée sur Internet, a entraîné non seulement déploiement en masse des forces de l’ordre, mais aussi rumeurs et démentis officiels. Dont celui d’Al Adl Wal Ihsane, réfutant toute participation de sa jeunesse au dit mouvement. Même son de cloche chez les militants du 20 février, démentant tout lien entre le mouvement vieux de deux ans et l’appel à manifestation du 13 janvier. Plus que de prendre le pouls des tensions sociales, cette initiative, à l’image de celle d’Anfgou, met en évidence une réalité : Internet est désormais une force et une culture avec lesquelles il faut compter.

 

Le temps des réseaux sociaux

Les Marocains se connectent, selon différentes études, pour s’informer tout d’abord, puis pour communiquer, et enfin, se servent de l’outil Internet pour un usage professionnel. Un sondage de l’institut Averty réalisé en 2012 auprès de plus de 1000 utilisateurs (majoritairement urbains) le démontre clairement : 66% disaient utiliser Internet pour envoyer et recevoir des mails, 40% pour rester en contact avec des proches, 62% pour s’informer. Toutes les précisions supplémentaires corroborent ce propos : la première destination des internautes sont les réseaux sociaux, suivis par les moteurs de recherche, la presse électronique et les sites de partage de vidéos. Adeptes des réseaux sociaux, les sondés disaient utiliser Facebook, Google+ ou encore Twitter d’abord pour s’informer, ensuite pour chatter. Le site marocain le plus populaire chez les sondés reste Hespress.com, site d’infos et de vidéos arabophone, sacré 3ème plus gros portail d’informations du monde arabe dans un classement publié par le magazine Forbes Middle East. Un travail du blogueur marocain Sniper, Marouane Harmach dans le civil, permet de découvrir d’autres chiffres : au Maroc, on compte plus de 4,5 millions de comptes Facebook et 27 000 comptes Twitter. Les réseaux sociaux pros LinkedIn et Viadeo seraient quant à eux utilisés par 450 000 Marocains. Harmach précise aussi que certaines vidéos postées depuis le Maroc sur le site de partage YouTube sont vues plus d’un million de fois. Un rapport de l’Open Society Foundation assure, lui aussi, que les Marocains sont friands de sites proposant de l’actualité, à l’instar de Yahoo.com, Yahoo.fr ou encore MSN. Alexa.com, compagnie d’informations relatives au Web, ajoute à cette liste des sites offrant de l’information en ligne telle que l’encyclopédie participative et multilingue Wikipédia, classée en 2010 parmi les dix sites les plus visités par les internautes marocains. A une question posée par le Haut commissariat au plan en 2011 à quelque 2000 jeunes, 70% d’entre eux  se disent convaincus qu’Internet serait, en 2030, la principale source d’information. 

 

Portrait-robot d’internaute

Le Centre d’Etudes Sociales, Economiques et Managériales (CESEM) a piloté entre 2011 et 2012 une étude visant à dresser un portrait des utilisateurs de réseaux. Parmi les quatre profils identifiés par le CESEM, “les mobilisateurs”, soit environ 22% des usagers. Un groupe constitué notamment de cadres ou de personnes exerçant des professions dites “intellectuelles”, mais qui compte aussi dans ses rangs de nombreux étudiants et employés. Ils sont ceux qui se connectent le plus à leurs comptes Twitter et se débrouillent pour s’assurer un écho sur la Toile, qui ont le plus de “followers” sur Twitter et le plus d’“amis” sur Facebook. A leurs côtés, trois autres types d’usagers : les “observateurs”, plus passifs, les “affectifs”, en quête de lien social, et les “communicateurs”, fans de réseautage. Ces derniers sont certes moins engagés, mais il n’en reste pas moins que sur 31 “motivations”, la première, tous utilisateurs confondus, est de “lancer un débat”. “Commenter l’actualité” arrive devant la drague, la recherche d’emploi et la quête de popularité. De plus, 75% des sondés affirment déjà avoir utilisé les médias sociaux pour dénoncer un fait.

 

Lire l’info ou être l’info

Le Web offre la possibilité de soutenir une cause, en un clic. Il suffit de “liker”, “retweeter” ou “partager” pour abonder dans le sens de l’un ou de l’autre et afficher publiquement son opinion à une audience digitale. Ainsi s’efface la frontière entre la simple recherche d’informations et le besoin d’engagement. Au mois de janvier 2013, une jeune blogueuse, Marwa Belghazi, assiste à un procès opposant une fonctionnaire et un parlementaire, la première accusant le second de viol. Outrée par la relaxe obtenue par l’élu, elle fait part de son indignation, avec toute la subjectivité que permet le Web, dans un billet de blog. Quelques heures plus tard, un groupe Facebook et une pétition sur avaaz.org, site de “pétitions citoyennes”, appelant à la démission de l’élu fédèrent quelques centaines d’internautes du Maroc et d’ailleurs. La presse professionnelle et les partis sont contraints de choisir : couvrir, tenter d’expliquer l’affaire et prendre position ou jouer les autruches et risquer le ridicule.

Ce besoin de ré-information a donné naissance à des plateformes spécialement dédiées. Mamfakinch, nom désormais connu des internautes, est bien né avec le souci de lutter contre “le climat de désinformation”, comme l’explique Hicham Almiraat, l’un de ses cofondateurs, dans un entretien publié dans l’ouvrage de Mounir Bensalah, Réseaux sociaux et révolutions arabes. Avec succès ? Le blogueur Lbadikho, dans un texte publié sur Talkmorocco.net, rappelle qu’à la veille du 20 février 2011, 15 000 personnes lisaient sur Mamfakinch.com le texte démentant la dépêche de la MAP annonçant l’annulation des manifestations par les organisateurs. Almiraat, à propos de ces expériences, parle de “médias citoyens”, voire “d’agences de presse du peuple”.

 

Initiateurs de débats

Les internautes jouent là un nouveau rôle : jouissant d’un outil participatif sur lequel s’expriment des personnalités diverses, ils peuvent, sans plus d’efforts, imposer des débats, des questions de société, influencer ceux qu’on appelle les “leaders d’opinion” classiques. Les exemples abondent : en 2011, la blogoma (la blogosphère marocaine) se partage des documents concernant une supposée mauvaise gestion des deniers publics par le ministre de la Jeunesse et des Sports d’alors et exige que vérité soit faite à ce propos. Rebelote lorsque se clarifie le projet de ligne à grande vitesse, qui donne naissance au collectif Stop TGV. On assiste à une déferlante de graphes, ratios et comparatifs sur des blogs, des comptes Facebook et des sites. “L’affaire Amina Filali”, du nom de la jeune fille contrainte d’épouser son violeur et qui s’est donné la mort en mars 2012, ou encore les funérailles du leader islamiste Cheikh Yassine en décembre 2012 et leur traitement a minima par les médias, en particulier par la MAP et les chaînes de télévision, furent parmi les sujets les plus discutés sur les réseaux sociaux. Lorsque le débat ou la transparence font défaut, les internautes “mobilisateurs”, pour reprendre les termes chers aux chercheurs, en amont, et les simples utilisateurs, en aval, se chargent de rétablir la balance. C’est ainsi que le journaliste spécialisé ès multimédias Rachid Jankari parle de “cinquième pouvoir”. L’émergence de cet espace de liberté n’est pas du goût de tous. En 2010, le ministre de la Communication d’antan, Khalid Naciri, qualifiait l’espace virtuel de débat de “zone de non-droit”, rappelle le blogeur Mounir Bensalah dans son ouvrage Réseaux sociaux et révolutions arabes, tandis que le secrétaire général du Syndicat national de la presse marocaine (SNPM) qualifiait les blogs de “poubelles de la presse”.

 

Cyberactivisme

Dans le livre Le cyberactivisme dans le Maghreb et le monde arabe, ouvrage collectif dirigé par la chercheuse Sihem Najar, édité par l’Institut de Recherche sur le Maghreb Contemporain, sis à Tunis, et publié par les éditions Karthala, le chercheur et journaliste Driss Ksikes s’intéresse au cas du Maroc, en traitant “l’irruption du cyberactivisme dans l’espace public”. Pour lui, les médias dits “sociaux” le sont grâce au capital citoyen qui s’y déverse, l’information n’étant plus uniquement confinée à être produite par des professionnels. Par média social, nous devrions comprendre “logique horizontale, de conversation, de partage, de désir et de contagion”. Un “positionnement inédit entre l’individuel/personnel et le collectif/public”, pour reprendre les termes de l’auteur. Cette notion est aussi évoquée par Yves Gonzalez-Quijano, chercheur et maître de conférences en littérature arabe. Dans un entretien à propos de son livre Arabités numériques. Le printemps du Web arabe, publié aux éditions Actes Sud/Sindbad, il parle de “diffusion horizontale, en réseau, par capillarité”. En résulte, pour Ksikes, “une tension permanente, nouvelle, productrice de crises, d’innovations et d’angoisses, entre l’élite qui maîtrisait jusque-là les règles du jeu en commun et le peuple reconnecté en ligne qui fait irruption et s’invite à la table des ‘faiseurs d’opinion’”. En somme, un frottement entre le “leader d’opinion, détenteur de vérités immuables”, et un réseau “profane” qui “accorde à chacun l’aptitude de détenir un bout de vérité”.

Cette force du virtuel, qui permet à tout un chacun d’exprimer son opinion et de la faire valoir publiquement, serait aussi l’une de ses principales faiblesses en termes d’impact politique. Mounir Bensalah, fustige les militants du clic. Dans un paragraphe intitulé “Militantisme en pyjama ?”, le blogueur se désole qu’“outre de rares exceptions, l’action contestataire sur Internet ne dépasse jamais le stade des mots” : à son sens, signer des pétitions ou des “critiques incisives sur des sujets sensibles”, écrire “un texte de contestation dans sa chambre, en pantoufles et en pyjama”, ne représente pas une action, du moins, une action efficace. L’analyse est assez radicale, mettant l’opinion digitale qui ne serait pas suivie d’un engagement concret, sur le terrain, un cran en dessous du cyberactivisme politique. De quoi nuancer l’horizontalité prônée par les chercheurs, la hiérarchisation des causes, de leur traitement et de leurs meneurs, faisant clairement office de nouveau système virtuel de subordination.

 

Les limites du virtuel

Si l’évaluation et l’évolution de la puissance de la cyberculture sont interrogées, questionner leurs limites peut paraître tout aussi pertinent : parler de “révolutions Facebook” rend-il justice aux mouvements de contestation déclenchés dans le monde arabe ? Mounir Bensalah a posé la question à plusieurs blogueurs et penseurs, parmi lesquels le chercheur Youssef Belal, pour qui, “sans ces nouveaux outils, les contestataires auraient eu plus de difficultés à organiser la coordination de leurs actions”. Sur son blog, Yves Gonzalez précise : “Ni les réseaux sociaux, ni les blogs, ni les sites d’information en ligne n’ont fait tomber les dictatures. Il a fallu pour cela l’engagement, y compris au sens physique du terme”. Et de soulever un paradoxe appliqué au monde arabe et emprunté au docteur en sciences politiques François-Bernard Huygue : “Ce qu’Internet confère aux simples citoyens d’un côté (possibilité d’expression ou d’organisation sans chefs, sans partis et presque sans idéologie, sinon très vague), ils doivent le payer en termes d’expertise et de stratégie de lutte : la protestation comme la répression se professionnalise”. Le militantisme en ligne souffrirait donc quelques paresses et désorganisations qui, noyées dans les expressions les plus diverses et divergentes de points de vue, ne pardonnent pas. Publiée en 2012, une étude en ligne d’Essachess révèle, à contre-courant, que les canaux de diffusion traditionnels de l’information (télévision, presse écrite, radio) ont constitué, à l’aune du 20 février, un relais plus important de mobilisation que les réseaux sociaux. Parmi les sondés, 41%, interrogés sur le 20 février, auraient consulté l’appel à manifester du mouvement, 76% n’auraient pas pris part aux manifestations et 60% auraient déclaré ne jamais participer à des événements annoncés sur Facebook. A propos de l’opposition entre médias traditionnels et réseaux sociaux, le jeune blogueur Lbadikho parle, en 2011, de “guerre d’influence”, analysant que “lors des semaines qui ont suivi le 20 février, le régime a compris que les principaux médias publics se devaient de couvrir les manifestations, afin d’éviter un mouvement massif d’audience vers des médias sociaux non contrôlés”.

 

Causes mal servies

Largement relayée sur les réseaux sociaux, l’affaire Amina Filali a souffert des à-peu-près de l’indignation : afin d’alerter l’opinion publique sur le cas de la jeune fille violée qui a fini par se donner la mort, les internautes, repris par la presse, n’ont pas hésité à affirmer que l’article 475 du Code pénal permettait légalement au violeur d’épouser sa victime. En plus d’être erronée, cette allégation a relégué au second plan les interrogations liées à l’impunité des juges, peut-être plus complexes à formuler et à “vendre” en un clic. Hicham Almiraat se désole des nouvelles hiérarchies naissantes sur le Web, avouant que certains internautes se limitent à “suivre les influenceurs, sans plus de regard critique”. Selon lui, “sur les réseaux sociaux, certains internautes partagent ou rééditent des textes de personnes à qui ils donnent du crédit, avant même de les lire ! Une forme de paresse intellectuelle qui crée une fracture entre ce que l’on pense vraiment et ce qu’on perpétue comme information…” Et de conclure : “Les blogueurs ne remplaceront pas les journalistes. Ils restent des personnes avançant des opinions. Mais il faut comprendre qu’une partie de ce qu’il se passe sur Internet devrait simplement exister dans les médias. C’est aussi parce que ces derniers offrent des contenus restreints qu’Internet est devenu une alternative si forte au Maroc”.

 

Humour. Génération LOL

Si les sites et forums marocains des années 2000 contenaient souvent une rubrique dédiée aux blagues et autres histoires drôles traditionnelles, un humour propre au Web, sans frontières et sans limites, fondé sur l’instantanéité, la viralité et la popularité du contenu, fait aujourd’hui partie intégrante de la culture du clic. Détournements d’images, memes, rage comics, trolls, vidéos parodiques ou encore webséries, sont intégrés, au même titre qu’aux Etats-Unis, en France ou en Inde, dans le paysage virtuel marocain. Produite par les internautes à l’attention de leurs semblables, fréquemment partagée sur les réseaux sociaux, la culture LOL transposée au Maroc n’hésite pas à s’emparer, avec finesse ou avec de gros sabots, de l’actualité politique et sociale du royaume. Créée en octobre 2012 sur Facebook, la page “Humour Politique”, un brin populiste et franchement islamiste, est suivie par près de 174 000 Marocains. Prônant la prise de conscience politique par la satire, publiant des images flanquées de commentaires en arabe, elle n’épargne rien ni (presque) personne : de Taoussi à Mohammed VI en passant par Benkirane ou Moulay Rachid, les moindres déclarations sont raillées avec une liberté de ton inconcevable hors de la sphère Internet. Seuls Abdeslam Yassine et sa Jamaâ échappent à la dérision au vitriol de la page… Toujours sur Facebook, la page “Moroccan Meme Base”, créée en décembre 2011 et comptant plus de 28 000 fans, se veut être la plateforme des détournements d’images les plus originaux et créatifs, qu’ils soient fondés sur des jeux de mots jugés drôles par les modérateurs ou sur une actualité politique, footballistique ou sociale traitée avec humour. Bannie de cette même page, la profusion de vidéos ou d’images à la gloire de “Bouzebal”, personnage créé par Mohamed Nassib, décliné en dessins et animations, censé représenter le Marocain d’en bas et opposé au “kilimini”, maniéré censé représenter l’élite. Bourré de clichés sur la société, Bouzebal, ses acolytes et leurs gimmicks sont de véritables phénomènes, auxquels une large frange d’internautes s’identifie là où d’autres les rejettent, y voyant le symbole d’un humour gras et inintelligent.

 

 

Chiffres. Les Marocains, Internet addicts ?

Au Maroc, on se connecte toujours plus et plus longtemps. En 2011, le royaume recensait 16 millions d’internautes, contre 1 million seulement six ans plus tôt. Le pays compte quelque 10 000 cybercafés, tandis que 10 à 20% des Marocains se connectent depuis leur lieu de travail. Après l’ordinateur portable, le téléphone mobile (sans compter le succès des tablettes tactiles) arrive en deuxième place des supports de connexion les plus utilisés par les internautes du royaume. Selon une étude réalisée par l’institut de sondages Averty et publiée en décembre 2012, un Marocain sur deux passe quotidiennement plus de quatre heures à surfer sur le Web. Une autre étude, réalisée en 2012 en prenant un panel de 1500 personnes, donne ces chiffres : un Marocain sur deux passe entre une à trois heures par jour sur Internet, et un Marocain sur quatre se connecte quotidiennement de trois à huit heures.

 

 

Créativité. Le Net, zone d’avant-garde

Quelques activistes font entendre leur voix pour que le Web reste un espace de liberté et de création. Le mouvement est diffus, composite mais bien là : de nombreuses écoles et universités ont leur “club” de partisans du logiciel libre et d’utilisateurs de Linux, système d’exploitation libre. Depuis 2011 se rassemblent aussi une dizaine de personnes autour du projet d’un Parti Pirate, projet porteur d’espoir à l’heure où en Tunisie ou en Allemagne, les partis pirates formulent des alternatives sérieuses et pèsent dans le débat à propos des nouvelles technologies. Enfin, le mouvement Creative Commons, qui, à l’international œuvre à faciliter l’utilisation et la réutilisation d’œuvres en luttant contre les restrictions imposées par le “copyright”, dispose d’un groupe marocain devenu très actif, sous le sigle “OpenTaqafa” et organise régulièrement des salons et des workshops. 

La question de l’accessibilité et des licences libres fédère donc un grand nombre de militants qui déploient de solides argumentaires à l’adresse du gouvernement pour le pousser à adopter de telles licences, et se retrouvent ainsi en butte aux géants de l’informatique et du Web. Autre adresse faite au gouvernement, se lancer dans l’OpenData, comprenez le partage virtuel de données, permettant aux internautes de se renseigner à propos de l’action publique et aux autorités de faire preuve de transparence. 

Le libre accès à la Toile, sans restrictions posées par des entreprises ou des autorités, est un leitmotiv de ce milieu, qui insiste aussi sur le droit à l’anonymat. Les internautes veillent donc attentivement, épiant d’éventuels signes de durcissement dans la loi ou de limitations dans la possibilité de surfer. Ainsi ont-ils manifesté leur énervement lorsqu’ils ont découvert que Maroc Telecom bloquait l’accès aux services VoIP tels que Skype. De la même manière, ils ont fait circuler l’information révélée par un site spécialisé Reflets.info qui faisait part en 2011 du lancement au Maroc du programme “Popcorn”, consistant en l’achat, à l’entreprise française Amesys, d’un logiciel de traitement des données, capable de stocker et traiter les communications et les flux des internautes. Hégémonie des plus gros groupes de la place, privatisation constante, flicage, censure… nombreux sont les dangers qui se dressent sur la route vers un outil neutre, anonyme et libre.

 

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