On respire à nouveau” : Youssef, charmeur de serpent, se réjouit de son retour depuis peu sur l’incontournable place Jamâa El Fna à Marrakech, asphyxiée par deux ans de crise sanitaire. “Quel plaisir de retrouver la place après des mois ralentis et pénibles”, lance le jeune homme, tout aussi content du retour des touristes, en jouant avec une couleuvre sur le son nasillard de la ghaïta, hautbois populaire au Maghreb.
Marrakech, la vitrine touristique du royaume au pied du Haut Atlas, se relève progressivement de deux interminables années de restrictions à cause de la pandémie de Covid-19, dévastatrices pour un secteur qui pesait près de 7 % du PIB marocain en 2019. Seulement 3,7 millions de touristes étrangers ont visité le Maroc en 2021 contre 13 millions en 2019, selon des statistiques officielles.
En ce jour de mai, les ruelles exiguës de l’ancienne médina de Marrakech, inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, grouillent de monde.
Doucement, mais sûrement
Les terrasses de cafés sont bondées et les boutiques de souvenirs et de bibelots, les échoppes d’habits et de mobilier traditionnel, toujours prisées par les touristes, ne désemplissent pas.
“Nous n’avons pas encore atteint les niveaux d’avant la pandémie, mais depuis un mois, la situation s’améliore”, confirme, avec soulagement, Abdellah Bouazri, un marchand de la médina, après avoir encaissé les emplettes d’un touriste argentin vêtu d’un maillot du club Boca Juniors.
Ce commerçant de 35 ans, père de deux enfants, a dû s’adapter durant les confinements en devenant vigile dans une société de sécurité. “C’était dur, mais aujourd’hui je suis ravi de retrouver mon vrai métier”, confie Abdellah qui se dit “optimiste pour l’avenir”.
Pour stopper le marasme, le gouvernement a lancé en début d’année un plan de soutien au tourisme de deux milliards de dirhams au profit des professionnels du secteur. Toutefois, les nombreux travailleurs au noir, les employés précaires et sans filet social, se sont aussi retrouvés à la rue.
L’État a également débloqué un milliard de dirhams en soutien aux hôteliers qui réclament d’autres types d’aides. Le président de la Fédération nationale de l’industrie hôtelière (FNIH), Lahcen Zelmat, avait plaidé pour la suppression du test PCR exigé par les autorités pour entrer sur le territoire marocain — “trop contraignant” à ses yeux.
Il a été entendu puisque le gouvernement a décidé mardi “l’annulation de la condition du test PCR” compte tenu de l’amélioration de la situation épidémiologique au Maroc. “C’est une décision qui aurait dû être prise avant, mais l’essentiel est que ce soit fait. Nous sommes très contents. Cela va encourager les touristes étrangers”, a déclaré Lahcen Zelmat à l’AFP.
Une reprise qui fait recette
Selon le ministère du Tourisme, le Maroc a encaissé un peu plus de 34 milliards de dirhams de recettes touristiques en 2021, soit plus de deux fois moins qu’en 2019 (80 milliards de dirhams). Au premier trimestre 2022, elles ont bondi de près de 80 % par rapport à la même période en 2021 à près de 10 milliards de dirhams, selon l’Office marocain des changes. Une récente note du ministère des Finances se félicitait des “perspectives qui semblent plus favorables pour 2022”.
Le Maroc a encaissé un peu plus de 34 milliards de dirhams de recettes touristiques en 2021, soit plus de deux fois moins qu’en 2019
En s’engouffrant à l’intérieur des remparts rouges de la vieille médina, le flot des touristes ne s’arrête pas. L’incessant va-et-vient anime la Medersa Ben Youssef, une école coranique du XVIe siècle, chef-d’œuvre architectural qui remonte à la dynastie saadienne.
“Ce lieu est magique ! Je suis impressionné par tous les détails. Ça me manquait vraiment depuis le Covid de découvrir de nouvelles cultures”, s’enthousiasme Nick, un Londonien de 29 ans qui visite pour la première fois Marrakech.
Le centre-ville renoue progressivement avec le tempo de la foule des vacanciers. Ceux-ci se précipitent aussi pour visiter le Jardin Majorelle et le musée Yves Saint Laurent, hauts lieux emblématiques et très courus de Marrakech. “Le musée était un passage obligé !”, opinent Tommy et Coco, deux jeunes Chinois établis en Allemagne. “Nous nous considérons très chanceux de pouvoir voyager à nouveau et pour le moment nous sommes conquis.”
(avec AFP)