Le mobile raciste des faits se confirme : ce Français, conducteur de train retraité, décrit comme “dépressif” et “suicidaire”, a confié aux enquêteurs avoir toujours “eu envie d’assassiner des migrants, des étrangers” depuis un cambriolage de son domicile en 2016, selon la procureure de Paris, Laure Beccuau.
Il a ouvert le feu vendredi devant un centre culturel kurde du centre de Paris, tuant trois personnes : Emine Kara, une responsable du Mouvement des femmes kurdes en France — et deux hommes, dont l’artiste et réfugié politique Mir Perwer.
Trois hommes ont été blessés, dont un gravement, mais leurs jours ne sont plus en danger et l’un d’entre eux a quitté l’hôpital. Cinq des six victimes sont de nationalité turque, la dernière française.
La communauté kurde dénonce un acte terroriste
L’attaque de vendredi a bouleversé la communauté kurde, qui a dénoncé un acte “terroriste” et mis en cause la Turquie.
L’homme s’était dans un premier temps rendu, tôt le matin vendredi, à Saint-Denis, commune populaire au nord de Paris, avec son arme, “un pistolet automatique Colt 45 de calibre 11,43”, pour “commettre des meurtres sur des personnes étrangères”, selon la procureure. Mais “il renonce finalement à passer à l’acte, compte tenu du peu de monde présent et en raison de sa tenue vestimentaire l’empêchant de recharger son arme facilement”, a-t-elle précisé.
Il est alors rentré chez ses parents, puis en est ressorti pour se rendre peu avant midi dans un quartier où il connaissait l’existence d’un centre culturel kurde, et a ouvert le feu.
“Indiquant en vouloir ‘à tous les migrants’, il affirme s’en être pris à des victimes qu’il ne connaissait pas, précisant en vouloir aux Kurdes pour avoir constitué des prisonniers lors de leur combat contre Daech au lieu de les tuer”, a affirmé le ministère public.
Il avait “l’intention d’utiliser toutes les munitions et de se suicider avec la dernière balle”, mais a été stoppé par plusieurs personnes dans un salon de coiffure proche avant d’être arrêté par la police.
Colère et incompréhension
Les premiers éléments de l’enquête n’ont pas permis d’établir “un quelconque lien avec une idéologie extrémiste”.
Le suspect a assuré avoir acquis son arme il y a quatre ans auprès d’un membre du club de tir, l’avoir cachée sans l’utiliser jusqu’à vendredi. Déjà condamné en 2017 pour port d’arme prohibée et en juin pour violences avec armes sur des cambrioleurs — les faits qu’il a évoqués en garde à vue —, il est inculpé depuis décembre 2021 pour violences avec armes, avec préméditation et à caractère raciste.
Il est soupçonné d’avoir blessé à l’arme blanche des migrants sur un campement à Paris, le 8 décembre 2021. Après un an de détention provisoire, il avait été libéré le 12 décembre.
Que la piste de l’attentat terroriste n’ait pas été retenue d’emblée a suscité colère et incompréhension. Des manifestations en hommage aux victimes, parfois émaillées de violences et de dégradations, ont été organisées samedi à Paris, Marseille et Bordeaux.
Pour de nombreux Kurdes, ce triple assassinat fait écho à celui, jamais élucidé, de trois militantes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) le 9 janvier 2013 à Paris.
Le Conseil démocratique kurde en France (CDK-F) a appelé à une marche lundi à midi reliant la rue d’Enghien, où a eu lieu l’attaque de vendredi, à la rue La Fayette à quelques centaines de mètres de là, où avaient été retrouvés les corps des trois militantes du PKK.