La communauté internationale multiplie pendant ce temps ses appels pour dissuader Israël de lancer une offensive dans la ville surpeuplée de Rafah, où sont piégés près d’un million et demi de civils contre la frontière fermée avec l’Égypte.
À quelques kilomètres plus au nord, les combats entre l’armée et le mouvement islamiste palestinien font rage dans la ville de Khan Younès, transformée en champ de ruines.
Selon le ministère de la Santé du Hamas, les soldats israéliens y ont pris le contrôle de l’hôpital Nasser, le plus grand du sud de Gaza, où cinq patients sont morts à la suite de coupures d’électricité consécutives à la pénurie de carburant, qui ont provoqué l’arrêt de la distribution d’oxygène après cet assaut.
Le ministère a ajouté craindre pour la vie de sept autres patients en soins intensifs et à la pouponnière, et tenir les forces israéliennes pour “responsables” des décès. Jeudi, le ministère avait indiqué que plusieurs centaines de patients, personnel médical et autres civils se trouvaient encore à l’intérieur du complexe.
L’armée avait alors annoncé avoir mené une opération dans l’hôpital après avoir reçu “des renseignements crédibles” selon lesquels le Hamas y aurait retenu des otages et “il y aurait peut-être des corps d’otages” sur place. Elle a affirmé vendredi y avoir arrêté “plus de 20 terroristes qui ont participé” à l’attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre, parmi des “dizaines de suspects” interpellés.
L’armée a ajouté avoir retrouvé dans les environs du complexe “des restes d’obus de mortier, de grenades et d’autres armes appartenant” au Hamas, qui a selon elle utilisé l’hôpital pour faire feu sur les forces israéliennes ces dernières semaines.
Un témoin parlant sous couvert d’anonymat a déclaré à l’AFP que les soldats avaient ouvert le feu sur “toute personne qui bougeait à l’intérieur de l’hôpital”. Des médecins ont décrit ces derniers jours une situation intenable dans cet hôpital cerné par les combats, où s’étaient réfugiés des milliers de déplacés avant de commencer à fuir. Médecins sans Frontières a annoncé que ses employés avaient “dû fuir, laissant les malades derrière eux”.
L’hôpital Nasser est “la colonne vertébrale” du système de santé dans le sud de Gaza et “doit rester opérationnel”, a affirmé vendredi l’Organisation mondiale de la santé, rappelant que quelques hôpitaux seulement du territoire continuaient à fonctionner partiellement.
Vendredi, des témoins ont signalé des combats à Khan Younès, dans le nord-est de Rafah, ainsi que dans l’est de la ville de Gaza, dans le nord.
La guerre a été déclenchée par l’attaque menée le 7 octobre par des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d’Israël, qui a entraîné la mort de plus de 1160 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP réalisé à partir de données officielles israéliennes.
Israël a juré d’anéantir en représailles le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007, qu’il considère comme une organisation terroriste de même que les États-Unis et l’Union européenne. L’offensive israélienne à Gaza a fait 28.775 morts, en grande majorité des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas qui a fait état vendredi de 112 morts en 24 heures.
Dans un contexte de tensions en Israël et dans les territoires palestiniens, une attaque qualifiée de “terroriste” par la police a fait au moins deux morts vendredi dans une petite gare routière de Kiryat Malakhi, une ville du sud d’Israël, où un homme a ouvert le feu.
L’armée israélienne se prépare pendant ce temps à une offensive sur Rafah, où le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, a promis de détruire le “dernier bastion” du Hamas. Il a assuré que l’armée permettrait auparavant aux civils “de quitter les zones de combat”, sans expliquer vers quelle destination.
Cette ville, transformée en un gigantesque campement, abrite, selon l’ONU, 1,4 million de Palestiniens, pour la plupart déplacés par la guerre. Rafah est en outre le principal point d’entrée de l’aide humanitaire depuis l’Egypte, contrôlée par Israël et insuffisante pour répondre aux besoins d’une population menacée par la famine et les épidémies.
“Ils nous tuent lentement”, a témoigné un homme réfugié à Rafah, Mohammad Yaghi. “Nous mourons lentement à cause des pénuries et du manque de médicaments.”
“Tout le monde est malade, les enfants et les personnes âgées, et il n’y a pas de médicaments, pas d’antibiotiques ou d’autres traitements”, a aussi raconté à l’AFP une femme, Jihan al-Quqa, qui a fui Khan Younès.
Une offensive à Rafah conduirait à un “désastre humanitaire sans précédent” et à un “tournant dans le conflit”, a prévenu vendredi le président français, Emmanuel Macron.
Le président américain, Joe Biden, avait réitéré la veille, lors d’une conversation téléphonique avec Benjamin Netanyahu, son opposition à une telle opération “sans un plan crédible et réalisable assurant la sécurité des civils”.
Des négociations complexes en vue d’une trêve incluant de nouvelles libérations d’otages se poursuivent au Caire par l’intermédiaire des pays médiateurs : Qatar, Égypte et États-Unis.
Selon Israël, 130 otages sont encore détenus à Gaza, dont 30 seraient morts, sur environ 250 personnes enlevées sur son territoire le 7 octobre. Une trêve d’une semaine en novembre avait permis la libération de 105 otages et de 240 Palestiniens détenus par Israël.
Selon le Wall Street Journal, citant des responsables égyptiens, l’Égypte construit actuellement une zone sécurisée entourée d’un mur dans le Sinaï afin d’y accueillir des Palestiniens de Gaza. Il faut “éviter à tout prix” que les habitants de Gaza fuient en Égypte, car cela signerait “l’arrêt de mort” d’un processus de paix, a déclaré vendredi à la BBC le Haut commissaire de l’ONU aux réfugiés, Filippo Grandi.