Géoparc de M'Goun récompensé par l'Unesco: quelles conséquences?

Le géoparc de M’Goun dans la région Tadla-Azilal vient de recevoir le label mondial de l’Unesco. Cette qualification est censée valoriser le patrimoine géologique du site mais aussi inciter à son développement économique. Comment concilier les deux ?

Par

Les fossiles, mais aussi les cascades et autres éléments géologiques sont valorisés. Crédit : Antony Drugeon.

Le parc de M’Goun a reçu à la fin du mois de septembre le label géoparc mondial de l’Unesco. C’est le premier site en Afrique a recevoir cette qualification très sélective. Ce label n’a pas de conséquence directe sur la protection du parc mais lui permet de faire partie d’un réseau mondial de 111 géoparcs qui peuvent ainsi s’échanger leurs bonnes pratiques.

Pour décerner la qualification, l’Unesco n’a pas regardé seulement le patrimoine géologique (site d’Iouaridène et ses centaines de pas de dinosaures, entre autres) mais tout l’environnement qui l’entoure (gravures rupestres, cascades etc.). « On ne peut pas labelliser un site où il n’y a pas de personnes qui y vivent. On regarde s’il y a de la population. Ce n’est pas juste un label pour assurer la sauvegarde de la géologie, il faut que ça profite aux gens qui y habitent », nous explique Margarete Patzak, en charge des géoparcs à l’Unesco.

Une ressource pour les guides et les gîtes ruraux

Stephane Legal est l’un des géologues mandatés par l’Unesco pour aller vérifier les informations sur place et il nous explique la décision de l’agence onusienne :

Il y a des empruntes et un patrimoine incroyable mais surtout un vrai lien avec la population locale.

Le scientifique donne l’exemple de la vallée heureuse, où avec la chute d’un pan de montagne, l’eau est montée, les sédiments ont enrichi la vallée et les habitants ont su en profiter.

Margarete Patzak nous précise que ce label offre trois avantages : le réseau, la reconnaissance du travail sur place, et la visibilité. Cette visibilité est mise à profit pour attirer les visiteurs et ainsi participer au développement économique et social du site avec l’utilisation de guides, gîtes ruraux, etc. Pour Ahmed El Haouti, président de l’association du géoparc de M’Goun (AGM), le site peut réellement participer au développement économique :

Nous proposons des circuits allant de cinq à dix jours, des durées de séjours beaucoup plus longues que le balnéaire, donc.

Un touriste cible

Mais faut-il encore que l’affluence soit limitée, pour ne pas dégrader le patrimoine justement mis en valeur. En Chine, certains géoparcs reçoivent deux millions de visiteurs par an, et commencent à pâtir du tourisme de masse. Mais Ahmed El Haouti se veut rassurant. S’il entend « attirer le maximum de curieux », il assure qu’il ne s’agira pas d’une affluence massive étant donné la « population cible », à savoir les passionnés de géologie, étudiants notamment.

Mais quelles mesures concrètes ont été prises pour protéger le patrimoine géologique ? Hormis le parcours de la route des dinosaures qui évite que les visiteurs ne s’éloignent trop de l’itinéraire, des travaux ont déjà été réalisés. Des géologues et paléontologues français, espagnols et marocains ont colmaté des traces, à l’aide de résine notamment, nous explique Mustapha Ouabbas, directeur du géoparc. Ensuite, une clôture a été installée. Les visiteurs doivent maintenant demander à la population locale, organisée en association, pour pouvoir accéder aux fossiles. C’est un dispositif « qui fait d’une pierre deux coups : il protège le site et implique la population. »

Sensibiliser les populations

Il est vrai qu’il est très difficile de protéger le patrimoine géologique tout en le valorisant. Parfois, certains fossiles sont protégés par des plaques de verre, mais le site perd alors en esthétique. Dans le Luberon, où travaille Stephane Legal, une partie a même été recouverte de sable, elle est alors cachée aux visiteurs pour être préservée.

Le principal objectif des autorités est vraiment que les locaux et les visiteurs aient conscience de la richesse de ce patrimoine. A ce sujet, l’expert français est plutôt optimiste pour le site marocain :

A M’Goun, il y a déjà une prise de conscience de la population locale, il faut la conserver maintenant. Les gens surveillent, expliquent aux visiteurs.

« Il est important de sensibiliser, les jeunes notamment, pour lutter contre le trafic d’ossements, revendus sur le marché noir », nous raconte Ahmed El Haouti. Rien que le site d’Iouaridène, avec ses traces de dinosaures très divers (herbivores et carnivores), est l’un des principaux sites du monde expliquant le processus de leur disparition.

Rejoignez la communauté TelQuel
Vous devez être enregistré pour commenter. Si vous avez un compte, identifiez-vous

Si vous n'avez pas de compte, cliquez ici pour le créer