Une enquête révèle que la journaliste Shireen Abu Akleh a été tuée lors d’une attaque ciblée des forces israéliennes

Le 13 mai, des milliers de Palestiniens disaient adieu à une de leurs journalistes vedettes, Shireen Abu Akleh, tuée d’une balle dans la tête en Cisjordanie occupée. Si le coupable du meurtre n’avait à ce jour pas encore été déterminé, une enquête publiée par CNN vient de révéler l’implication directe des forces israéliennes dans cette attaque “ciblée”.

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La journaliste Shireen Abu Akleh, tuée le 11 mai 2022. Crédit: AFP

Ce jeudi 26 mai, le média CNN a publié une enquête démontrant que le meurtre de la journaliste palestinienne Shireen Abu Akleh a eu lieu lors d’une attaque ciblée, non par hasard ni par des tirs palestiniens comme le laissait entendre un communiqué de l’armée israélienne : “Durant ces activités de contre-terrorisme dans le camp palestinien de Jénine, des dizaines d’hommes armés palestiniens ont ouvert le feu et lancé des objets explosifs en direction des forces israéliennes, menaçant leur vie. Les soldats ont répliqué. Des personnes ont été atteintes”, indiquait le communiqué, avant d’ajouter que “l’armée mène une enquête sur ces événements et envisage la possibilité que les journalistes aient été atteints par des hommes armés palestiniens”. 

Expertise balistique

L’enquête de CNN révèle, grâce à une analyse de la piste audio enregistrée, que la distance entre la balle et son impact concorde parfaitement avec l’emplacement des soldats israéliens au moment des frappes : 309 millisecondes, soit une distance variable entre 177 et 197 mètres.

L’enquête se fonde également sur l’analyse d’un expert en balistique selon qui les impacts des balles, toujours visibles sur les arbres, prouvent que les tirs ne pouvaient pas être aléatoires, expliquant que les trois impacts étant aussi proches les uns des autres, à une distance de près de 200 mètres de la cible, ne peuvent résulter que de tirs réfléchis.

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Les vidéos de témoins proches de la scène, illustrant l’enquête, permettent également de tracer les camions ainsi que les déplacements des troupes israéliennes au moment des faits, prouvant une nouvelle fois leur implication.

Témoignages

“Nous sommes restés devant les véhicules militaires israéliens pendant cinq à dix minutes avant de faire des mouvements pour nous assurer qu’ils nous voyaient. C’est une de nos habitudes en tant que journalistes : nous nous déplaçons en groupe et nous nous tenons devant eux pour qu’ils sachent que nous sommes des journalistes, puis nous commençons à bouger”, témoigne Shatha Hanaysha, journaliste palestinienne, présente aux côtés de Shireen lors des tirs.

Lorsque le cameraman contourne le coin derrière lequel il s’était caché, on peut voir Shireen, allongée sur le sol, face contre terre, tandis que sa collègue Shatha s’accroupit à côté d’elle, en s’abritant derrière un tronc d’arbre. Hanaysha tend la main et tente vainement de la réveiller alors que les coups de feu continuent.

Des prêtres et amis pleurent la journaliste palestinienne correspondante d’Al Jazeera Shireen Abu Akleh, qui a été abattue alors qu’elle couvrait un assaut de l’armée israélienne sur le camp de réfugiés de Jénine en Cisjordanie occupée, le 11 mai 2022 avant que son corps ne soit transféré pour enterrement dans un hôpital de Jénine.Crédit: Jaafar Ashtiyeh / AFP

Un jeune de 16 ans, qui faisait partie du groupe d’hommes dans la rue, a déclaré à CNN qu’il n’y avait eu “aucun coup de feu, aucun jet de pierre, rien”, avant qu’Abu Akleh ne soit abattue. Il a également indiqué que les journalistes leur avaient demandé de ne pas les suivre lorsqu’ils marchaient vers les forces israéliennes, alors il est resté en arrière.

L’arbre ayant reçu les impacts de balles évoqués plus tôt est désormais appelé à Jénine “l’arbre de la journaliste” et est devenu un sanctuaire improvisé en l’honneur d’Abu Akleh, avec des photos de la journaliste collées sur le tronc ainsi que des écharpes palestiniennes drapées sur ses branches.