Ce match à Doha, “ce sera comme si mon père jouait contre ma mère”, plaisante Lilia, Franco-Marocaine de 36 ans, refusant de livrer son nom de famille, venue célébrer ses “deux équipes”.
Aussitôt la victoire des Bleus face à l’Angleterre connue (2-1), les supporters, drapeaux français ou marocain sur le dos, se sont retrouvés sur l’avenue de deux kilomètres, sous les klaxons des voitures et les vivats de la foule.
“Et une, et deux, et trois étoiles”, s’enthousiasmait déjà, sous les feux d’artifice et les fumigènes, un groupe de jeunes hommes, drapeaux français dessinés sur les joues. À Doha, les Bleus venaient de s’offrir une place en demi-finale pour affronter le Maroc, qui avait éliminé le Portugal (1-0) un peu plus tôt dans la journée.
“On ne s’y attendait pas à cette victoire (marocaine). Tout le monde en est fier : j’ai vu des drapeaux algériens, égyptiens… C’est normal, c’est une première !”, s’exclame Amel Abdeljalil, 28 ans, en écartant les pans de son manteau pour montrer son maillot.
Les Lions de l’Atlas sont en effet la première sélection africaine à atteindre les demi-finales d’un Mondial, après les tentatives ratées du Cameroun en 1990, du Sénégal en 2002 et du Ghana en 2010.
Les Champs-Élysées rougissent
Selon la préfecture de police (PP) de Paris, environ 20.000 personnes étaient présentes en soirée sur les Champs-Élysées.
Des deux côtés de l’avenue et aux croisements des rues, les forces de l’ordre étaient déployées, munies de casques et de boucliers anti-émeutes. La PP avait annoncé que “1220 policiers et gendarmes” en civil et en tenue seraient mobilisés dès 16 h.
“En fin de soirée, vers 22 h 30, des groupes hostiles ont cherché l’affrontement avec les forces de l’ordre qui les ont systématiquement dispersés”, a indiqué à l’AFP la préfecture de police.
Vers minuit, “74 interpellations” avaient eu lieu, principalement pour tirs de mortiers d’artifice et jets de projectiles, et la dispersion était toujours en cours à cette heure.
“J’aurai le cœur un peu serré si le Maroc est éliminé, mais je serai quand même contente pour la France : mercredi, c’est gagnante ou gagnante”, sourit, en milieu de soirée, Nawel Houmane, 23 ans, venue fêter la victoire “entre copines”.
À côté d’elles, trois jeunes hommes scandent, sourire aux lèvres et bras en l’air, le nom d’Olivier Giroud, second buteur français, après l’ouverture du score par Aurélien Tchouaméni. “Ce soir, on s’aime. Mercredi, on divorce”, lance en rigolant Bastien Caron, supporter français de 27 ans.
Des centaines de supporters marocains, encore euphoriques après la victoire de leur équipe, remontent “les Champs” en voiture ou à pied, agitant par la fenêtre des drapeaux rouges frappés d’une étoile verte.
Venu avec son petit-fils fêter la victoire des Bleus, Jean Barbier, 67 ans, a un drapeau tricolore planté dans la poche de sa parka. Alors qu’ils remontent main dans la main les “Champs” vers l’Arc de Triomphe, des supporters marocains tapent amicalement au passage dans la main du petit garçon.