Ce “town hall”, un grand rituel de la politique américaine, était la première apparition médiatique de l’ancien président américain depuis qu’il a été reconnu responsable d’agression sexuelle par un tribunal de New York. Donald Trump a d’ailleurs longuement moqué son accusatrice, la qualifiant de “tarée”.
L’échange constituait aussi un exercice périlleux pour CNN, où Donald Trump n’était pas apparu dans un tel format depuis son élection en 2016. La chaîne, avec laquelle il entretient des relations conflictuelles, était accusée de lui offrir un mégaphone malgré ses mensonges sur l’élection de 2020, perdue face à Joe Biden.
Et, mercredi soir, Donald Trump a une nouvelle fois martelé — sans preuve — que ce scrutin était “truqué”. Il faudrait être “un idiot” pour ne pas le reconnaître, a lancé d’un ton taquin le républicain à la cravate rouge. L’ancien dirigeant, favori pour la primaire républicaine, ne s’est pas non plus fermement engagé à accepter le résultat de la présidentielle de 2024.
Le choix du New Hampshire pour ce “town hall” ne devait rien au hasard. Cet État frontalier du Canada est parmi les premiers à organiser ses primaires républicaines début 2024. Une victoire garantirait à Donald Trump un élan précieux pour la suite de sa campagne.
Devant un public acquis à sa cause et souvent hilare — des électeurs ayant l’intention de voter à la primaire républicaine —, l’ancien président a commenté pêle-mêle plusieurs dossiers brûlants de l’actualité américaine. Et a jeté un pavé dans la mare en exhortant ses collègues républicains à provoquer un défaut de paiement sur la dette américaine, à moins de coupes budgétaires “massives”.
L’ancien locataire de la Maison Blanche, connu pour sa promesse de construire un “mur” à la frontière avec le Mexique, a aussi prédit que jeudi, date à laquelle un afflux de migrants est attendu en raison de l’expiration d’une mesure sanitaire, serait un jour “honteux”.
Il s’est par ailleurs montré extrêmement évasif sur la guerre en Ukraine, refusant de dire concrètement s’il souhaitait une victoire de Kiev ou de Moscou.
Sur l’avortement, dossier sur lequel les républicains sont de plus en plus mal à l’aise, Donald Trump a là encore refusé de dire s’il promulguerait une interdiction nationale de l’avortement.
Il a multiplié les attaques contre son successeur Joe Biden, son possible rival en 2024, assurant qu’il était “sérieusement en train de lui mettre la pression”.
Le président démocrate a réagi dès la fin de l’échange télévisé. “Vous voulez vraiment quatre ans de plus de ça ?”, a-t-il lancé dans un tweet. “Si vous ne le voulez pas, contribuez à notre campagne”, a écrit le président-candidat octogénaire.
Échange tendu
Cet échange a souvent été tendu. “Vous n’êtes pas quelqu’un de bien”, “vous ne savez pas de quoi vous parlez”… l’ancien président a plusieurs fois injurié la modératrice Kaitlan Collins, étoile montante de CNN.
Sous sa présidence, le milliardaire avait multiplié les coups d’éclat contre les médias, et particulièrement CNN, qualifiés “d’ennemis du peuple”.
En octobre dernier, l’ancien président avait même porté plainte contre la chaîne, qu’il l’accusait de l’avoir diffamé pour le dissuader de se présenter à l’élection de 2024. Mais dans un univers médiatique très compétitif, les chaînes ont besoin de spectacle. Les frasques de Donald Trump, qu’elles choquent ou amusent, font de l’audience — CNN a connu certains de ses meilleurs scores sous sa présidence.
Le choix de reprogrammer le tempétueux septuagénaire a toutefois été vivement critiqué. “À tous ceux qui, sur Twitter ou ailleurs, ont prédit que ce town hall sur CNN serait un désastre pro-Trump, vous aviez raison”, a dénoncé le politologue Larry Sabato.
Le camp Trump s’est en revanche ravi de la performance “fantastique” de son candidat. Un de ses conseillers s’est réjoui, auprès de l’AFP, que Donald Trump ait eu l’opportunité de “parler de son programme” à l’audience de CNN, ce qu’il n’avait pas fait “depuis bien longtemps”.