Sebta : près de 4.500 migrants ont tenté de franchir la frontière, six tentatives déjouées

Depuis vendredi dernier, la ville de Fnideq est le théâtre d’une présence policière sans précédent. Si la ville a toujours été le choix de prédilection de plusieurs candidats à l’immigration clandestine, compte tenu de sa proximité avec l’enclave espagnole de Sebta, la tentative d’immigration en masse qui a eu lieu ce week-end est inégalée dans l’histoire contemporaine du Maroc.

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Des centaines de jeunes marocains et étrangers se sont rassemblés ce week-end pour essayer de franchir la frontière de Sebta. Crédit: EFE

Le nombre des personnes ayant tenté de prendre d’assaut la barrière de sécurité entre les villes de Fnideq et Sebta le dimanche 15 septembre est estimé à près de 4.500 personnes, selon des chiffres recueillis par Hespress. Ce chiffre n’inclut pas les personnes qui auraient réussi à s’enfuir sans être appréhendées par les forces de l’ordre.

Selon la même source, ce sont 3.936 Marocains venus des quatre coins du pays et 519 étrangers qui ont été arrêtés par les autorités du 11 au 16 septembre. Du côté marocain, les mineurs sont au nombre de 141. Parmi les étrangers, 164 sont algériens, 318 des Subsahariens et 37 entre Tunisiens et Asiatiques (notamment des Syriens et des Yéménites).

Depuis le début du mois, plusieurs appels à l’immigration clandestine ont pullulé sur les réseaux sociaux, appelant à un mouvement de masse à partir de la ville de Fnideq le dimanche 15 septembre. Il n’est pas sûr si ces appels ont été organiques, donc maroco-marocains, ou si, comme le dénoncent plusieurs internautes sur X (anciennement Twitter), ce seraient des tentatives d’ingérence externe.

Les services de sécurité des villes de Tanger et Tétouan ont donc, du 9 au 11 septembre, mené des opérations sécuritaires qui ont “abouti à l’interpellation de 60 individus”, dont des mineurs, “pour leur implication présumée dans la fabrication et la diffusion de fausses informations sur les réseaux sociaux incitant à l’organisation d’opérations collectives d’immigration illégale”, selon la MAP. 13 autres individus ont été également interpellés dans les villes de Casablanca, Rabat, Tétouan, Larache, Ouazzane, Missour, Oujda, Fès, Mohammedia et Ouislane, selon la Direction générale de la surveillance du territoire (DGST), pour leur implication dans la création et le partage du même type de contenu susmentionné.

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Selon les autorités locales, six tentatives d’attaque massive contre la frontière hispano-marocaines ont été jusque-là déjouées, du vendredi au dimanche. La même période a été caractérisée par des affrontements répétés entre les forces de l’ordre et les centaines de candidats à l’immigration clandestine. Dimanche soir, ces affrontements se sont transformés en une poursuite à travers la ville de Fnideq, selon AlYaoum24. La même source ajoute que sans la participation des Forces armées royales (FAR) dans les montagnes et de la gendarmerie royale, “ces plans de sécurité auraient échoué”.

Du côté espagnol, la réponse n’a pas été des moindres. Sur des vidéos publiées sur les réseaux sociaux, des tanks sont alignés tout au long de la frontière, la présence de l’armée espagnole se faisant très clairement remarquer, se tenant prête au cas où les forces de l’ordre marocaines auraient échoué à dissuader les candidats à l’immigration illégale. Le média espagnol El Confidencial, à ce sujet, ne mâche pas ses mots : “Il n’a jamais été aussi évident, cette fois positivement, que la sécurité de la ville autonome dépend du Maroc. Si les forces de sécurité marocaines n’avaient pas été pleinement employées, des centaines, voire des milliers de jeunes migrants seraient entrés à Sebta par voie terrestre et maritime, car dimanche, ils ont essayé simultanément les deux routes”, publiait-il le 17 septembre.

Il est également à noter que, durant les derniers mois, plusieurs tentatives d’immigration clandestine ont été entreprises. Si quelques-unes ont été déjouées, d’autres ont été couronnées de succès. Depuis le mois d’août, huit Marocains ont été retrouvés noyés au large de Sebta après des tentatives d’immigration illégale, par exemple. Le 25 août dernier, 500 immigrés, qui ont été refoulés depuis (à l’exception des mineurs, selon la législation espagnole, et des Algériens) ont réussi à entrer à la nage à Sebta.

“La plupart des jeunes et des mineurs qui tentent de migrer sont hors de l’école, de l’université ou de la formation professionnelle, manquent de compétences ou de qualifications en matière de communication… et proviennent de familles pauvres et précaires, vivant avec des ressources très limitées”, a expliqué à Hespress Mohamed Ben Aissa, président de l’Observatoire du nord des droits humains (ONDH).

Et d’ajouter : “La plupart de ces jeunes ont perdu espoir en leur pays et en leur avenir, ce qui est le résultat d’une situation stagnante au Maroc, un état qui se manifeste à travers le discours pessimiste prédominant sur les réseaux sociaux”.

Selon Ben Aissa, “ces deux motivations sont alimentées par l’imaginaire social chez les jeunes, qui voient l’Europe comme le paradis perdu”.

Les appels à l’immigration clandestine sur les réseaux sociaux ne se sont pas pour autant arrêtés. Ce type de contenu est toujours aussi répandu, avec une nouvelle date de rassemblement (le 30 septembre) à la frontière entre Fnideq et Sebta pour retenter un passage par la force.