Logements pour la classe moyenne: les promoteurs suivront-ils Benabdellah?

Nabil Benabdallah veut lancer des produits immobiliers dédiés à la classe moyenne. Mais, il faudra d'abord trouver le moyen de faire adhérer les opérateurs. Explications

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Les jeunes couples marocains fraîchement mariés, et les jeunes célibataires qui intègrent le monde du travail sont des cibles pour lesquelles le département de Nabil Benabdallah entend proposer des produits immobiliers dédiés. Comment seront conçus ces produits et quelles en seront les conditions d’éligibilité ? Répondre à ces questions serait prématuré, affirme le ministre de l’Habitat dans une déclaration à nos confrères du 360.

Nabil Benabdallah explique que ce projet s’inscrit dans le cadre d’une série d’initiatives. « Ce sont des idées qui n’ont pas encore atteint un niveau de maturité suffisant pour que l’on puisse détailler les conditions », ajoute-t-il. Le ministre, qui rempile pour un deuxième mandat au sein du même département, détaille sa pensée. « Nous savons qu’il y a plusieurs familles nouvellement constituées qui n’arrivent pas à se payer les logements à 250.000 dirhams ou au contraire cherchent des produits mieux que le logement économique sans devoir payer des sommes élevées (…) Nous étudions donc une nouvelle formule qui permettrait à ces catégories de familles d’accéder au logement plus facilement ».

Qu’en pensent les professionnels?

La réflexion menée par le ministère de l’Habitat vise la classe moyenne qui souffre depuis toujours de l’inadéquation de l’offre par rapport à sa demande. Le chantier est vraiment urgent, mais compliqué à entamer. « Si le ministère réfléchit à de nouveaux produits, nous n’avons pas été associés à la réflexion », lâche Youssef Iben Mansour, président de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI).

Pour ce dernier, les catégories dont parle le ministre « font déjà partie de la demande. Il se posera le problème sur le moyen de les identifier, mais surtout sur la nature du cahier de charges pour les professionnels », note-t-il. Surtout que tous les produits dédiés à la classe moyenne par le passé n’ont pas connu le succès escompté. « Nous avons raté le coche ensemble, opérateurs et ministère, tout en sachant qu’il existe bel et bien un marché », avoue Iben Mansour.

La raison de ce ratage est, selon notre interlocuteur, la divergence de visions, mais surtout de définition de la classe moyenne. Pour les professionnels, une famille de classe moyenne est celle capable d’assumer une échéance mensuelle entre 3.000 et 4.000 dirhams pour rembourser son prêt immobilier. « Cela suppose que le ménage a un revenu de 10.000 dirhams au moins », explique le patron de la FNPI. De son côté, le Haut-commissariat au plan (HCP), qui est la référence pour l’État, range dans la classe moyenne, tout ménage ayant un revenu de 5.000 dirhams. « Là, on est au niveau de la classe intermédiaire qui vise un logement économique amélioré », tonne Iben Mansour.

Les professionnels vont jusqu’à remettre en cause le produit de logement conventionné de 6.000 dirhams/m² (HT) dédié à la classe moyenne et mis en place en 2014. « Quand les opérateurs ont établi leur business plan, il s’est avéré qu’il était impossible à tenir un tel produit d’autant plus qu’il n’y a aucun avantage en contrepartie. Le même produit peut être vendu librement entre 800.000 et un million de dirhams », confie le président de la FNPI qui ne nie pas que les intérêts de l’État et des opérateurs ne convergent pas. Autrement, après le logement social et économique, l’État doit encore mettre la main à la poche pour pousser les promoteurs immobiliers à produire des logements dédiés à la classe moyenne.

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