Hors d’un nouveau choc géopolitique inattendu, la croissance mondiale est attendue plus forte que lors des précédentes prévisions de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) : le PIB mondial devrait augmenter de 2,9% contre les 2,7% estimés en novembre.
L’institution parisienne observe en revanche attentivement la mer Rouge, point de passage central du commerce mondial avec quelque 12% du trafic. Celui-ci, fortement perturbé depuis la mi-novembre par des attaques de rebelles en soutien à la cause palestinienne, est en chute de près de 30% sur un an, d’après le Fonds monétaire international.
Afin d’éviter les risques, les navires contournent ce canal en passant par l’Afrique et le cap de Bonne espérance, à l’instar du transporteur CMA-CGM, qui a annoncé, ce vendredi, suspendre de nouveau le transit de ses bateaux par la mer Rouge. Ce trajet, plus long et plus coûteux, devrait se répercuter sur les prix des marchandises, en plus des perturbations déjà à l’œuvre sur les chaînes de production en Europe.
« Si elle s’avérait persistante », la hausse des coûts du transport maritime pourrait gonfler l’inflation en 2024, à hauteur de 0,4 point de plus au bout d’un an environ au sein des pays développés, estime l’OCDE dans son rapport trimestriel. Or c’est justement grâce au ralentissement de l’inflation, couplé à la baisse des taux d’intérêt des banques centrales, qu’une reprise économique durable pourrait voir le jour, selon les grands instituts internationaux.
Pour l’instant, « l’inflation devrait revenir à son objectif dans la plupart des pays du G20 d’ici la fin de 2025 », avec 2,6% attendus cette année et 2,4% l’an prochain, selon l’OCDE. Ces calculs n’intègrent pas les énormes hausses attendues en Argentine (250,6% en 2024 et 64,7% en 2025, sur fond de forte dévaluation du peso par le nouveau président Javier Milei) et en Turquie.
Au-delà des Houthis, l’OCDE surveille le Moyen Orient dans son ensemble: « un élargissement ou une escalade du conflit » risquerait d’« entraîner des perturbations du transport maritime plus importantes que prévu actuellement, accentuer les goulets d’étranglement au niveau de l’offre et faire grimper les prix de l’énergie », estime-t-elle, au premier jour d’une visite dans la région du secrétaire d’Etat américain Antony Blinken pour encourager à une trêve entre Israël et le Hamas. « Cela nuirait à la croissance » et « accentuerait directement les tensions inflationnistes », affirme encore l’OCDE.
Pour l’heure la croissance mondiale devrait être soutenue cette année par la progression du PIB américain, attendue à 2,1% contre 1,5% en novembre.
« Les dépenses des ménages et la solidité du marché du travail devraient continuer à soutenir la croissance » dans le pays, écrit l’institution économique, trois jours après la publication d’un rapport montrant pour janvier deux fois plus de créations d’emplois qu’attendu.
Parallèlement, l’inflation devrait y ralentir plus vite qu’attendu cette année à 2,2% contre 2,8% lors des dernières prévisions, de quoi conforter la Banque centrale américaine (Fed) dans sa stratégie de baisse de taux d’intérêt, même si son président Jerome Powell a jugé mercredi « peu probable » d’acter la première baisse de taux d’intérêt depuis deux ans en mars.
La croissance en zone euro sera de son côté plombée par ses deux premières économies, souligne l’OCDE: la France devrait voir son PIB augmenter de 0,6% cette année, soit 0,2 point de moins par rapport aux prévisions de novembre, et l’Allemagne voir le sien de 0,3%, soit 0,3 point de moins que précédemment estimé.
A l’échelle continentale, cela se traduira par une progression de 0,6% de croissance en 2024, en retrait de 0,3 point par rapport aux prévisions de novembre, et de 1,3% en 2025, en baisse de 0,2 point.
L’OCDE a en revanche laissé inchangées ses prévisions concernant le Royaume-Uni, avec 0,7% cette année, pour la Chine avec 4,7%, le Japon, avec 1%, mais revu en forte hausse sa prévision pour la Russie avec 1,8% attendu cette année, soit 0,7 point de plus qu’attendu en novembre.