Une nouvelle étape vient d’être franchie dans la révision de la Moudawana. Comme demandé par le roi Mohammed VI, une conférence de presse a été organisée ce mardi, à Rabat, pour “clarifier les principaux contenus” de cette réforme auprès de “l’opinion publique”. Une réforme qui vise à “remédier à certaines des lacunes et déséquilibres apparus” lors de l’application judiciaire des textes en vigueur, a souligné le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, lors d’un discours prononcé devant la presse.
Elle vient aussi “harmoniser ses dispositions avec l’évolution et le dynamisme de la société marocaine” pour qu’elle soit plus “compatible” avec les évolutions de la législation et conformément aux différentes conventions internationales ratifiées par le Maroc, a-t-il affirmé.
Selon Abdellatif Ouahbi, l’objectif de cette réforme “fondamentale” est de parvenir à une “nouvelle version” de la Moudawana plus “adaptée au Maroc d’aujourd’hui”, qui soit “capable de répondre aux évolutions sociétales dont il est témoin”, tout en assurant le “renforcement du statut et des droits de la femme”, la “protection des droits des enfants” et la “préservation de la dignité des hommes”.
Le mariage fixé à 18 ans
Sur la base des propositions de l’Instance chargée de la révision de la Moudawana et de l’avis légal du Conseil supérieur des Oulémas, 16 nouvelles mesures ont été adoptées. Il s’agit de :
• La possibilité de documenter les fiançailles et d’adopter le contrat de mariage seul pour prouver le mariage en règle générale, tout en précisant les cas exceptionnels pour approuver l’audition de la demande de mariage, tout en renforçant les garanties pour le mariage d’une personne en situation de handicap, avec un examen des procédures formelles et administratives nécessaires pour documenter le contrat de mariage.
• La possibilité pour les Marocains résidant à l’étranger de se marier, sans la présence de deux témoins musulmans si cela n’est pas possible.
• La fixation de l’âge d’éligibilité au mariage pour les hommes et les femmes à 18 ans, avec une exception à la règle pour les mineurs âgés de 17 ans. Cette exception est encadrée par plusieurs conditions pour garantir qu’elle le reste dans la pratique.
• L’obligation de demander l’avis de l’épouse lors de la rédaction du contrat de mariage, pour savoir si elle accepte ou pas la polygamie. Cet avis doit être stipulé dans le contrat de mariage. S’il elle n’est pas d’accord, le mari n’aura pas droit à la polygamie. Mais si la première épouse a une infertilité ou une maladie qui empêche les rapports conjugaux, cette condition ne sera plus valable.
Moudawana : l’épouse devra obligatoirement être consultée lors de la rédaction de l’acte de mariage pour choisir si elle souhaite inclure une clause interdisant la polygamie.
Si cette interdiction est inscrite, le mari sera automatiquement privé de ce droit. pic.twitter.com/FEBtVSYuGT— TelQuel (@TelQuelOfficiel) December 24, 2024
• La mise en place d’un organisme non judiciaire pour la réconciliation et la médiation entre les époux, dont l’intervention est requise, en principe, en l’absence d’un divorce conventionnel. Son mandat est limité à la tentative de réconciliation des époux et à la conciliation des effets du divorce.
• Faire du divorce à l’amiable un contrat direct entre les époux, sans qu’il soit nécessaire de suivre une procédure judiciaire, réduire les types de divorce, puisque le divorce pour discorde couvre la plupart d’entre eux, et fixer un délai maximum de six mois pour décider du divorce et de la procédure de divorce.
La garde, un droit partagé
• L’instauration d’un nouveau cadre pour la gestion des fonds acquis durant la relation maritale, valorisant le travail de l’épouse à l’intérieur du foyer et le considérant comme une contribution à la valorisation des fonds acquis durant cette période.
• L’adoption de moyens électroniques modernes de notification dans les cas de divorce et de répudiation, avec l’acceptation d’une procuration dans ces cas, à l’exception de la phase de réconciliation et de médiation.
• La garde des enfants devient un droit partagé entre les époux pendant la durée de la relation maritale, avec la possibilité de la prolonger, en cas d’accord, après une séparation. Le droit de logement de l’enfant concerné est renforcé et de nouvelles règles concernant les visites ou les voyages seront adoptées.
• Une mère divorcée ne peut pas perdre le droit de garde sur ses enfants si elle se remarie.
• L’établissement de nouveaux critères de référence et de valeur à prendre en compte dans l’estimation de la pension alimentaire et de mécanismes procéduraux qui contribuent à accélérer le rythme de notification et de mise en œuvre des jugements relatifs à la pension alimentaire.
• La tutelle légale des enfants devient conjointe entre les époux, que ce soit pendant le mariage ou après la séparation. Dans les cas où il n’y a pas d’accord entre les époux à ce sujet, le juge de la famille est saisi pour trancher le litige à la lumière de critères et d’objectifs précisés par la loi.
• Définition des procédures légales à suivre par le tribunal pour protéger le mineur et renforcer la protection juridique de son patrimoine.
• Le mari ou l’épouse a le droit de conserver le domicile conjugal en cas de décès de l’autre conjoint, dans les conditions prévues par la loi.
• Sur la question de l’héritage des filles, une personne peut donner les biens qu’elle souhaite à ses héritières de son vivant.
• La possibilité de faire un testament ou des donations entre époux, en cas de religion différente. Étant donné qu’il s’agit d’une révision profonde du Code de la famille, une nouvelle rédaction sera adoptée qui remplacera certains termes, surtout s’ils ne sont plus en usage dans notre système juridique et judiciaire.
5 propositions “d’ordre général”
Par ailleurs, cinq propositions “d’ordre général”, visant à accompagner cette réforme ont été adoptées. Il s’agit de :
• La mise à disposition de ressources humaines qualifiées et suffisantes pour traiter les affaires familiales, y compris les juges et le personnel administratif, tout en assurant une formation spécialisée continue.
• La révision des procédures dans les affaires familiales, avec l’élaboration d’un guide pratique et de référence.
• L’accès à la justice familiale via un guichet unique au niveau des tribunaux de la famille.
• La possibilité pour les personnes qui sont sur le point de se marier de disposer d’une éducation sur les droits et les devoirs découlant du mariage, avec l’adoption d’une politique publique en la matière.
• Étudier la possibilité de créer un registre national dans lequel les contrats de mariage et de divorce seraient enregistrés.