Houcine El Ouardi: "C’était de ma faute si des patients se retrouvaient à Bouya Omar"

En marge du lancement officiel de l’opération Karama visant à évacuer les patients du centre controversé de Bouya Omar, Telquel.ma s’est entretenu avec Houcine El Ouardi, le ministre de la Santé.

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Crédit: Rachid Tniouni

« Ce sera Bouya Omar ou moi ». C’est par ces mots que le ministre de la Santé Houcine El Ouardi avait répondu aux doutes exprimés par certains politiques au sujet de son intention de fermer le mausolée. Des paroles que le ministre a pu concrétiser puisque le lancement officiel de l’opération Karama, visant à évacuer l’institution, qui accueillait des patients atteints de maladie mentale a été effectué le lundi 15 juin. A cette occasion, Telquel.ma s’est entretenu avec le  ministre qui nous livre un bilan provisoire de l’opération et nous fait part de son prochain objectif.

Telquel.ma : L’opération Karama a été lancée, de manière non officielle, le 11 juin dernier. Quel est, pour le moment, le bilan chiffré?

Houcine El Ouardi : Jusqu’à présent (entretien réalisé dans l’après-midi du 15 juin, ndlr) environ 300 des 822 patients qui séjournaient dans le centre ont été évacués.  L’opération devrait durer quelques jours et se terminer le premier jour du ramadan (le 18 ou le 19 juin, ndlr). Je ne peux pas donner plus de détails mais c’est une opération qui doit être finie tres vite.

Comment cette évacuation a-t-elle été préparée par le ministère?

L’opération  Karama fait partie du plan national de prise en charge psychiatrique que j’avais présenté au roi Mohammed VI en juin 2013. Le retard pris pour la mise en place de cette opération s’explique par la préparation des lieux d’hébergements pour ces patients. Depuis l’indépendance et jusqu’à l’année dernière le Maroc ne disposait que de 2 400 lits pour toutes les pathologies mentales et psychiatriques. C’est grave! Le chiffre était très faible. Il a fallu augmenter la capacité litière existante mais surtout faire construire et équiper d’autres services.

Il a également fallu augmenter les ressources humaines. Rien que pour l’opération Karama, nous avons recruté 34 médecins de 122 infirmiers. Des médicaments ont été achetés. Nous avons débloqué un budget de 40 millions de dirhams pour cela.  La logistique est tout à fait convenable. Plus de 70 ambulances ont été garées devant le centre, pour ramener les malades vers leur nouveau lieu d’hébergement. Il a fallu plus d’un an et demi de préparation.

Que vont devenir les patients de Bouya Omar ?

Nous avons pris la décision de traiter les patients de Bouya Omar gratuitement. Le ministère de la Santé  s’est également engagé à ne plus renvoyer les malades vers leurs familles sauf si celles-ci en font la demande. Les médecins décideront des institutions qui accueilleront les patients mais idéalement celles-ci doivent être situées près des familles des patients. C’est pour cela que nous  créerons des unités qui auront pour but de les rapprocher de leurs familles.

Pour les familles souhaitant absolument visiter le sanctuaire de Bouya Omar, un complexe médico-social sera créé à cet endroit. Celui-ci répondra aux normes en vigueur dans les hôpitaux psychiatriques.

Lire aussi: Les maux de la santé mentale au Maroc

Vous avez quand même fait face à une certaine opposition qui souhaitait le maintien de Bouya Omar…

Rien ne se fait sans contestation mais je comprends les contestataires. Si des familles emmenaient leurs proches a Bouya Omar, et je le dis en tant que médecin, c’était de ma faute et celle du ministère. Ils n’ont pas trouvé où mettre leurs proches dans des hôpitaux du royaume du Maroc. Il n’y avait pas de place, pas d’effectif et il était temps que nous assumions nos responsabilités.

Mais pour revenir à ces mouvements de contestation, je tiens à dire que toutes les familles, sans exception, m’ont demandé d’envoyer leurs proches dans les nouveaux centres. Ils ont vu le traitement digne qui était accordé aux patients dans les centres.

Au parlement vous aviez dit « ce sera Bouya Omar  ou moi ».  Quel est votre nouvel objectif ?

Tout est prioritaire dans le domaine de la santé. Il me reste un an et demi dans ce gouvernement et j’espère m’attaquer à d’autres chantiers. Parmi eux, celui de l’hépatite C. Les médicaments pour cette maladie sont excessivement chers, certains ont un prix d’un million de dirhams. Le but est de faire un médicament fabriqué au Maroc et qui sera remboursable par la CNSS.

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