Depuis son arrivée à Downing Street en octobre, le Premier ministre Rishi Sunak a repris la position très dure de ses prédécesseurs et a encore évoqué dans ses vœux du Nouvel An ce sujet, très sensible politiquement depuis le Brexit, parmi ses priorités.
Les chiffres, eux augmentent, d’année en année. Selon les calculs de l’AFP à partir des chiffres du ministère de la Défense, 45.756 migrants ont effectué la dangereuse traversée de l’un des passages maritimes les plus fréquentées au monde, aux eaux très froides une grande partie de l’année, contre seulement 28.526 en 2021, pourtant déjà une année record.
Si la plupart des arrivées ont lieu en été, avec un record journalier de 1295 migrants en 24 heures le 22 août, elles se poursuivent désormais les mois d’hiver avec 1745 arrivées en décembre. Les dernières ont encore eu lieu le jour de Noël.
Le mois dernier a été marqué par le naufrage d’un canot pneumatique qui transportait des dizaines de migrants depuis la France au petit matin du 14 décembre. Quatre d’entre eux sont morts, des Afghans et Sénégalais selon les premiers éléments de l’enquête, un bilan qui aurait pu être bien plus lourd : 39 autres ont pu être secourus par un bateau de pêche à proximité.
Dans la nuit du 23 au 24 novembre 2021, 27 migrants âgés de sept à 46 ans avaient péri dans le naufrage de leur bateau pneumatique.
Le verrouillage croissant du port de Calais côté français et du tunnel sous la Manche explique l’explosion depuis 2018 du nombre des traversées de la Manche à bord de petites embarcations.
Le dossier est hautement sensible pour les conservateurs britanniques qui promettent depuis le Brexit de “reprendre le contrôle” des frontières, une volonté réaffirmée par Rishi Sunak et sa très à droite ministre de l’Intérieur Suella Braverman.
Mais malgré les plans successifs annoncés — deux encore cette année — les chiffres des traversées continuent d’augmenter, débordant complètement le système des demandes d’asile au Royaume-Uni.
Sous-traitance ?
Londres a notamment conclu cette année un accord, critiqué par l’ONU, l’Église anglicane et de nombreuses organisations, avec le Rwanda pour y envoyer les migrants arrivés illégalement, quelle que soit leur origine, sans attendre l’examen de leur demande d’asile.
Le projet a été suspendu avant l’été après une décision de la Cour européenne des droits de l’Homme, mais le gouvernement veut le relancer à la suite d’une récente décision favorable de la justice britannique.
L’objectif est de décourager les traversées et de briser le modèle économique des passeurs, sans succès pour l’instant. Pour les associations d’aide aux migrants, le seul moyen de lutter contre les passeurs est d’ouvrir des voies légales pour accéder au Royaume-Uni et y demander l’asile, ce qui est quasi impossible actuellement.
Paris et Londres ont signé un accord mi-novembre qui prévoit notamment une enveloppe de 72,2 millions d’euros que devront verser les Britanniques en 2022-2023 à la France pour augmenter de 800 à 900 le nombre des policiers et gendarmes sur les plages françaises, d’où partent de nombreux migrants.
Dernière tentative en date : un plan présenté en décembre par le Premier ministre, qui comporte un accord avec Tirana pour expulser massivement les Albanais, arrivés très nombreux cette année (un tiers des arrivées environ) bien que Londres juge ce pays, qui n’est pas en guerre, sûr.
Rishi Sunak a en outre annoncé un nouveau “commandement unifié” contre passeurs et petites embarcations. Le gouvernement va aussi recourir à d’anciens centres de vacances, résidences étudiantes ou locaux militaires pour réduire de moitié la facture de l’hébergement des demandeurs d’asile actuellement logés dans des hôtels.
À plus long terme, un quota annuel de demandeurs d’asile sera déterminé par les députés et une loi empêchera ceux qui arrivent illégalement au Royaume-Uni d’y rester.