Les 7 recommandations du CESE pour la protection de nos seniors

En février 2014, le CESE s’est autosaisi pour préparer un rapport afin d’analyser la situation actuelle des personnes âgées et d’émettre des recommandations pour la mise en place de politiques publiques pour les protéger. Synthèse des 7 principaux axes.

Par

Crédit : Yassine Toumi.

Une espérance de vie qui atteint 74,8 ans, un taux de fécondité qui chute à 2,19 enfants par femme, voilà les causes de l’augmentation de la part de personnes âgées dans la population. Entre 1960 et 2015, la proportion des personnes âgées est passée de 7,4 % à 10 %, soit un effectif actuel d’un peu plus de 3 millions de personnes. Selon les projections du HCP, les personnes de plus de 60 ans représenteront 14,1 % de la population en 2025, 15 % en 2030 et près de 25 % en 2050. Il y a urgence à assurer la protection de cette population vulnérable qui augmente de 3,3 % par an, contre 0,3 % pour la population globale.

Alerté par ce constat, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) s’est autosaisi en février 2014 afin de préparer un rapport analysant la situation actuelle des personnes âgées et émettre des recommandations pour la mise en place de politiques publiques pour les protéger. Le projet de rapport, que Telquel.ma s’est procuré, sera adopté le mois prochain. Le premier panorama de la population de personnes âgées depuis une enquête du HCP en 2006. En voici les principaux axes.

 1— Améliorer la protection sociale des personnes âgées en situation de vulnérabilité

Il y a fort à faire d’après le CESE. En 2010, 80 % des personnes âgées n’avaient pas de couverture médicale. En 2006, 30,7 % d’entre elles étaient en situation d’incapacité physique à effectuer des tâches de la vie quotidienne, dont 12,7 % en incapacité sévère et 87,3 % en une situation modérée. Le CESE suggère d’« assurer l’extension de la sécurité sociale et de la couverture médicale aux personnes âgées, notamment au profit de celles ne disposant pas de revenus, ou percevant de maigres pensions de retraite »

 2— Améliorer le cadre juridique et institutionnel

Les droits des personnes âgées ne sont pas consacrés par un instrument international. Les personnes âgées ont implicitement tous les droits consacrés par la Déclaration universelle des droits de l’homme. Il n’existe cependant pas de convention internationale des droits des personnes âgées, et par rapport à cela, deux tendances stratégiques se dégagent à l’international : la première va dans le sens de l’élaboration d’une convention internationale des droits des personnes âgées, la seconde est plutôt favorable à améliorer l’effectivité du droit positif. Il n’y a pas encore au Maroc une loi spécifique aux personnes âgées, mais une législation éparse. Le Code de la famille oblige les enfants à accorder une pension alimentaire à leurs parents, le Code pénal sanctionne « l’abandon pécuniaire familial », et inflige de lourdes peines dans les cas de violences perpétrées à l’encontre des parents et de parricide. Ainsi le CESE recommande de « définir un cadre juridique et institutionnel qui protège les personnes âgées ».

3 – Améliorer l’accessibilité physique

Le CESE constate que « de nombreuses personnes âgées vivent dans des logements inadaptés à leurs spécificités. Elles y sont fondamentalement confrontées à des problèmes d’exiguïté, d’accessibilité, d’éloignement des services publics et à des risques d’accidents domestiques. » Le même constat se décline à l’espace public et notamment aux transports. Une des pistes de travail pour améliorer la condition des personnes âgées pourrait être d’« inscrire de manière explicite, dans les lois relatives aux constructions (publiques ou privées) et à l’aménagement de l’espace public, toutes les dispositions à même de garantir l’accès, la circulation et la sécurité des  personnes âgées ».

4— Améliorer la prise en charge des personnes âgées

Selon le ministère de l’Intérieur, il y aurait 73 centres d’accueil abritant 20 373 personnes âgées. Un récent rapport du CNDH constate que la prise en charge des personnes âgées y est inadaptée et non respectueuse de leurs droits et de leur dignité. L’encadrement socioculturel y est pratiquement inexistant et des cas de maltraitance ont été observés dans la plupart des centres. Certains centres accueillent à la fois des personnes âgées, des enfants et des personnes atteintes de troubles mentaux. Le CESE en appelle purement et simplement à revoir la loi 14.05 qui concerne tous les centres de protection sociale sans distinction. « Elle devrait être revue en établissant des normes de construction et de prise en charge adaptées aux personnes âgées, » note le CESE

5— Promouvoir la participation sociale des personnes âgées

« Les femmes vieillissent seules, les hommes vieillissent à deux ». En 2010, 6,8 % des personnes âgées vivaient seules (9,7 % de femmes contre 3,5 % d’hommes). Cette solitude participe à l’exclusion sociale. Le CESE recommande de valoriser le patrimoine culturel des personnes âgées pour maintenir leur intégration, mais également de mettre en place des structures culturelles à même de les intéresser.

6— Améliorer la connaissance de la situation des personnes âgées

Les chiffres sont rares sur les personnes âgées. Le dernier rapport qui leur a été consacré par le HCP date de 2006. Le CESE souhaite que la production de données statistiques soit intensifiée, à intervalles réguliers, et intègre de nouveaux indicateurs comme la mesure de la dépendance et la participation des personnes âgées au développement.

7— Le cas particulier des MRE

Une fois retraités, de nombreux migrants ne reviennent pas au Maroc. L’une des raisons invoquées provient des conventions bilatérales avec le Maroc qui ne prévoient pas, dans tous les cas de figure, le transfert de la pension de retraite et autres aides accordées aux retraités des pays hôtes d’un pays à l’autre. Le CESE cite le cas des immigrés marocains en Allemagne qui sont moins enclins à retourner au Maroc que les ressortissants marocains résidant dans d’autres pays européens. Par ailleurs, la non-intégration d’une partie d’entre eux (non-maitrise de la langue, méconnaissance des codes culturels, manque d’informations et comportements discriminatoires à leur égard) peut rendre particulièrement difficile l’accès au soin. Le CESE envisage la révision des conventions bilatérales avec les pays d’accueils et la mise en place d’un dispositif pour faciliter le retour saisonnier et définitif au pays.

Rejoignez la communauté TelQuel
Vous devez être enregistré pour commenter. Si vous avez un compte, identifiez-vous

Si vous n'avez pas de compte, cliquez ici pour le créer