Interview de M. Sachet, Proviseur du Lycée Lyautey, Chef du Groupement de Gestion Casablanca-Mohammedia
1 – Aujourd’hui, le Pôle AEFE Casablanca-Mohammédia a 100 ans. Selon vous, quelle signification porte en soi un siècle de présence et d’engagement en faveur de l’enseignement français au Maroc ?
Stéphane Sachet, Proviseur du lycée Lyautey, Chef du Groupement des établissements en gestion directe AEFE Pôle Casablanca-Mohammedia.
Un siècle, ce n’est certes pas un anniversaire comme les autres. En dehors de la célébration en elle-même, c’est surtout pour nous l’occasion de rassembler nos communautés scolaires autour d’une histoire commune, d’une ville, d’un pays, en faisant vibrer les valeurs de l’enseignement français à l’étranger et en les plaçant, plus que jamais, sous le signe de la fraternité franco-marocaine. L’enseignement français a en effet toujours été fortement lié à l’Histoire du Maroc. Pour remonter dans le passé, il faut savoir que la première école française de Casablanca a vu le jour en 1907, rue de la Croix rouge. Plusieurs écoles se sont ensuite ouvertes en réunissant élèves français et marocains, puis garçons et filles, au gré de l’Histoire, avec cette idée de promouvoir une offre éducative reconnue, plurilingue et de répondre à une demande croissante. Et ce, jusqu’ à l’inauguration du « lycée en planches » à l’emplacement actuel de la Bank al Maghrib, puis ensuite du fameux « Grand Lycée » ou « Lycée de Garçons » en 1921, bientôt rebaptisé « Lyautey ». C’est cette date que nous célébrons aujourd’hui. Après le Protectorat, il s’agit aussi d’une convention culturelle signée par les deux gouvernements, marocain et français, en 1957, qui perpétue l’enseignement français sous le terme de « Mission universitaire et culturelle française au Maroc ». La France doit alors quitter le Lycée Lyautey, qui devient le lycée Mohamed V. De même, le « Petit Lycée » prend le nom d’Ibn Toumert et le lycée de Jeunes filles celui de Chawki… Tous ces évènements ont donc contribué à façonner le paysage éducatif de Casablanca. Cent ans après, cette empreinte est toujours présente. Elle anime de nombreux habitants qui ont, ou ont eu, une histoire avec ces établissements, qu’il s’agisse de grands-parents, des parents ou des petits enfants. Ces établissements sont ainsi des lieux hautement intergénérationnels. Nous célébrons donc un anniversaire porté par un passé riche et pluriel, mais tout autant ouvert sur l’avenir, qui nous permet d’écrire ensemble ce nouveau siècle.
2 – Apparemment, le contexte pandémique lié à la Covid-19 aurait perturbé votre calendrier. Pour quelle formule avez-vous opté pour s’y adapter ?
Le contexte pandémique n’aura, hélas, épargné personne. Sous l’égide des autorités sanitaires marocaines, nous avons dû en effet reporter la rentrée cette année, comme quelques-uns de nos confrères. Une décision qui a fortement impacté notre communauté et notre calendrier : équipes pédagogiques, parents et enfants inclus. Cela étant, notre priorité constante et absolue est restée la sécurité des élèves et des personnels qui les encadrent. L’enseignement hybride ou tout distanciel, mis en place au plus haut du pic épidémique, nous a également permis d’assurer un maximum de continuité dans le programme des classes. Je tiens d’ailleurs à remercier toutes les équipes qui se sont mobilisées pour assurer leurs missions. Dans cette situation exceptionnelle, tout a été mis en œuvre pour garder intacte notre ambition éducative au service du bien-être et de la réussite de nos élèves. Nous avons dû nous adapter et c’est également pourquoi nous avons repensé notre calendrier des nouvelles admissions pour la rentrée 2022. Les admissions sont gérées directement par le Service de Coopération et d’Action Culturelle rattaché à l’ambassade de France, le SCAC, et tout se passe actuellement via la plateforme www.efmaroc.org.
3 – Qu’en est-il justement du calendrier des nouvelles admissions aux établissements AEFE du Maroc ? Avec plus de détails si c’est possible.
Notons que les inscriptions sont d’ores et déjà ouvertes, que les procédures ont été simplifiées en s’effectuant de façon intégralement dématérialisée sur www.efmaroc.org et quelles sont accessibles dès l’âge de 3 ans. C’est une spécificité́ du système français et c’est pourquoi, cette année, de nouvelles classes de petites sections de Maternelle ont été ouvertes au sein du réseau. Enfin pour le calendrier : les parents ont jusqu’au 8 mars pour inscrire leurs enfants en Petite Section, jusqu’au 18 février en Moyenne Section, Grande Section et CP et, enfin, jusqu’au 8 mars pour les inscrire dans les niveaux supérieurs, du CE1 à la seconde, qu’ils soient prioritaires ou admis sur parcours scolaire.
4 – Dans le même sens, quels sont les critères d’admission des élèves prioritaires et ceux sur parcours scolaire ?
Pour rappel, les inscriptions concernent tous les enfants francophones, français, marocains ou étrangers et se font, soit sur admission prioritaire, soit sur parcours scolaire. Concernant les critères d’admission prioritaire : il s’agit d’élèves ayant la nationalité française, les fratries, les élèves de toutes nationalités ayant fréquentés un établissement français homologué par le Ministère français de l’Education Nationale ou bien des élèves ressortissant de l’un des pays membres de l’Union Européenne. Enfin, lorsque l’on parle d’admission sur « parcours scolaire », cela concerne les élèves de nationalité marocaine n’ayant jamais été scolarisés ou ayant été scolarisés moins de deux ans dans une école française homologuée, en France ou à l’étranger. Ces élèves sont soumis à une admission sur test d’entrée, de Moyenne Section au CP, et sur l’examen de leurs parcours scolaire, c’est-à-dire au regard de leurs bulletins scolaires, du CE1 à la seconde. Pour les admissions en Petite Section, cela se fait selon les demandes et les capacités d’accueil des établissements avec un entretien des parents.
5 – N’est-ce pas difficile ces tests d’entrée pour des élèves si petits ?
Il convient de rassurer les parents. Nous savons bien que de si jeunes enfants ne sont pas armés pour appréhender une situation de test d’entrée et supporter le stress et la pression de la sélection. C’est pourquoi ces tests sont élaborés et organisés par des professionnels de l’éducation et de la petite enfance. Ils savent ce que des jeunes de cet âge sont en mesure de réaliser sereinement. Si le contenu des épreuves est confidentiel, les principes retenus pour l’élaboration sont néanmoins toujours les mêmes et ces épreuves sont conçues comme des activités ludiques. Elles sont du niveau équivalent à ce qui est demandé à un élève de la classe précédente. Par exemple, pour les tests de grande section, le niveau attendu est celui de fin de moyenne section. Ces épreuves cherchent à déceler chez le candidat les qualités générales d’un bon élève de sa classe d’âge. Créativité, logique, imagination, réflexion sont donc les domaines de référence.
6 – Que pouvez-vous nous dire sur l’offre académique, la qualité pédagogique et les points forts de l’enseignement français au Maroc ?
La liste est longue, mais je vais tenter d’y répondre. Tout d’abord, il faut savoir que les établissements d’enseignement français sont homologués par le Ministère français de l’Education Nationale. Ils offrent donc toutes les garanties quant à la reconnaissance des études qui y sont poursuivies et des examens qui y sont préparés. C’est-à-dire que l’enseignement dispensé dans ces établissements prépare l’accès aux plus grandes universités mondiales et aux écoles les plus prestigieuses. Paris-Sorbonne, Sciences-Po, Polytechnique, Lausanne ou même Harvard ou le MIT : tout est possible ! Il faut dire également que les établissements du Pôle Casablanca Mohammedia ont une longue tradition d’excellence académique. Car, entrer dans un établissement AEFE, c’est aussi l’assurance de découvrir des équipes engagées et des personnes formées à l’accueil des jeunes élèves. Mais c’est aussi une ouverture sur les langues, avec notamment, la pratique de l’anglais qui est enseigné dans toutes les écoles, dès le CP. Evoquons de même, l’enseignement de la langue arabe qui fait partie intégrante des programmes officiels. Développer les savoirs scientifiques, les valeurs humanistes, l’esprit critique de chacun font encore partie intégrante de nos objectifs. C’est aussi laisser toute sa place à l’art, à la musique, aux sports, à la solidarité ou même à l’éducation aux questions environnementales. Nos élèves profitent, en effet, de nombreux projets et de toutes les semaines thématiques qui sont mis en œuvre à l’échelle de ce réseau unique, présent sur cinq continents. Enfin, et il faut bien le rappeler, en comparaison à d’autres établissements aux exigences similaires, nous proposons des prix qui demeurent attractifs par rapport au reste du marché.
7 – Et juste pour définition, que veut dire ‘‘établissements en gestion directe et Pôle Casablanca-Mohammedia’’ ?
Le terme « établissements en gestion directe » (EGD) signifie que ceux-ci sont rattachés à l’AEFE en services déconcentrés. Ils sont des composantes de l’établissement public et leur budget est agrégé chaque année à celui de l’AEFE. L’Agence leur accorde des subventions et rémunère les personnels titulaires qui y exercent. Enfin, le « Pôle Casablanca-Mohammedia » désigne les huit établissements en gestion directe situés à Casablanca et sa périphérie, à savoir : les écoles Claude Bernard, Ernest Renan, Georges Bizet, Molière, Théophile Gautier, le collège Anatole France, le Groupe Scolaire Claude Monet à Mohammedia et enfin le lycée Lyautey.
8 – Peut-on avoir une idée sur l’AEFE, notamment sa mission au Maroc et son rôle dans le rapprochement éducatif et culturel entre la France et le Maroc ?
C’est non seulement une mission, mais aussi, depuis toujours, un engagement. Celui de faire de l’enseignement français à l’étranger un levier, une dynamique de l’éducation pour le pays d’accueil en participant à la formation des élites internationales et nationales de demain. Il s’agit par ailleurs, d’inculquer des valeurs tout en s’adaptant à la culture du pays d’accueil. C’est encore donner à nos jeunes, les clés d’un monde complexe et mouvant où leurs connaissances, leurs méthodes, leurs compétences linguistiques, leur capacité d’adaptation, seront autant d’atouts fondamentaux pour une vie personnelle et professionnelle épanouie.
9 – Pour conclure, quels sont les projets, les valeurs, voire l’approche, qui distinguent les établissements AEFE du Pôle Casablanca-Mohammedia sur le plan mondial ?
Au-delà de notre excellence académique, les établissements du Pôle Casablanca-Mohammedia sont un exemple unique de par leur taille. Nous représentons au total plus de 8000 élèves, inscrits dans pas moins de huit établissements au niveau de la zone. C’est un challenge et une fierté. Cette dernière ne vient pas uniquement des excellents résultats de nos élèves aux examens et du poids de notre institution. Nous sommes également caractérisés par de nombreux projets solidaires, artistiques, caritatifs ou sportifs qui sont portés par nos équipes éducatives au quotidien. Intégrer toutes ces dimensions est d’une importance majeure pour élever les élèves vers la confiance en soi, l’ouverture à l’autre et sur le monde.
10 – Quels sont les différents projets mis en place pour célébrer les 100 ans du lycée Lyautey et du Pôle ?
Les projets sont nombreux, au sein du lycée Lyautey mais aussi des établissements du Pôle. Et pas seulement, puisque nous avons aussi le plaisir d’inviter pour partager ces festivités, le lycée Mohamed V ou encore le lycée Chawki. Exposition collective, ateliers parents-enfants, concours de nouvelles, de chanson, visites guidées du patrimoine de la ville ou fresque géante d’un artiste casablancais… Bref, des projets multiples qui ne sont pas destinés uniquement aux élèves, mais aussi à leurs familles. Je pense, notamment à « raconte-moi ton école », un recueil de témoignages de nos anciens élèves auquel a participé, entre autres, Gad Elmaleh… D’autres surprises sont encore à venir mais ce sera pour plus tard, sinon il n’y aura plus de surprise….