Étudiants en médecine VS gouvernement : du dialogue à l’impasse

Les étudiants en médecine maintiennent la pression quant à la qualité de leur formation et aux conditions de leur cursus, face à un gouvernement qui, par la voix de son ministre de l’Enseignement supérieur, assure avoir “répondu favorablement” à leurs préoccupations.

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Manifestation des étudiants en médecine, le 6 mai 2024 à Rabat. Crédit: Rachid Tniouni / TelQuel

Lors d’une session à la Chambre des conseillers, le ministre de l’Enseignement supérieur, Abdellatif Miraoui, a évoqué les discussions avec les représentants des étudiants, mentionnant 14 réunions tenues, pour des solutions souples proposées le 25 juin. Ces solutions incluent des ajustements sur la durée de la formation pour obtenir un diplôme de docteur en médecine, ainsi que des modifications sur les thèses et la formation spécialisée en 3e cycle. “Malgré un consensus émergent sur plusieurs points, les solutions proposées ont été rejetées par l’ensemble des étudiants”, a déploré le ministre.

Contacté par TelQuel, Yasser Derkaoui, président du bureau des étudiants en médecine de Rabat, évoque un accueil d’abord positif des propositions gouvernementales, rapidement tempéré par des rétractations sur des points clés lors de discussions ultérieures : “Après notre réunion officielle avec nos ministères de tutelle, il y a eu des reculs sur plusieurs points essentiels, tant sur le fond que sur la forme, concernant nos revendications initialement acceptées lors des premières réunions de travail.”

Il souligne une demande spécifique, qui est encore en discussion : “épargner les promotions en grève de l’application d’une réforme transitoire concernant leurs années d’études. Ils sont censés étudier en 6 ans (dont une année de stage pratique à plein temps) pour un volume horaire de 3900 heures de formation, une réforme apparue en 2023 et qui sera écrasée en 2024 par une nouvelle réforme des études médicales en 6 ans (dont 2 ans de stage) pour 5000 heures de formation, et dont bénéficieront les promotions rejoignant les facultés de médecine l’année universitaire prochaine.”

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Selon Derkaoui, les étudiants ont consenti à de nombreux sacrifices, mais restent intransigeants sur des aspects vitaux tels que la qualité de la formation et la dignité professionnelle future des médecins et pharmaciens. Parmi les demandes encore en discussion, il appelle également à la levée de toutes les sanctions contre les étudiants et leurs représentants, à une reprogrammation de la reprise des cours pour assurer deux chances par session d’examen, et à la formalisation par écrit de tout accord via un procès-verbal.

Yasser Derkaoui insiste sur la nécessité d’approches adaptatives plutôt que des réformes abruptes et unilatérales, aspirant au compromis et à une qualité durable de l’enseignement médical.

“Nous ne sommes pas des cobayes”

Une autre source, anonyme cette fois, membre de la Commission nationale des étudiants en médecine, médecine dentaire et pharmacie, apporte une perspective critique sur le processus de négociation. “Les 14 réunions évoquées par le ministre n’étaient pas des sessions de négociation, mais plutôt des rencontres superficielles, et lors de l’une d’elles seulement, il a eu le courage de nous accueillir”, affirme notre source.

“On nous demande de sacrifier nos promotions actuelles pour tester une réforme qui n’a pas été suffisamment détaillée”

Source anonyme

Elle souligne également le manque de clarté et de détails techniques dans les propositions de réforme, un point sur lequel les étudiants ont été particulièrement vigilants : “On nous demande de sacrifier nos promotions actuelles pour tester une réforme qui n’a pas été suffisamment détaillée. Nous ne sommes pas des cobayes.

Par ailleurs, le 12 juillet, une assemblée générale a été tenue par la Commission nationale des médecins internes et résidents (CNIR). Cette réunion, qui a rassemblé des représentants des internes et résidents, des médecins en pharmacie et des médecins en dentaire, a abouti à une décision unanime : reprendre le parcours de lutte pour défendre leurs droits et acquis.

Grève nationale

Dans un communiqué diffusé dimanche 14 juillet, la Commission nationale des médecins internes et résidents (CNIR) a annoncé une grève nationale prévue pour le jeudi 18 juillet. Les services d’urgence et les soins intensifs seront épargnés pour ne pas compromettre la santé des patients.

La Commission justifie cette grève en invoquant “une série de négligences croissantes face à toutes les demandes des médecins internes et résidents”. Elle dénonce également “le report constant des réunions avec le ministère de la Santé et de la Protection sociale”, qui a fait marche arrière sur sa promesse d’établir des conseils administratifs et des groupes de travail dédiés aux internes et résidents, lit-on dans le communiqué de la CNIR.

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En solidarité avec les étudiants des facultés de médecine, de pharmacie et de médecine dentaire, la CNIR a annoncé un boycott de la surveillance des examens d’accès aux facultés de médecine et de pharmacie, ainsi que des examens de rattrapage du deuxième semestre du cycle fondamental. Cette mesure est prise pour attirer l’attention sur la crise qui secoue ces établissements depuis plusieurs mois.

Jusqu’à ce que soit résolue la crise des étudiants des facultés de médecine et de pharmacie, crise qui nous a été imposée par le ministère de l’Enseignement supérieur”, les étudiants refusent de passer ces examens. La CNIR souligne que “ce ministère n’a pas pris en compte les demandes légitimes des étudiants par le biais de leurs représentants légaux”, ce qui pourrait conduire à une année blanche.

Face à cette situation tendue, la CNIR appelle le gouvernement à adopter une approche “sage et pragmatique” pour résoudre la crise. Elle exhorte les autorités à “gérer le dossier des professionnels de la santé avec des moyens légitimes qui permettent de surmonter cette crise sans aggraver la situation actuelle”. La Commission plaide pour “le dialogue et les méthodes de négociation les plus appropriées afin de réussir cette saison académique et de préserver la santé des citoyens”.