"Sabot Out", le clip de rap des partisans anti-sabot de Tanger

Après avoir mené différentes actions coup de poing dans la ville de du Détroit, le collectif anti-sabot de Tanger publie, le 22 mars, le clip du morceau “Sabot Out”, pour fédérer en chanson contre la pose de sabot sur les voitures des Tangérois.

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Une chanson fédératrice et entraînante pour capter l’esprit d’un mouvement citoyen. C’est par ce biais que le collectif anti-sabot tangérois a décidé de faire entendre une nouvelle voix pour sensibiliser sur son bras de fer avec la commune et la société de gestion déléguée du stationnement, Somagec Parking.

Intitulé “Sabot out” et diffusé sur les réseaux sociaux, le clip de rap raconte en plusieurs petites séquences, les galères vécues par les Tangérois qui assistent, impuissants, à l’immobilisation de leurs véhicules par des sabots. Des scènes de vie qui se veulent impactantes et volontairement inspirées de “situations vécues réellement par des dizaines de citoyens lésés et désabusés par le sabot”, évoque Farah Bennani, membre du collectif anti-sabot tangérois. Produit par le le collectif, le titre a été composé et interprété par Bad Flow, un rappeur de la cité du Détroit, bien connu de la scène locale.

Le tribunal administratif de Rabat s’est prononcé, le 5 mars, sur la pose des sabots. Il annulait “la décision administrative rendue par le conseil communal de Tanger dans le volet concernant l’immobilisation des véhicules par l’usage de sabots sur les roues afin d’empêcher les propriétaires de se déplacer en cas de non-paiement du tarif fixé”. En cause, le fait que l’amende ne soit régie par aucun texte de loi.

Hymne fédérateur

Depuis plusieurs mois, le collectif anti-sabot multiplie les actions coup de poing dans la cité du Détroit contre ce dispositif. Après s’être organisé, dans un groupe Facebook qui rassemble plus de 36.000 membres, pour forcer les sabots enserrant les roues des véhicules, le collectif a multiplié les campagnes de sensibilisation citoyennes et les cortèges sonores pour protester contre la Somagec.

L’idée du clip-vidéo est venue d’une longue réflexion, de plusieurs idées qui ont été posées sur la table”, explique Ayoub, également membre du collectif anti-sabot. Pour lui, il fallait trouver un élément fédérateur pour mobiliser la société civile tangéroise. “Nous nous sommes dits que toute lutte a besoin d’une chanson, d’un hymne rassembleur, comme ‘Bladi Delmouni’ des supporters du Raja Casablanca ou la ‘Casa Del Mouradia’, reprise lors des manifestations du hirak algérien”, détaille-t-il.

C’est finalement Redouane Larouchi, alias Bad Flow, qui s’en chargera. Ce rappeur qui s’autoproduit se dit très attaché à Tanger, et en particulier à son quartier de naissance Metafi, comme le mentionne sa page Facebook. Mais Bad Flow est aussi proche de Mohammed Said Bouhaja, membre du collectif, qui a passé treize jours  derrière les barreaux fin juillet après une plainte déposée déposée contre lui par la Somagec pour six différents chefs d’accusation. Dont le vol de… 160 sabots. Dès lors, l’artiste et le collectif échangent, partagent les idées et bouclent une chanson et un clip, réalisé par un jeune ami du rappeur tangérois avec qui il collabore.

Éveil citoyen ?

Le clip s’appuie sur plusieurs scènes que les membres du collectif, et les Tangérois, ont pu vivre. “On peut voir une maman dont l’enfant est très malade. Elle sort et l’installe dans la voiture pour l’emmener à l’hôpital”, explique Farah Bennani, également membre du collectif. La maman finit par s’apercevoir qu’elle ne peut aller nulle part à cause d’un sabot immobilisant son véhicule.” Les militants souhaitent également, à travers le clip, dénoncer des dérives qui se seraient réellement déroulés. “Dans le clip, il y a cette autre femme enceinte et étendue par terre, après avoir été poussée par un poseur de sabot. C’est une référence à un cas bien réel pour lequel sont actuellement poursuivis des employés de la société de gestion déléguée pour avoir violenté une dame enceinte qui essayait d’enlever le sabot, ainsi qu’un avocat qui essayait de l’aider,” poursuit Farah Bennani.

La fin du clip est quant à elle noire. Elle montre un poseur de sabot blessé après un accident de voiture. Il appelle un docteur à son secours, mais ce dernier se rend compte que son véhicule est immobilisé par un sabot au moment de monter dedans. Le médecin bloqué, le poseur de sabot succombe à ses blessures.

Depuis quelques jours, le collectif anti-sabots s’est par ailleurs associé à l’initiative d’autres Tangérois pour préserver le parc emblématique de la ville de Tanger, le jardin de la Mendoubia menacé par un projet de parking. “On ne peut plus dissocier les deux sujets, sabots et jardin”, détaille Ayoub. Avant d’ajouter : Les Tangérois s’investissent, s’informent désormais sur le passé historique du jardin, mais aussi sur la pose des sabots. Nous, de notre côté, nous essayons d’apporter le maximum d’informations pour vulgariser les lois”. En chantant.