Brésil : les lieux de pouvoir sous contrôle après l'assaut des pro-Bolsonaro

Les autorités judiciaires au Brésil ont lancé les premières investigations pour déterminer les responsabilités de la prise d'assaut de plusieurs bâtiments officiels dimanche 8 janvier par des partisans de l'ex-président d'extrême droite Jair Bolsonaro à Brasilia, où est revenu l'actuel chef d'Etat Luiz Inacio Lula da Silva qui a dénoncé l'œuvre de "putschistes".

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Des partisans de l'ancien président brésilien Jair Bolsonaro affrontent la police lors d'une manifestation devant le palais du Planalto à Brasilia le 8 janvier 2023. Crédit: Evaristo SA / AFP

Après plusieurs heures d’un chaos qui a rappelé l’invasion du Capitole à Washington il y a deux ans, les forces de l’ordre ont repris le contrôle du palais présidentiel, du Congrès et de la Cour suprême envahis dimanche par des centaines de manifestants anti-Lula, selon le ministre de la Justice et de la Sécurité Flavio Dino.

« Les putschistes qui ont promu la destruction des propriétés publiques à Brasilia sont en train d’être identifiés et seront punis. Demain nous reprenons le travail au palais de Planalto. Démocratie toujours », a tweeté le président de gauche, qui a inspecté les bâtiments saccagés à son retour à Brasilia tard dimanche soir.

Plus de 300 personnes interpellées

Plus de 300 personnes ont été interpellées et le parquet général a demandé l’ouverture immédiate d’investigations pour établir « la responsabilité des personnes impliquées » dans l’attaque des bâtiments officiels.

La zone avait été bouclée par les autorités. Mais les bolsonaristes, pour beaucoup habillés du maillot jaune de la Seleçao, la sélection de football du Brésil, un symbole qu’ils se sont approprié, sont parvenus à forcer les cordons de sécurité. Ils ont provoqué des dégâts considérables dans les trois immenses palais, qui sont des trésors de l’architecture moderne et regorgent d’oeuvres d’art.

Des tableaux d’une valeur inestimable ont été endommagés, dont « Les mulâtres », du peintre moderniste Di Cavalcanti, exposé au Palais présidentiel et percé de plusieurs trous, selon des photos circulant sur les réseaux sociaux.

Sur les réseaux sociaux ont également circulé des vidéos montrant des bureaux de parlementaires saccagés. Un manifestant s’est assis sur le siège du président du Sénat, un mimétisme saisissant avec les émeutiers partisans de l’ex-président américain Donald Trump qui avaient envahi le Capitole il y a deux ans.

Selon la chaîne CNN, des manifestants ont mis le feu au tapis d’un salon du Congrès, qui a dû être inondé pour éteindre l’incendie.

Un syndicat de presse a fait état de l’agression de cinq journalistes. Parmi eux, un photographe de l’AFP a été frappé et s’est fait voler tout son matériel.

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« Nous ne reconnaissons pas ce gouvernement parce qu’il est illégitime », a déclaré à l’AFP Victor Rodrigues. « Nous ne reculons pas, nous allons partir d’ici mais nous reviendrons », a-t-il promis.

Le cri de ralliement des manifestants « intervention militaire » (pour chasser M. Lula du pouvoir) a continué de s’élever de la foule restée aux abords du Congrès des heures durant, malgré les fumées des gaz lacrymogènes ou les canons à eau de la police.

Bolsonaro se désolidarise de l’assaut

Jair Bolsonaro, lui, se trouve aux Etats-Unis, où il est parti deux jours avant l’investiture de Lula, se refusant à remettre l’écharpe présidentielle à celui qui l’a défait d’une courte tête à la présidentielle d’octobre.

Dans une série de tweets, il a condamné sans fermeté « les déprédations et invasions de bâtiments publics ». Mais il a aussi « rejeté les accusations, sans preuve » de son successeur selon qui il aurait encouragé les violences.

Plusieurs de ses alliés se sont désolidarisés des violences de dimanche, dont Valdemar Costa Neto, président du Parti libéral (PL), le parti de Bolsonaro, qui a regretté « un jour triste pour la nation brésilienne ».

Le gouverneur du district fédéral de Brasilia, Ibaneis Rocha, un autre allié de Jair Bolsonaro, a présenté ses excuses au président Lula dans une vidéo. Il a qualifié les responsables des déprédations des bâtiments publics de « vrais vandales » et de « vrais terroristes ».

« On surveillait avec le ministre (de la Justice) Flavio Dino tous ces mouvements (…) A aucun moment on n’a pensé que ces manifestations prendraient de telles proportions », a-t-il affirmé.

Réactions internationales

Ces saccages ont provoqué une avalanche de réactions outrées dans le monde. Le président français Emmanuel Macron a dit à Lula qu’il pouvait « compter sur le soutien indéfectible de la France ».

Son homologue américain Joe Biden, qui entame lundi au Mexique un sommet des dirigeants d’Amérique du Nord réunissant Etats-Unis, Mexique et Canada, a jugé « scandaleuses » les violences des manifestants. « Utiliser la violence pour attaquer les institutions démocratiques est toujours inacceptable », a tweeté son secrétaire d’Etat Antony Blinken.

Le président mexicain Andrés Manuel Lopez Obrador a dénoncé « la tentative de coup d’Etat des conservateurs au Brésil ».

Des bolsonaristes manifestaient déjà devant des casernes militaires depuis la défaite du président sortant. Ils réclamaient l’intervention de l’armée pour empêcher Lula de revenir au pouvoir pour un troisième mandat, après ceux de 2003 à 2010. Certains d’entre eux ont également bloqué des axes routiers pendant plus d’une semaine après l’élection.