Littérature : les 5 temps forts de la 28e édition du SIEL

Cette année, le Salon international de l’édition et du livre (SIEL) a regroupé à Rabat plus de 600 exposants et programmé des dizaines de rencontres entre auteurs, éditeurs et lecteurs issus de différents horizons. TelQuel a sélectionné cinq rendez-vous qui font la particularité et la nouveauté de cette 28e édition.

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Mernissi, l’immortelle

Un espace porte le nom de la sociologue et écrivaine féministe Fatema Mernissi.Crédit: DR

Fait rare cette année, la 28e édition du SIEL accueille un stand qui n’est pas réservé à un exposant, mais à une personnalité. Près de 8 ans après son décès en novembre 2015, la sociologue féministe Fatema Mernissi est mise à l’honneur à travers un espace à son nom, conçu à la fois comme un lieu de mémoire, d’hommage et de débat.

Derrière cette initiative, une double volonté : la première, émanant du ministère de la Culture, demandeur d’une programmation autour de Fatema Mernissi. Et la seconde, provenant cette fois-ci des membres de la chaire Fatema Mernissi hébergée par Economia (centre de recherche d’HEM, ndlr), ayant formulé l’idée d’un espace consacré.

Joliment décoré de clichés représentant la sociologue à différentes périodes de sa vie, en plus de citations extraites de ses livres accrochées au mur ainsi que d’archives, l’espace Fatema Mernissi a notamment accueilli une lecture de ses textes interprétés par la comédienne Sophia Hadi, ainsi que des débats autour de sujets chers à la sociologue, tels que les masculinités et féminités.

Des bougies à souffler

La collection Sindbad propose notamment des traductions en français des romans de Naguib Mahfouz.Crédit: DR

Après Paris, la collection Sindbad des éditions Actes Sud célèbre son 50e anniversaire à Rabat, sur invitation du pavillon France du salon. Dirigée par l’éditeur franco-syrien Farouk Mardam Bey, la collection Sindbad s’est attelée, depuis sa création en 1973, à la traduction d’ouvrages de la littérature arabe vers le français.

Un catalogue, notamment constitué des œuvres du poète palestinien Mahmoud Darwich ou encore des romans de l’Égyptien Naguib Mahfouz a donc été mis en avant tout au long du salon.

L’occasion, aussi, pour plusieurs représentants des éditions Actes Sud — dont Anne-Sylvie Bameule, présidente du directoire de la maison d’édition — de découvrir la production littéraire marocaine, et d’échanger avec de nombreux acteurs de la chaîne du livre marocain.

À cette venue, s’ajoute celle de quelques auteurs phares de la maison d’édition, tels que la Franco-Canadienne Nancy Huston ou encore le Congolais In Koli Jean Bofane, qui sont venus à la rencontre de leur lectorat marocain.

Un bandeau franco-marocain

La 28e édition du SIEL a été l’occasion de décerner le premier Choix Goncourt Maroc. Une distinction qui existe dans trente-six pays à travers le monde depuis 1998, en partenariat avec l’Académie Goncourt. À partir de la short list retenue par les jurys de l’Académie, des étudiants issus de sept facultés marocaines ont lu, débattu et finalement fait leur choix entre quatre romans : Le mage du Kremlin, de Giuliano Da Empoli, Vivre vite de Brigitte Giraud, Une somme humaine de Makenzy Orcel, et Les presque sœurs de Chloé Kerman.

Accompagnés par la romancière marocaine Lamia Berca-Berrada, désignée comme la marraine de cette première édition du Choix Goncourt Maroc, les jeunes lecteurs marocains ont fini par élire le roman de l’écrivain haïtien Makenzy Orcel, paru aux éditions Rivages, lors d’une cérémonie notamment marquée par la présence de Françoise Chandernagor, membre de l’Académie Goncourt.

Les jeunes lecteurs marocains ont décerné au roman de Makenzy Orcel, le premier Choix Goncourt Maroc.Crédit: DR

Le roman, long de plus de 600 pages, raconte une tragédie inversée à travers la voix d’une femme ayant commis un suicide. Avec une syntaxe insolite, qui ne connaît ni majuscules ni ponctuation, Makenzy Orcel plonge dans les débris d’une âme que seule la mort a su éclairer.

Une distinction

Mohamed BerradaCrédit: TNIOUNI

Comme l’annonçait TelQuel il y a quelques mois, les œuvres du romancier Mohamed Berrada ont fait l’objet d’une anthologie publiée par les éditions Le Fennec en marge du SIEL. Une consécration pour l’écrivain qui, du haut de ses 80 ans, voit dans cette initiative “l’occasion de méditer sur (son) itinéraire littéraire”.

Celui qui avait publié ses premières nouvelles à l’âge de 19 ans a été invité lors de cette 28e édition du SIEL à mener un dialogue autour de sa carrière d’écrivain. L’occasion, pour Latifa Mouftakir, commissaire du salon, de remettre à Mohammed Berrada une distinction honorifique au nom du Ministère de la Culture, en hommage à ses œuvres romanesques.

Figure incontournable de la littérature marocaine, fervent défenseur de la langue arabe et de la cause palestinienne, Mohamed Berrada a définitivement marqué le paysage littéraire marocain par une œuvre engagée, poétique, et profondément ancrée dans les mutations du Maroc du XXe siècle.

À ciel ouvert

Une rétrospective a été consacrée à la réalisatrice Rahma Benhamou El MadaniCrédit: DR

Cette année, en plus d’une présence à l’intérieur du salon, certains exposants ont fait le choix d’une large programmation culturelle et littéraire hors les murs, à travers les espaces culturels de la capitale. C’est le cas du Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME), qui a choisi de consacrer un ensemble de rendez-vous littéraires consacrés à l’écriture au féminin.

Regroupées sous le thème “Marocaines d’ici et d’ailleurs”, ces rencontres visent à mettre en place un dialogue entre des autrices vivant au Maroc et d’autres, issues de la diaspora, afin d’échanger autour de leurs visions et préoccupations en ce qui concerne la place des femmes en littérature et en société.

Parmi celles-ci, on retrouve Samira El Ayachi, Loubna Serraj, Yasmine Chami, ou encore les primo-romancières Zineb Mekouar, Hajar Azell et Rania Berrada. Une programmation qui s’étend également au septième art, en proposant un focus sur le cinéma documentaire féminin, et plus précisément une rétrospective consacrée aux œuvres de la réalisatrice franco-marocaine Rahma Benhamou El Madani.

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