Je suis très heureux de vous rencontrer aujourd’hui pour discuter de la gestion de l’après 20 mai prochain. En espérant que les 10 derniers jours du ramadan soient bénis, et que nous sortions enfin de cette crise.
À l’image du reste des pays du monde, nous passons par une crise sans précédent. Mais nous avons confiance en notre roi, en notre pays, en nos citoyens, nous en sortirons gagnants.
Si je suis là aujourd’hui, c’est parce que le gouvernement estime que c’est un sujet sensible et important. Ce que je vais vous présenter est le fruit du travail de tous les membres du gouvernement, accompagnés de spécialistes qui nous ont fait des propositions, dans le but de sortir de cette crise la tête haute.
Efficacité des mesures
Les différentes mesures, prises au bon moment, ont grandement limité la propagation du virus. Nous sommes toujours à la deuxième étape, alors que d’autres pays sont vite passés à la troisième.
Le nombre de guérisons est monté en flèche, c’est rassurant. Remercions donc tout le corps médical qui est au premier front. Je remercie également les autorités, qui font un travail hors normes pour protéger les citoyens.
D’ailleurs, les citoyens ont prouvé que les Marocains sont aujourd’hui conscients de la gravité de la situation. Leur rôle a été important, et le sera encore plus lors de la prochaine phase.
Nous avons encore besoin de faire des efforts dans ce sens, face à un ennemi que l’on ne connaît pas encore, du moins, que l’on apprend à connaître au fil des semaines. Il y a des études qui sont faites, et qui s’annulent les unes les autres au fil des jours, car on découvre encore ce virus.
Gouvernance, anticipation et transparence
Dès le départ, nous avons déployé une stratégie sur trois bases : la gouvernance, l’anticipation et la transparence.
Nous nous sommes fondés sur les données scientifiques à disposition pour prendre nos décisions. Gardons le cap, car ce sont ces mesures qui nous permettent aujourd’hui d’en être encore à la deuxième phase, et non la troisième. Ces mêmes mesures ont fait que notre système de santé n’est aujourd’hui pas débordé par la situation épidémique.
Au niveau de la transparence, nous respectons les citoyens et tenons à les informer de façon continue pour faire le point sur la situation.
Nous avons mis à disposition des citoyens les produits nécessaires en cette période de crise. Nous allons poursuivre nos efforts en recevant toutes les remarques et plaintes des différents secteurs. Je promets que nous allons adapter nos interventions aux demandes des différents secteurs. Nous avons reçu récemment plusieurs plaintes de personnes qui estiment qu’elles méritent l’aide des personnes du secteur informel. Lors des prochains jours, un portail électronique sera mis à disposition de ces personnes.
Prolonger le confinement
La deuxième étape de l’état d’urgence prendra fin le 20 mai. Le déconfinement sera plus difficile que le confinement, car il y a plusieurs points à prendre en compte pour éviter le pire.
Le confinement est certes compliqué, et sur le long terme, il devient pénible. Mais il faut savoir que c’est en partie grâce à cette décision que nous avons pu maîtriser la situation. La conscience des citoyens a fait que nous ne sommes pas passés à la troisième étape. Ce confinement a permis de ne pas pousser à bout notre système médical. On a vu des pays développés craquer à ce niveau.
En quelques semaines, nous avons réalisé un grand travail grâce à cet effort commun. Je parle de la confection de bavettes, de la production de gel hydroalcoolique… c’est le fruit de sacrifices et de longues heures de travail. Mais tout cela n’aurait pas été possible sans le confinement.
Aujourd’hui, nous atteignons une nouvelle étape. Il faut chercher à protéger ce qu’on a déjà gagné, tout en prenant en compte l’impact de ce confinement sur la vie de tous les jours, sur la société et sur l’économie.
Maintenir la propagation
Le R0 doit rester sous le seuil de 1, avec une stabilisation sur au moins deux semaines. Au Maroc, il est de 0,9, alors qu’avant le confinement on était a plus de 2. Le taux de décès est inférieur à 2 %, alors qu’avant le confinement on dépassait les 7 % ; les cas critiques et graves ne dépassent pas les 1 % ; les lits de réanimation 4 %.
Nous avons freiné l’évolution du virus à hauteur de 80 %. D’après nos spécialistes, nous avons évité entre 300.000 et 500.000 contaminations, et entre 4450 et 7700 cas graves. Sans ces mesures prises en temps voulu, nous aurions pu avoir encore 200 décès par jour.
Des foyers apparaissent et nous devons les gérer : 467 foyers dans 10 régions du royaume. Sur 3800 cas, 56 % sont issus des foyers. La moitié des contaminations sont issues de foyers familiaux à cause des mariages et des funérailles. Avant-hier, il y a eu 99 cas à Casablanca dans trois foyers différents.
On ne veut pas que l’Aid, jour de fête, se transforme en jour de crise. Je ressens la même chose que les citoyens, et je partage leurs attentes. Beaucoup sont aujourd’hui fatigués, usés mentalement, surtout que ça fait deux mois que ça dure. Nous avons passé un ramadan sans mosquées, il a fallu faire avec.
La situation est aujourd’hui stable et contrôlée mais on ne peut être tranquilles. Les foyers en sont la preuve. On ne peut pas prendre de risques, par rapport au R0 et à l’apparition de ces foyers. Nous avons discuté très longtemps avec les spécialistes pour déterminer comment gérer la prochaine étape.
Nous avons des obligations, des difficultés. Il n’y a pas de solution idéale. Et parce que nous avons choisi de prendre les mesures nécessaires en temps voulu et pour protéger nos acquis, nous allons prolonger le confinement et l’état d’urgence pour trois semaines, afin d’être sûrs d’éviter le pire.
Stratégies de déconfinement
Plusieurs citoyens se posent des questions quant aux stratégies du gouvernement pour la phase de déconfinement. J’ai envie de dire que oui, nous avons des stratégies qui nécessitent une situation stable. Nos préparations pour le déconfinement sont entamées, et nous ferons l’essentiel.
Je tiens à préciser quelques points, pour rassurer les citoyens sur ce que nous faisons. Pour que le déconfinement se passe dans les meilleures conditions, il faut des moyens logistiques :
1. La capacité du système de santé à accueillir d’éventuelles personnes infectées suite au déconfinement, avec l’apparition de nouveaux foyers. Qui pourrait prédire combien de foyers apparaîtront avec le déconfinement ? Personne.
2. Il nous faut pouvoir effectuer plus de tests qu’aujourd’hui. Au début, on réalisait 1000 tests par jour, sur deux centres seulement. Aujourd’hui, on en fait plus de 6600, dans 13 hôpitaux publics. En ajoutant les hôpitaux militaires, etc., on est à plus de 8000 tests par jour. Dans les prochains jours, Errachidia, Nador ou Dakhla seront des villes aussi bien équipées que les autres. Il y aura aussi un laboratoire mobile. Nous voulons faire plus de 10.000 tests par jour, et il faut que les laboratoires soient bien équipés pour le déconfinement.
3. Je tiens à démentir quelques rumeurs qui circulent. Comme celle à propos des personnes testées négatives qui se sont avérées positives. Il faut savoir que c’est un virus qu’on ne connaît pas. Je vous parle en tant que spécialiste de la santé, et je vous dis qu’il est normal que la charge virale diffère d’une personne à une autre. Ces rumeurs font douter les citoyens et on n’en a pas besoin en ce moment. C’est pour cela que je demande aux médias de prendre l’avis de spécialistes avant de diffuser des informations.
Quant à notre capacité de suivi des cas, il faut qu’elle évolue. Aujourd’hui, nous essayons toujours de déterminer les personnes qui sont entrées en contact avec les 99 cas détectés à Casablanca récemment, sachant que ces personnes viennent souvent de quartiers différents, etc.
Nous disposons d’une application de suivi aujourd’hui, pour déterminer les personnes qui sont entrées en contact avec des cas contaminés, et ainsi garder le contrôle. C’est une application marocaine, développée par des développeurs marocains qui traitent ces informations sans aller à l’encontre de la protection des données personnelles des citoyens.
4. Nous cherchons à avoir un stock suffisant de matériel médical pour faire face au déconfinement. 150 millions de bavettes doivent être disponibles, à titre d’exemple.
Il faut que tout aille progressivement, par étapes. Le déconfinement ne veut pas dire la fin des mesures de sécurité sanitaire comme la distanciation sociale. L’obligation du port du masque devra se poursuivre. Il faut garder les bonnes habitudes.
Toute activité, dans tout secteur, sera passée au peigne fin. Il s’agira de voir comment y faire respecter les mesures de sécurité et les règles de distanciation sociale. Une commission de contrôle visite les différentes industries pour veiller au respect des mesures sanitaires. Limiter l’impact de la crise sur les différents secteurs et poursuivre le soutien aux secteurs les plus touchés sont nos objectifs.
Relance économique
Comment redémarrer notre économie ? Nous y travaillons aussi.
La crise ne nous empêche pas d’espérer un meilleur avenir pour notre économie. Nous devons nous préparer à la prochaine phase, l’après-crise, qui ne sera pas simple à gérer. Difficile d’imaginer un scénario macro-économique clair, mais nous faisons en sorte d’attaquer les différents chantiers selon l’urgence. La recherche scientifique sera soutenue par un programme défini (10 millions de dirhams).
Il s’agit de développer un programme pour redémarrer notre économie, et gérer l’après-crise. Nous avons des approches générales, qui prennent en considération les spécificités des différents secteurs. Nous allons adapter notre loi de finances à plusieurs facteurs nationaux et internationaux qui prendront en compte les prévisions du faible taux de croissance, la sécheresse, etc. Tous ces chantiers sont très importants pour la prochaine phase.
La discussion est déjà ouverte avec les différentes composantes de la société marocaine, afin de trouver les solutions idéales pour la gestion de l’après-crise.
Efforts communs
Pour finir, je tiens à dire que le Maroc peut être fier de son roi et de ses citoyens, car nous avons su nous adapter pour faire face à cette crise inédite. Mais il reste encore du travail à accomplir et des choses à réaliser pour bien gérer le déconfinement qui se fera, je le rappelle, par étapes.
Notre réussite dépendra de nos efforts communs, gouvernement et citoyens. Les gens souffrent, mentalement, financièrement… et je tiens à préciser que nous prendrons en compte tous ces sacrifices. Merci à vous, et s’il vous plaît, aidez-nous à garder le cap pour sortir de cette crise.
Les cas d’hier et avant-hier liés aux nouveaux foyers m’ont fait peur, vraiment. Je ne voulais pas en faire part, mais c’est la réalité. Grâce à nos efforts, on s’en sortira.