Guerre au Yémen : la coalition menée par l’Arabie-Saoudite entame un cessez-le-feu unilatéral

Ce 9 avril marque le premier jour d’un cessez-le-feu unilatéral, décrété dans le cadre de la guerre menée par l’Arabie-Saoudite et ses alliés au Yémen.

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F-15 saoudien intervenant au Yémen. Crédit: FAYEZ NURELDINE/AFP

Un cessez-le-feu unilatéral décrété par la coalition menée par les Saoudiens a débuté ce jeudi 9 avril au Yémen, Ryad disant espérer voir cette trêve (justifiée par le besoin de lutter contre le Covid-19) conduire à une fin du conflit de cinq ans.

Les rebelles Houthis, soutenus par l’Iran et contre lesquels intervient la coalition, n’ont pas réagi à ce cessez-le-feu de deux semaines entré en vigueur à 9 heures GMT. Si la trêve tient, ce sera la première percée depuis que les belligérants ont accepté un cessez-le-feu négocié par les Nations unies dans la ville portuaire stratégique de Hodeïda (sud-ouest) lors de pourparlers interyéménites en Suède fin 2018.

Contexte d’urgence

L’envoyé spécial de l’ONU Martin Griffiths s’est félicité de la trêve, appelant les belligérants à “cesser immédiatement toutes les hostilités”, y voyant une “urgence absolue”.

Un cessez-le-feu mondial pour protéger de la pandémie les personnes vulnérables dans les zones de conflit

Le cessez-le-feu intervient alors que l’Arabie saoudite, confrontée à la chute des prix du pétrole, cherche à se sortir d’un conflit coûteux qui a tué des dizaines de milliers de personnes et déclenché ce que les Nations unies qualifient de pire crise humanitaire au monde. Mercredi 8 avril, le vice-ministre saoudien de la Défense, le prince Khaled ben Salmane, a appelé les rebelles à “faire preuve de bonne volonté”.

Le cessez-le-feu de deux semaines créera, espérons-le, un climat de nature à apaiser les tensions” et à aider les efforts de Martin Griffiths en vue d’“un règlement politique durable”, a déclaré le prince Khaled sur Twitter. Le Yémen n’a annoncé jusqu’ici aucun cas de contamination par le nouveau coronavirus, mais des organisations humanitaires ont averti que lorsqu’il sera touché, l’impact sera catastrophique.

Éventuel tournant

L’Arabie saoudite, le gouvernement yéménite et les rebelles ont tous accueilli favorablement l’appel du secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres en faveur d’un cessez-le-feu mondial pour protéger de la pandémie les personnes vulnérables dans les zones de conflit.

La trêve pourrait être prolongée et ouvrir ainsi la voie à une solution politique plus large

Les Émirats arabes unis, membre de la coalition qui a retiré ses troupes l’année dernière du Yémen, ont salué la décision saoudienne, la qualifiant de “sage et responsable”. “J’espère que les Houthis seront à la hauteur de la situation. La crise Covid-19 éclipse tout : la communauté internationale doit intensifier ses efforts et travailler pour protéger le peuple yéménite”, a tweeté le ministre d’État aux Affaires étrangères des Émirats, Anwar Gargash. “C’est une décision importante qui doit être mise à profit, tant au niveau humanitaire que politique”, a-t-il ajouté.

Ce geste de conciliation fait suite à une escalade des combats au Yémen, malgré l’appel des Nations unies à une cessation immédiate des combats pour protéger les civils du pays le plus pauvre du monde arabe de la pandémie.

Un responsable saoudien, dont le pays dirige la coalition intervenant depuis 2015 en soutien au gouvernement yéménite reconnu par la communauté internationale, a déclaré mercredi 8 avril que la trêve pourrait être prolongée et ouvrir ainsi la voie à une solution politique plus large. Il a souhaité une rencontre avec les rebelles, parrainée par les Nations unies, afin de parvenir à un cessez-le-feu permanent.

Défis persistants

Quelques heures avant l’annonce de la coalition, les Houthis ont publié un document résumant leur vision de la manière de mettre fin au conflit. Ils ont appelé au retrait des troupes étrangères et à la fin du blocus de la coalition sur les ports et l’espace aérien du Yémen. Ils ont également exigé que la coalition paie les salaires des fonctionnaires pour la prochaine décennie, et finance la reconstruction du pays, y compris celle des maisons détruites lors des frappes aériennes.

Pour Fatima Abo Alasrar, chercheuse au Middle East Institute, c’est la réponse des Houthis qui va déterminer le sort de la trêve. “Ce sera le véritable test pour le maintien du cessez-le-feu, car les Houthis ont ouvert actuellement de multiples fronts qu’ils ne peuvent pas se permettre de fermer”, a-t-elle estimé.

Les combats se sont récemment intensifiés entre les Houthis et les troupes yéménites soutenues par Ryad autour de zones stratégiques des provinces de Jouf et de Marib, respectivement au nord et à l’est de Sanaa, après des mois d’accalmie. Et les défenses anti-aériennes saoudiennes ont intercepté des missiles des rebelles au-dessus de Ryad et de la ville frontalière de Jazan fin mars, qui ont blessé deux civils dans la capitale placée sous couvre-feu en raison du Covid-19.

Il s’agissait de la première grande attaque contre l’Arabie saoudite depuis que les rebelles ont proposé en septembre dernier de mettre fin aux attaques contre le royaume après des assauts dévastateurs contre les installations pétrolières saoudiennes. La semaine dernière, la coalition a effectué de multiples frappes aériennes sur la capitale yéménite, Sanaa, aux mains des rebelles, en représailles aux tirs de missiles.