Le 15 août 2021, les talibans investissent le palais présidentiel de Kaboul à l’issue d’une offensive fulgurante entamée en mai à la faveur du début du retrait d’Afghanistan des forces américaines et de l’OTAN. Le président afghan Ashraf Ghani, en fuite à l’étranger, admet que “les talibans ont gagné”.
Washington gèle près de 9,5 milliards de dollars de la Banque centrale afghane et la Banque mondiale suspend ses aides à l’Afghanistan, dont 60 % de la population dépend de l’aide internationale.
Régression des droits de l’Homme
L’effondrement de l’armée et du gouvernement afghan précipite les opérations de retrait des militaires américains et de leurs alliés civils afghans, marquées le 26 août par un attentat revendiqué par le groupe État islamique à l’aéroport de Kaboul, qui fait plus de 100 morts.
Le 30 août, l’armée américaine quitte l’Afghanistan, mettant fin à deux décennies de présence dans le pays. Les 7 et 8 septembre, est nommé un gouvernement, largement trusté par des responsables historiques du mouvement dans les années 1990 et qui ne comprend aucune femme ministre.
Les Occidentaux déplorent un gouvernement ni “inclusif” ni “représentatif” de la diversité ethnique et religieuse du pays, comme le nouveau régime s’y était engagé, et font du respect des droits humains, particulièrement pour les femmes, un prérequis dans les négociations sur l’aide et la reconnaissance du régime islamiste.
Les talibans, en dépit de leur promesse initiale d’un régime plus souple que lors de leur passage au pouvoir entre 1996 et 2001, imposent aux femmes des restrictions drastiques. Le 23 mars 2022, ils font refermer aux filles les lycées et collèges, quelques heures à peine après leur réouverture pourtant annoncée de longue date.
Début mai, le chef suprême des talibans ordonne aux femmes de porter un voile intégral en public, de préférence la burqa. Les femmes se voient aussi exclues de nombreux emplois publics et interdites de voyager seules en dehors de leur ville.
Le 17 mai, le régime annonce la dissolution de la Commission des droits de l’Homme (AIHRC), un organisme qui surveillait notamment les violences commises contre la population. La Commission électorale et le Haut conseil national pour la réconciliation, chargé de promouvoir la paix dans le pays, ont subi le même sort.
Les interdictions pleuvent : musique non religieuse, représentation de visages humains sur des publicités, diffusion à la télé de films ou séries montrant des femmes non voilées sont bannies. Les fondamentalistes demandent aux hommes de porter le vêtement traditionnel et de laisser pousser leur barbe.
Crise complexe
L’Afghanistan, privé de l’aide internationale qui portait le pays à bout de bras, plonge dans une grave crise financière et humanitaire et voit son chômage exploser. Selon l’ONU, plus de la moitié de la population, soit environ 24 millions d’Afghans, est menacée d’insécurité alimentaire.
Le 31 mars, l’ONU saisit la communauté internationale du plus grand appel de fonds jamais lancé pour un seul pays. L’initiative ne mobilise que 2,44 milliards de dollars, loin des 4,4 milliards espérés. Des négociations sont en cours entre Washington et les talibans sur le déblocage de fonds après un tremblement de terre ayant fait plus de 1000 morts et des milliers de sans-abri fin juin, dans l’est du pays.
En octobre 2021, un attentat contre la communauté chiite, persécutée de longue date dans ce pays à majorité sunnite, fait 60 morts, le plus meurtrier depuis le départ des troupes américaines. L’attaque est revendiquée par l’État islamique au Khorasan (EI-K), la branche régionale de l’EI contre laquelle les talibans mènent depuis des années une lutte sans pitié.
Au printemps 2022, des dizaines de personnes sont tuées dans une série d’attaques à la bombe, dont la plupart sont revendiquées par l’EI-K.
Les talibans assurent avoir vaincu l’EI-K, mais les analystes estiment que le groupe extrémiste constitue toujours le principal défi sécuritaire pour le nouveau pouvoir afghan.
Dans la soirée du 1er août, le président américain Joe Biden annonce que les États-Unis ont tué dans une frappe de drone à Kaboul le chef d’Al-Qaïda Ayman al-Zawahiri, recherché depuis des années par les services secrets américains.
Zawahiri, successeur d’Oussama Ben Laden à la tête de la nébuleuse jihadiste, était considéré comme un des cerveaux des attentats du 11 septembre 2001, qui avaient fait près de 3000 morts aux États-Unis. Les talibans condamnent l’attaque, mais ne confirment pas la mort de Zawahiri, ni même sa venue ou sa présence à Kaboul.