Raids israéliens “ciblés” à Rafah, négociations de la “dernière chance” au Caire

L’armée israélienne a mené mercredi des frappes aériennes et des opérations “ciblées” meurtrières dans la ville palestinienne de Rafah menacée d’une offensive terrestre majeure, à l’heure où se tiennent au Caire des négociations de “la dernière chance” en vue d’une trêve entre Israël et le Hamas.

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Des aides humanitaires arrivent à Gaza par le poste-frontière de Rafah, le 13 mars 2009. Crédit: gloucester2gaza / Flickr

Des représentants d’Israël et du mouvement islamiste palestinien Hamas ainsi que les médiateurs qatari, américain et égyptien sont présents au Caire où les négociations ont repris en fin de matinée, selon un média proche des autorités égyptiennes.

Malgré les multiples mises en garde et pressions internationales pour une trêve, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu se dit déterminé à lancer un assaut terrestre contre Rafah, à la lisière sud de la bande de Gaza assiégée, dernier bastion selon Israël du Hamas qu’il a juré d’anéantir.

Le Hamas est responsable d’une attaque sans précédent contre Israël menée le 7 octobre 2023 à partir de Gaza qui a fait plus de 1170 morts majoritairement des civils, selon un bilan de l’AFP établi à partir de données officielles. Plus de 250 personnes ont été enlevées durant l’attaque et 128 restent captives à Gaza, dont 36 sont considérées mortes, selon l’armée.

“Même les zones présentées comme sûres par l’armée israélienne sont bombardées”

Mouhanad Ahmad Qishta, à Rafah

La riposte israélienne a été dévastatrice : le déluge de feu sur la bande de Gaza où s’entassent quelque 2,4 millions de Palestiniens a coûté la vie jusqu’à présent à 34.844 personnes selon le Hamas, provoqué une catastrophe humanitaire avec une situation de famine dans le nord d’après l’ONU et des destructions colossales. Ces dernières 24 heures, 55 morts supplémentaires y ont été recensés par le ministère de la Santé du Hamas.

Après le départ de dizaines de milliers de Palestiniens sommés lundi par Israël de quitter l’est de Rafah, l’armée a pris le contrôle du passage stratégique de Rafah pour le transfert de l’aide avant de le fermer, et continué de bombarder la ville.

Dans la nuit, des blessés et des corps ont été retirés des décombres d’habitations détruites devant des habitants inquiets ou en pleurs à Rafah, adossée à la frontière fermée de l’Égypte. “Nous avons très peur. L’armée d’occupation continue de tirer à l’aveuglette des obus sur des quartiers de l’est de Rafah, en plus d’une intensification des raids aériens”, a raconté à l’AFP Mouhanad Ahmad Qishta, 29 ans, un habitant. “Même les zones présentées comme sûres par l’armée israélienne sont bombardées.

L’armée a affirmé que ses troupes avaient poursuivi leurs “opérations ciblées dans l’est de Rafah, sur la base d’informations faisant état de terroristes opérant dans le secteur”. “Plusieurs terroristes ont été éliminés lors d’affrontements. Des ouvertures de tunnels ont été découvertes par les soldats qui procèdent à leur destruction”, a-t-elle ajouté.

Les avions de combat, selon elle, ont frappé “plus de 100 cibles” de groupes armés dans la bande de Gaza, où le Hamas, considéré comme une organisation terroriste par les États-Unis et l’Union européenne, a pris le pouvoir en 2007.

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Sous la pression des États-Unis, son principal allié, Israël a annoncé la réouverture du passage de Kerem Shalom, près de Rafah, fermé lundi au lendemain de tirs par le Hamas de roquettes sur la zone qui ont tué quatre soldats. Des camions en provenance d’Égypte transportant de la nourriture, de l’eau et des médicaments sont arrivés au passage de Kerem Shalom et doivent après inspection entrer dans le territoire palestinien, a dit l’armée.

Interrogée en milieu de matinée, Juliette Touma, porte-parole de l’UNRWA, l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens, a indiqué à l’AFP que ce passage “n’était toujours pas ouvert”.

Un deuxième passage depuis Israël, celui d’Erez, d’où l’aide est transférée vers le nord de Gaza, continue de fonctionner, selon l’armée. L’ONU a affirmé mardi ne plus disposer que d’un jour de réserves de fioul pour les opérations humanitaires à Gaza, et appelé à rouvrir les passages.

L’exécutif américain a jugé “inacceptable” leur fermeture, alors que la population à Gaza est menacée de famine selon l’ONU. Les États-Unis ont aussi “suspendu la livraison d’une cargaison” de bombes à Israël après l’absence de réponse de ce pays face à ses “inquiétudes” concernant une offensive à Rafah, a dit un responsable américain.

Le Qatar a appelé la communauté internationale à agir pour empêcher un “génocide” à Rafah, où sont entassés quelque 1,4 million de Palestiniens, en grande majorité des déplacés.

En vue d’éviter un assaut à Rafah qui pourrait provoquer un “bain de sang” selon l’ONU, les médiateurs s’empressent au Caire de trouver un terrain d’entente entre le Hamas et Israël, dont les positions affichées restent très éloignées.

Le Hamas, selon un responsable du mouvement Khalil al-Hayya, a accepté une proposition de trêve comprenant trois phases, chacune d’une durée de 42 jours et incluant un retrait israélien du territoire et un échange d’otages et de prisonniers palestiniens, dans le but d’un “cessez-le-feu permanent”.

Mais Israël a répondu que la proposition acceptée était “loin de (ses) exigences”, et répété son opposition à un cessez-le-feu permanent tant qu’il n’aura pas “vaincu” le Hamas.

Mercredi, un responsable du Hamas a de nouveau insisté sur “les revendications légitimes de notre peuple”, et parlé d’un “round décisif” au Caire.

Benjamin Netanyahu a indiqué avoir donné pour consigne à sa délégation au Caire de “continuer à se montrer ferme sur les conditions nécessaires à la libération” des otages et “essentielles” à la sécurité d’Israël.

Cela pourrait être la dernière chance (pour Israël) de récupérer les captifs (…) vivants”, a dit mardi un responsable du Hamas.