2013. L’année de tous les dangers… et de tous les espoirs aussi

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C’est une année fastidieuse qui nous attend. 2013 sera l’année de tous les défis, de tous les challenges. La crise budgétaire risque d’atteindre son paroxysme, la contestation peut à tout moment tourner à l’embrasement, le champ politique peut connaître une nouvelle reconfiguration. Mais 2013 peut également être perçue comme l’année de tous les espoirs : l’espoir de voir la monarchie prendre de la hauteur en jouant un rôle d’arbitre suprême plutôt que d’empiéter sur les prérogatives de l’Exécutif ; l’espoir d’assister enfin au dénouement de dossiers compliqués qui nécessitent une réelle volonté politique ; l’espoir de retrouver le goût de la victoire avec inchallah un sacre africain. Pêle-mêle les grandes questions qui se poseront cette année.

 

Y aura-t-il de nouvelles hausses des prix ?

La décompensation. Voici un mot qui va rythmer les débats politiques en 2013… mais qui risque surtout de créer de nouvelles tensions sociales et d’envenimer, davantage, les rapports entre gouvernement, syndicats et patronat. Najib Boulif, ministre des Affaires générales et de la Gouvernance, a promis d’accoucher de sa réforme de la Caisse de compensation dès les premiers mois de l’année. Si rien n’est officiel pour l’instant, on sait d’ores et déjà à quoi va ressembler sa copie : une levée progressive des subventions et l’octroi d’aides directes aux populations pauvres. Les prix de la farine, du sucre, des hydrocarbures et du gaz sont en principe appelés à connaître des hausses significatives. Mais tout dépendra de la tendance des matières premières sur les marchés internationaux. Et c’est Najib Boulif qui le dit. “Le gaz est subventionné à raison de 100 DH la bouteille de 12 kg. C’est une charge pour l’Etat, mais on ne peut libéraliser d’un seul coup son prix. Maintenant, si dans un mois, les prix internationaux du gaz butane baissent, et que l’Etat ne donne plus que 50 DH en compensation, la libéralisation se fera autrement”, avait confié le ministre à nos confrères de La Vie Eco. Autre matière qui risque de connaître une hausse : l’électricité. Et ici, la hausse est quasi sûre, puisque la survie de l’ONEE en dépend. “Les prix de l’électricité vont augmenter dès les premières semaines de l’année, mais on tiendra à ce que cette hausse ne touche pas les classes pauvres et moyennes”, nous confie une source au ministère de l’Energie qui, lui aussi, espère que les prix du charbon (principal combustible servant à la production d’électricité au Maroc) reviennent à des niveaux normaux. Bref, le pouvoir d’achat en 2013 dépendra essentiellement des tendances mondiales sur les marchés des commodities.

Oui

Le gouvernement est décidé à diminuer ses dépenses de compensation, au risque d’augmenter le prix de certaines denrées, comme pour les hydrocarbures en 2012.

 

Non

Si les marchés des matières premières reviennent à la raison, il n’y aura plus aucune raison d’augmenter les prix.

 

 

Le roi va-t-il enfin parler à la presse marocaine ?

L’année 2012 a connu une petite révolution en matière de com’ royale. Mohammed VI s’est doté d’une cellule de communication au sein du Palais,  chargée de mieux vendre son image. Les premiers effets se sont fait sentir lors du voyage du monarque dans les pays du Golfe où on s’est essayé à le filmer autrement, en privilégiant le son d’ambiance en lieu et place de la voix laudatrice à laquelle on avait habitué le téléspectateur marocain. Ce dispositif, œuvrant en back-office, a été complété par un front-office concrétisé par la nomination d’un porte-parole du Palais, un poste laissé en jachère plus de 7 ans, depuis l’éviction de Hassan Aourid. Ces changements laissent espérer que Mohammed VI franchira enfin le Rubicon en accordant des interviews à la presse marocaine. C’est là que se situerait la vraie révolution, compte tenu du fait que jusque-là il n’a jamais parlé aux médias locaux, se contentant d’ouvrir un jour ses portes à deux magazines féminins de la place pour une simple séance photo avec instruction de ne rapporter aucun de ses propos. Pour résumer, les journalistes marocains sont avant tout considérés comme des sujets corsetés par leur devoir d’allégeance et non pas des professionnels ayant le droit de demander des explications au chef de l’Etat. On espère tous voir ce cadenas sauter et entendre enfin Mohammed VI justifier ses décisions, au lieu d’être abonné aux discours royaux univoques. L’espoir est cependant mince. Prendre la parole en public pour le monarque, c’est risquer le grain de sable dans une machine bien huilée qui privilégie, depuis son accession au trône, la com’ par l’image au détriment des mots.

Oui

Il y a une véritable volonté de révolutionner la com’ royale. Accorder une interview à la presse marocaine pourrait être une étape de ce processus.

 

Non

La monarchie a toujours privilégié la com’ par l’image plutôt que par les mots.

 

 

Le Mouvement du 20 février survivra t-il ?

“La lutte pour la démocratie n’est pas terminée mais le Mouvement du 20 février, lui, prend fin”. Ces mots, ce sont ceux d’un ex-membre de la coordination de Casablanca. Une autre militante donne à entendre un tout autre son de cloche : “Le mouvement ne s’arrête pas. Les luttes sont quotidiennes, les combats à mener sont encore nombreux”. Alors, qu’adviendra t-il du M20 en 2013 ? Des coordinations locales du mouvement existent toujours, des réunions se tiennent encore, mais le nombre, lui, n’y est plus. Et de nombreux militants ont dû quelque peu remiser leurs slogans habituels, le temps d’exiger la libération de leurs camarades incarcérés, qu’ils estiment au nombre de 70. 2013 commencera donc par la bataille pour la remise en liberté des “prisonniers du 20 février”. Dans les petites villes en revanche, le mouvement ne semble pas mort, loin s’en faut : à Figuig, Sidi Ifni, Al Hoceïma ou encore Tinghir, on peut voir des ouvriers agricoles, des mineurs, des pêcheurs ou des chômeurs, défiler derrière des banderoles aux couleurs du M20. Néanmoins, ces manifestations ressemblent à celles que l’on pouvait voir avant le 20 février 2011 : elles sont corporatistes, sectorielles, locales et détachées les unes des autres. Un militant d’Al Hoceïma nous confie : “C’est vrai que ce n’est plus comme en 2011 où on était plus en contact avec les autres villes. Mais pour beaucoup de jeunes comme moi, on reste des membres du 20 février, parce que c’est à cette date qu’on s’est découvert du courage et de l’intérêt pour le pays”. Le M20 serait-il devenu une marque, une appellation d’origine contrôlée dont s’empare qui veut, tant qu’il conteste ? Si oui, alors le M20 n’est pas mort et a encore de beaux jours devant lui.

Oui

Les déçus de la nouvelle Constitution et les habitants du Maroc oublié continueront à marcher et beaucoup d’entre eux s’identifient au 20 février, à la date comme au mouvement.

 

Non

La contestation a déjà repris son cours “normal”, divisée entre zones rurales et urbaines, entre syndicats, partis et société civile…

 

 

Les élections communales auront-elles lieu ?

Le suspense sur la date des élections communales, initialement prévues pour 2012, continue. À en croire le ministre de l’Intérieur, Mohand Laenser, cette année sera la bonne. “Le ministère planche sur les textes législatifs nécessaires, principalement la loi organique relative à la régionalisation et les autres collectivités territoriales, ce qui va permettre l’organisation des élections communales courant 2013”, a-t-il récemment déclaré. Mais lorsqu’on demande la date exacte de ce scrutin, Laenser répond que “c’est aux partis politiques de décider”. Cette phrase n’est pas à prendre à la légère car, mis à part le PJD, aucune autre formation politique n’a intérêt à ce que les communales se déroulent en 2013. Et pour cause, les partis ne veulent pas prendre le risque de permettre au PJD de contrôler une bonne partie des administrations locales. Pas plus tard qu’en décembre, le parti de la lampe a encore une fois démontré l’étendue de sa popularité lors des élections partielles qui ont eu lieu à Inezgane, où leur candidat a littéralement écrasé son concurrent de l’Istiqlal. Sans parler des partielles d’octobre, durant lesquelles le PJD a remporté 3 sièges sur 4 à Tanger et Marrakech. La formation de Abdelilah Benkirane jouit toujours d’une grande popularité qui lui permettrait de tout rafler si les communales se tenaient au courant de cette année. Autre question qui se pose : les élections communales seront-elles accompagnées d’élections régionales ? C’est ce que préconisent de nombreux acteurs politiques. “Mieux vaut organiser les communales et les régionales le même jour, en mettant deux listes en compétition”, avait suggéré Abderrahmane Benyahya, membre de l’USFP.

Oui

Car les textes de lois seront prêts et que le PJD pèsera de tout son poids pour arrêter un calendrier.

 

Non

Puisque les autres partis politiques ainsi que le Palais redoutent un raz-de-marée islamiste.

 

 

Le général partira-t-il enfin à la retraite ?

à l’approche de chaque fête du trône, on le dit partant à la retraite avec une belle décoration, une de plus. Mais Housni Benslimane, le plus puissant des généraux du royaume, résiste encore et toujours. D’une main de fer, le militaire le plus galonné du pays continue de diriger la Gendarmerie royale, l’armée à tout faire. Du haut de ses 77 ans, l’ancien gardien de but du club des FAR a même de quoi rendre jaloux des chefs d’Etat grâce à sa longévité à la tête de ce corps d’armée qu’il dirige depuis 1974. Plus muet que la grande muette dont il fait partie, il fait toujours figure d’“intouchable”. Les ONG nationales et internationales des droits de l’homme ont beau mettre son nom sur la liste des “tortionnaires” de l’ère Hassan II, il n’est jamais inquiété. Le juge français chargé de l’affaire Ben Barka n’arrive même pas à le “localiser” à Rabat pour l’entendre comme témoin ! Seule frayeur pour le général : pendant l’été 2012, il quitte précipitamment Londres en plein Jeux Olympiques quand il apprend qu’il pourrait y être inquiété à cause du mandat d’arrêt international lancé contre lui pour la même affaire. Toutefois, Hosni Benslimane n’est pas le seul haut gradé à continuer à servir alors qu’il a dépassé de loin l’âge de la retraite. Le général de corps d’armée, Abdelaziz Bennani, est toujours à son poste de patron de la zone Sud et d’inspecteur général des FAR, à l’âge de 77 ans. Presque du même âge, Bouchaïb Arroub, lui, veille au grain à la tête du 3ème bureau. Seul Hamidou Laânigri, 72 ans, qui dirigeait les Forces auxiliaires dans la zone Sud, a été récemment mis à la retraite. Dans les rangs de l’armée, l’impatience de plus jeunes gradés se fait sentir. Car depuis longtemps, Mohammed VI devait ouvrir la voie à des officiers qui ont fait leurs preuves et qui sont capables d’assurer la relève. Mais on dirait que le roi, chef de l’armée, a ses raisons que peut-être seuls ses fidèles généraux connaissent.

Oui

En principe, Housni Benslimane et les autres vieux généraux ne sont pas irremplaçables puisque la relève existe.

 

Non

Le roi aimerait prendre plus de temps pour bien réussir cette autre transition sans prendre le moindre risque.

 

 

Assistera-t-on à un retour en force des salafistes ?

En 2012, les salafistes ont réinvesti la rue. Au-delà des sit-in pour demander la libération de leurs “frères” emprisonnés pour terrorisme, certains ont poussé le bouchon plus loin. En mimant des groupuscules dans d’autres pays arabes, traversés par le Printemps arabe, ils ont crée un nouveau mouvement : Ansar Achariâ (Les défenseurs de la Charia) et ne se cachent plus pour fustiger les “ennemis de l’islam”. Comprenez, dans leur jargon, les laïcs ou toute personne qui défend les libertés individuelles. Mais l’image de ce mouvement a vite été ternie par une série d’arrestations pour terrorisme. Et surtout pour avoir participé à de présumés envois de jihadistes dans la région du Sahel, une région qui donne des insomnies à toutes les puissances mondiales et aux pays voisins. Aujourd’hui, les salafistes se retrouvent en rangs dispersés et ont multiplié les chapelles et les ONG. “En 2013 ou dans dix ans, nous serons toujours là pour défendre ceux de nos frères emprisonnés de manière injuste”, répond un membre de la coordination de défense des détenus islamistes. L’objectif de cette association, comme tant d’autres, est de maintenir la pression sur l’Etat pour rouvrir le dossier des personnes inculpées pour terrorisme. Mais l’Etat ne semble pas pressé de répondre à ces revendications. Ni de reprendre un processus de grâce qui a bénéficié à plusieurs centaines de prisonniers islamistes avant d’être suspendu en 2006. Quoi qu’il en soit, il faudra toujours compter avec les salafistes dans la rue. Surtout si des “têtes brûlées” s’avisent de publier une caricature du prophète ou produire un navet comme Innocence of muslims… 

Oui

Les raisons qui les poussent à manifester sont toujours là, le souffle de liberté aidant.

 

Non

L’Etat, qui les suit de près, peut décider d’un tour de vis sécuritaire “préventif”.

 

 

Le déballage des grimate va-t-il se poursuivre ?

C’était l’une des promesses de campagne du PJD : lutter contre l’économie de rente. Le parti de la lampe l’a tenue en partie en publiant la liste des bénéficiaires des agréments de transport routier de voyageurs et celle des bénéficiaires de carrières de sable. Mais le grand déballage ne doit pas s’arrêter en si bon chemin. Le processus que l’on espère irréversible doit concerner aussi les agréments de taxis et, surtout, ceux de la pêche hauturière. Mais dans ces deux cas, c’est une tout autre paire de manches. Le ministre de l’Intérieur, Mohand Laenser, qui gère les agréments de taxis, a déclaré au parlement qu’il ne dévoilerait pas, dans un avenir proche, les noms des bénéficiaires. Il a même osé une comparaison pour le moins audacieuse pour justifier son refus : “Est-ce qu’on peut demander à une banque de dévoiler les relevés de ses clients ?”. Le déballage des bénéficiaires des agréments de pêche hauturière ne semble pas être pour demain non plus puisqu’ils dépendent du ministère de l’Agriculture, un département qui échappe au PJD. “Combattre l’économie de rente est un axe important du programme gouvernemental. Nous nous inscrivons donc dans une approche globale et pas juste départementale”, s’est voulu rassurant Aziz Rabbah. Mohand Laenser et Aziz Akhannouch vont-ils suivre l’exemple du ministre du Transport pour prouver qu’il y a une cohésion gouvernementale contre l’économie de rente ? Tout dépendra du Chef de gouvernement et de sa capacité à les convaincre de ramer dans le même sens. Les couacs répétés entres membres du gouvernement, et notamment les critiques de ministres non islamistes, au moment de la publication de la liste des agréments de transport laissent au contraire présager des conflits en interne dans cette lutte déclarée par le PJD contre un système mis en place par Hassan II.

Oui

Le processus est irréversible et ce système de rente nécessite une réforme en profondeur.

 

Non

Le Chef du gouvernement ne semble pas avoir suffisamment de pouvoir pour contraindre ses ministres de jouer la transparence.

 

 

L’Etat régulera-t-il Internet ?

Quatre ans se sont écoulés entre l’arrestation de Fouad Mourtada, l’informaticien qui s’était fait passer pour le prince Moulay Rachid sur Facebook, et l’incarcération du rappeur Mouad Belghouat, accusé d’avoir manqué de respect à la police dans une vidéo postée sur YouTube. Si le Maroc a échappé à la fureur révolutionnaire du Printemps arabe, il n’a pas raté le coche du Web 2.0 : à l’affût de l’information sur les sites en ligne, blogs, plateformes de partage de vidéos et réseaux sociaux, l’internaute marocain a incontestablement su se saisir et faire usage des outils disponibles sur la Toile. Devenu le vecteur privilégié en termes de liberté d’expression, des questions se posent néanmoins sur la manière de réglementer Internet. Mustapha El Khalfi, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, a lui-même chapeauté, en mars 2012, une journée d’étude dédiée à la presse électronique du pays, en présence des détenteurs de 250 sites Web. L’idée est de mettre en place un cadre juridique, garantissant la liberté de cette presse et clarifiant les notions de responsabilité, de déontologie, ou encore de propriété intellectuelle. Ce projet serait en passe d’être intégré au plan Maroc Numeric 2013 et permettrait de développer des modèles économiques viables et d’attirer, de ce fait, des financements. Des mesures bien intentionnées en théorie, mais ardues à mettre en pratique. Surtout lorsque le Code de la presse peine à être réformé… L’équilibre entre la liberté acquise sur Internet et le contrôle voulu par l’Etat risque d’être difficile à trouver et à établir.

Oui

Une réforme en profondeur du Code de la presse est entamée, le Web suivra.

 

Non

Le projet de réglementation du Web risque de dégénère en privations des libertés.

 

 

Le roi se retirera-t-il complètement du business ?

Début 2010, les managers du business royal créent la surprise : les deux holdings royaux ONA et SNI fusionnent et une série de cessions est annoncée. Deux ans après l’annonce de cette nouvelle stratégie dans la conduite des affaires du roi, rien n’a changé ou presque, malgré le passage de l’ouragan Printemps arabe. Le roi reste toujours le premier businessman du pays, malgré son désengagement de Lesieur Cristal, Centrale Laitière et Bimo, trois filiales agroalimentaires en perte de vitesse depuis quelques années. “Il ne faut pas se tromper d’analyse. Les cessions opérées jusque-là ont été motivées par des raisons purement financières, contrairement à ce qu’avancement certaines parties qui veulent nous faire croire que le roi sort du business pour des raisons d’éthique et de transparence…”, signale cet homme d’affaires casablancais. La preuve : si le roi a lâché l’agroalimentaire, il n’est pas près de faire de même dans des secteurs à fort potentiel comme les télécoms, la grande distribution, l’énergie ou encore l’immobilier. Des secteurs où le holding royal SNI investi massivement, en attendant de les rentabiliser avant de les céder au marché… Les gestionnaires du business royal ne disent pas autre chose, et parlent d’une nouvelle vocation, celle “d’un actionnaire professionnel qui accompagne les secteurs clés de l’économie marocaine vers la maturité”. Comprenez donc, la revendication du Mouvement du 20 février et de quelques hommes d’affaires de voir le roi se retirer complètement des affaires, histoire de séparer le pouvoir politique du business, ne se réalisera guère. Mais les cessions continueront. En 2013, une grosse cession est envisagée : Cosumar, qui est sur la liste depuis 2010 déjà. Pour le reste, il faudra attendre que ça “mature” !

Oui

Il gagnerait à le faire pour plus de séparation entre le pouvoir politique et le pouvoir économique.

 

Non

Les managers du business royal se voient investis d’une mission. Celle de développer les secteurs à fort potentiel de croissance.

 

 

Les frontières avec l’Algérie rouvriront-elles ?

Tout avait bien commencé en 2012. à peine investi, le nouvel Exécutif avait dépêché le nouveau ministre des Affaires étrangères, Saâd-Eddine El Othmani, pour une visite de travail à Alger, en janvier 2012. Reçu en grande pompe par son homologue Mourad Medelci, et accueilli en audience par le président Bouteflika, El Othmani ne cachait pas son optimisme dès son retour d’Alger. Les deux parties se sont mises d’accord sur l’accélération des visites de haut niveau, mais rien n’a été dit concernant la sensible question des frontières. La courte idylle n’a malheureusement pas duré. Le discours de Mohammed VI à l’occasion de l’anniversaire de la Marche verte a été tièdement reçu du côté de nos voisins, et la question de la réouverture des frontières a manifestement été remise aux calendes grecques. L’année 2013 réservera-t-elle des surprises aux deux peuples, qui semblent ardemment souhaiter l’ouverture des frontières ? Rien n’est moins sûr. Néanmoins, une réunion de haut niveau entre les dirigeants des cinq pays de l’UMA, l’Union du Maghreb arabe, est prévue courant 2013. Si le sommet est maintenu, ce sera l’occasion pour Mohammed VI et Bouteflika de reprendre contact. Les deux chefs d’État ne se sont plus revus depuis la dernière visite royale à Alger, en 2005. Alors que l’Afrique du Nord est en pleine remodélisation post-Printemps arabe, et que la région du Sahel est plus que jamais en voie de “talibanisation”, l’heure est certainement arrivée pour les deux pays de donner un nouveau souffle à leur rapprochement. A noter que les frontières entre les deux “frères ennemis” sont closes depuis bientôt deux décennies, ce qui en fait l’une des plus vieilles frontières terrestres fermées au monde.

Oui

Car les deux pays y ont intérêt aussi bien sur le plan économique que sécuritaire.

 

Non

L’Algérie n’ouvrira pas sa frontière tant que le problème du Sahara ne sera pas résolu.

 

 

Al Adl se transformera-t-il en parti politique ?

En 2012, Al Adl Wal Ihsane a tourné une page : celle de son fondateur et guide suprême, Abdeslam Yassine, décédé le 13 décembre à l’âge de 84 ans. Aujourd’hui, l’association se trouve, du coup, confrontée à plusieurs défis. Le premier est d’ordre organisationnel. Les disciples de Yassine ont, pour la première fois de leur histoire, élu un nouveau guide suprême, Mohamed Abbadi, dont la tâche est loin d’être facile. Le successeur de Yassine est en effet censé sauvegarder l’unité de la Jamaâ, la guider sur un plan spirituel et lui permettre d’être encore plus influente dans la société. Il devra surtout statuer sur les ambitions politiques de certains de ses leaders les plus en vue. “Aujourd’hui, Al Adl Wal Ihsane est un acteur incontournable du champ politique national. La Jamaâ entretient des relations plus ou moins sereines avec plusieurs forces politiques, dont certaines sont représentées au gouvernement”, explique le politologue Mohamed Darif. Et d’ajouter : “La transformation du cercle politique de l’association en parti ne dépend pas que du bon vouloir des dirigeants d’Al Adl. L’Etat, à travers le Palais ou le ministère de l’Intérieur, a son mot à dire. Une telle démarche, si elle est entamée, nécessitera plusieurs mois, voire plusieurs années de négociations avant d’aboutir vers quelque chose de concret”. Autre élément à prendre en considération : les positions de base de la Jamaâ, qui ne cache pas ses réserves quant à l’institution de la Commanderie des croyants ou à la transparence du processus électoral. Les militants continuent, quant à eux, de rêver de Qawma ou de Khilafa. Les cadres du cercle politique sont-ils prêts à faire des concessions sur ce registre ? Une dissociation du politique et du spirituel est-elle possible au sein de la confrérie ? A voir ! Une chose reste sûre en tout cas, le décès de Abdeslam Yassine permet à la Jamaâ de se prendre en main, de faire le bilan de plus de 30 ans d’activisme et de dessiner les contours de la prochaine étape.

Oui

Le cercle politique de la Jamaâ agit déjà comme un parti politique normal.

 

Non

Pas de participation à la vie publique sans un débat ouvert sur la Commanderie des croyants.

 

 

Annoncera-t-on la découverte du pétrole ?

2013 sera-t-elle l’année du premier coup de pioche déclenchant, comme dans Lucky Luke, un geyser de liquide noir et faisant s’afficher des dollars dans les yeux des heureux chanceux ? Une trentaine de compagnies internationales explorent le sous-sol marocain et, en deux ans, plus de vingt forages ont été réalisés. Si l’on venait à trouver du pétrole, que se passerait-il ? Déjà, il est fort possible, selon des spécialistes nationaux, qu’il n’y en est pas autant que se plaisent à l’annoncer certaines compagnies, à l’instar de l’Australienne Pura Vida Energy, qui elle-même semble hésiter, parlant tantôt de 7 milliards de barils et, un mois plus tard, de 3,2 milliards seulement… Ensuite, les contrats signés ne seront pas forcément à l’avantage du Maroc. Certaines des sociétés ayant signé pour de la recherche au royaume empocheraient jusqu’à 75% des bénéfices en cas de découverte puis d’exploitation… Enfin, le pétrole amènerait aussi son lot de questions et de problèmes. On connaîtrait, par exemple, un regain de militantisme de la part des organisations proches des indépendantistes (il y a de grandes chances que de nombreux puits se trouvent au sud). Total, le pétrolier français en simple mission de reconnaissance, et non pas d’exploration dans le sud, a récemment eu droit à un tollé de la part d’un groupe de lobbying indépendantiste et s’est vu forcé de répondre dans les plus brefs délais. On imagine mal les cadres de la RASD laisser échapper du pétrole qu’ils considèrent comme le leur. La géopolitique du pétrole est une matière en soi, et ses manuels n’ont rien de guilleret : on y parle de conflits, de rentes, de lobbys et de tutelle… En un mot comme en cent, il est impossible de dire – même d’éminents spécialistes le concèdent – quelles ressources recèle précisément le sous-sol marocain, ni à quoi ressemblerait un “Maroc du pétrole”.

Oui

Il n’y a pas de fumée sans feu. Après tant d’annonces publiques, on peut s’attendre à des découvertes de gisements conséquents.

 

Non

Après des années d’exploration, toujours walou. Et le traumatisme de la fausse annonce Talsint est toujours dans les mémoires.

 

 

Y aura-t-il un remaniement ministériel ?

C’est la grande question de ce début d’année 2013. Au lendemain de son élection à la tête du Parti de l’Istiqlal, Hamid Chabat a fait du remaniement ministériel un véritable cheval de bataille dans sa croisade contre le clan El Fassi. Objectif avoué : redynamiser l’action gouvernementale que le nouveau SG istiqlalien trouve “trop lente, vu les attentes de la population”. Mais en réalité, Chabat souhaite surtout écarter certains ministres qui ont ouvertement soutenu son rival et renforcer ainsi sa mainmise sur l’équipe istiqlalienne du gouvernement. “Nos ministres ne sont pas des électrons libres. Ils doivent exprimer et défendre les positions du parti au sein de l’Exécutif”, avait notamment martelé le maire de Fès. Un discours qui ne plaît forcément pas à Abdelilah Benkirane, qui n’apprécie pas le double jeu de son allié supposé. Les deux hommes en sont même arrivés à des mots assez durs lors d’une rencontre entre les différentes composantes de la majorité gouvernementale. Pour le Chef du gouvernement, “aucun remaniement n’est envisagé à court ou à moyen terme”. Comment fera-t-il si Chabat insiste pour changer certains des ministres appartenant à son parti ? L’autre grande inconnue concerne les acteurs de ce remaniement hypothétique. Chabat souhaiterait en effet un retour de l’USFP au sein de l’équipe gouvernementale. Il a même eu des entretiens avec les dirigeants du RNI. Pour l’instant, seule la formation socialiste a répondu à ses avances. “Nous ne nous sentons pas concernés par un éventuel remaniement ministériel vu que nous comptons rester dans l’opposition”, a notamment affirmé Driss Lachgar, fraîchement élu premier secrétaire de l’USFP. En tout cas, l’ultimatum lancé par Chabat à Benkirane est bel et bien arrivé à échéance. Après l’adoption de la Loi de Finances, les deux hommes doivent maintenant jouer cartes sur table.

Oui

Hamid Chabat, dirigeant de la deuxième force politique du pays, le revendique officiellement.

 

Non

Abdelilah Benkirane s’y oppose fermement, et le Palais adopte une position de neutralité.

 

 

Autorisera-t-on des chaînes télé privées ?

Plus de six ans après la première vague de nouvelles licences audiovisuelles, le royaume ne possède aucune télévision privée. À l’époque, la chaîne Medi 1 avait elle seule obtenu les grâces de la Haute autorité de la communication audiovisuelle (HACA), décrochant une autorisation d’émission, tandis que neuf projets de création de chaînes télévisées étaient rejetés. Si la télé basée à Tanger était, lors de son avènement par la HACA, estampillée chaîne satellitaire franco-marocaine, elle devient, en 2009, partie intégrante de l’audiovisuel public, le groupe CDG ayant racheté 51% de son capital. La même année, les porteurs de demandes de création de chaînes de télévision font chou blanc lors de la deuxième vague de licences. L’ère est à la radio, tandis que, “dans l’attente d’une meilleure visibilité sur les équilibres du secteur”, le Conseil supérieur de la communication audiovisuelle a renvoyé, sine die, tout espoir de chaînes privées. La faute au marché de la publicité et de la crise qu’a traversée Medi 1, érigée en exemple, avait affirmé au moment des faits le CSCA. “Le risque important de déséquilibre pour le secteur, pouvant manifestement compromettre l’équilibre des opérateurs audiovisuels publics et privés existants à court terme, et leur viabilité, à moyen terme”, est-il encore à l’ordre du jour ? Des rumeurs à propos d’une nouvelle consultation pour l’obtention de nouvelles licences audiovisuelles privées avaient pourtant filtré, peu après l’arrivée du PJD au pouvoir. On chuchotait même que la HACA serait encline à la création d’une chaîne de télévision privée, en 2012. On attend encore…

Oui

Lors de la prochaine vague, les porteurs de projets de chaînes privées auront des investisseurs assez solides pour convaincre la HACA de leur capacité à faire bon usage des licences.

 

Non

C’est une volonté politique dissimulée que de ne pas vouloir développer le secteur audiovisuel privé.

 

 

Gagnera-t-on une nouvelle CAN ?

La CAN 2013, qui va se dérouler du 19 janvier au 10 février en Afrique du Sud, est incontestablement l’événement de la rentrée 2013. Inutile de rappeler que le Maroc, après une place de dauphin en 2004, n’a pas réussi à briller depuis. Rachid Taoussi, qui a repris les rênes des Lions, a réussi la qualification, mais sa mission en terre des Bafana Bafana ne sera pas facile. Le Maroc (classé 17ème en Afrique et 74ème mondial) devra affronter le pays organisateur, ainsi que l’Angola et le Cap vert dans la première phase de la compétition. Les Lions partiront en préparation le 5 janvier en Afrique du Sud et joueront deux matchs amicaux contre la Zambie (8 janvier) et l’Ethiopie (12 janvier). “Si on compte l’entraînement dans l’un des meilleurs centres sportifs d’Afrique du Sud, les deux matchs de préparation ainsi que la qualité des stades, les joueurs marocains devraient sortir leur meilleure prestation technique et aller loin dans la compétition”, nous confie l’analyste sportif Badreddine El Idrissi. Mais qu’en est-il de l’équipe-type qui sera alignée pour cette CAN ? Si Taoussi doit déposer sa liste définitive des 23 joueurs le 9 janvier, on sait déjà que l’équipe est composée d’un mélange entre les joueurs locaux et les professionnels des championnats européens. Et surtout que des anciens cadres comme Kharja ou Chamakh ne seront pas de la partie, et que c’est Mehdi Benatia qui devra endosser le brassard de capitaine. Pour écarter la pression qui monte crescendo, Taoussi a multiplié les déclarations où il explique qu’il faut préparer chaque match séparément pour garantir au moins une qualification en quart de finale. Pas suffisant pour satisfaire des supporters qui rêvent du sacre africain…

Oui

Le Maroc dispose de très bons joueurs pour gagner cette Coupe d’Afrique.

 

Non

Les Lions rentreront bredouilles si l’effectif ne trouve pas sa cohésion.

 

 

Règlera-t-on la question des droits d’auteur ?

L’année dernière, militants culturels et artistes sont montés au créneau pour dénoncer l’opacité du système de droits d’auteur. Oum, Don Bigg ou encore Barry ont affirmé haut et fort qu’ils n’en pouvaient plus de voir leurs droits bafoués et de ne recevoir aucune rémunération pour la diffusion de leur musique. De son côté, dès janvier 2012, l’Association Racines, présidée par le militant Aadel Essaadani, lance une pétition sur Internet où elle demande un audit du Bureau marocain des droits d’auteur (BMDA). Quelques semaines plus tard, et pour la première fois, Abdellah Oudghiri, le directeur de l’organisme, daigne rencontrer des artistes pour discuter de leurs revendications. Son discours se veut optimiste et rassurant, affirmant que 2012 sera l’année du changement. Sauf que rien de concret n’a été réalisé. Le mode de fonctionnement de cet organisme relève encore du mystère et les artistes ne savent toujours pas où va l’argent reversé par les stations radio et chaînes télé, ni sur quels critères est censée être basée leur rémunération. Ils décident alors de s’adresser à la Société des auteurs compositeurs et éditeurs de musique (SACEM), partenaire du BMDA depuis les années 1970, qui gère toute une partie du travail du BMDA. Mi-novembre, une rencontre est donc organisée entre les artistes marocains et les deux organismes. Mais au dernier moment, elle est annulée à cause de différends entre les deux partenaires. Résultat ? C’est le statu quo et, en plus, le torchon brûle entre les deux institutions, au détriment des artistes marocains.

Oui

Grâce aux artistes qui ne baissent pas les bras et continuent

à maintenir la pression.

 

Non

La situation ne risque pas de changer tant que la direction du BMDA reste la même.

 

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