L’inquiétude est forte au Royaume-Uni, après l’admission de son dirigeant dans une unité de soins intensifs lundi 6 avril au soir. “Le Premier ministre a reçu un soutien en oxygène et il reste sous étroite surveillance”, mais il n’a “pas été placé sous respirateur”, a indiqué le ministre d’État Michael Gove sur la radio LBC.
La nouvelle “illustre à quel point ce virus ne fait aucune différence entre les gens. N’importe qui, où que ce soit, y compris les plus privilégiés dans notre société, peut être affecté et tomber gravement malade”, souligne Linda Bauld, professeur de médecine de l’université d’Édimbourg.
Plus de 5.000 décès au Royaume-Uni
Le conservateur, âgé de 55 ans, est le seul chef d’État ou de gouvernement d’une grande puissance à avoir contracté la maladie, qui a fait plus de 73.000 morts dans le monde. Prié de “le remplacer là où nécessaire”, le chef de la diplomatie Dominic Raab s’est engagé lundi 6 avril à agir pour “vaincre le coronavirus” durant la période d’hospitalisation de son chef : avec plus de 50.000 personnes testées positives et 5.373 décès, le Royaume-Uni est devenu l’un des pays d’Europe le plus durement touchés.
Des messages de soutien ont afflué de toutes parts, du côté des Européens ou de Donald Trump, qui a souhaité un prompt rétablissement à son “très bon ami”.
Pourtant, l’Europe, le continent le plus frappé par la pandémie, espérait une confirmation de la lueur d’espoir du week-end, lorsque le nombre de décès avait baissé dans les deux pays en première ligne, l’Italie et l’Espagne.
Wuhan au bout de la quarantaine
Mais si la tendance s’est poursuivie en Espagne, le bilan est reparti à la hausse en Italie lundi, avec 636 décès supplémentaires en 24 heures dans le pays le plus endeuillé au monde (plus de 16.500 morts). Et la France a aussi annoncé un nombre important de décès, 833 de plus, soit 8.911 depuis début mars.
En revanche, la Chine n’a recensé aucun nouveau décès quotidien pour la première fois depuis que sont publiées les statistiques de victimes du coronavirus. À Wuhan, berceau de l’épidémie, les restrictions à la sortie de la ville doivent être levées mercredi 8 avril, deux mois et demi après la mise en quarantaine de la métropole de 11 millions d’habitants.
Mais seules les personnes en bonne santé seront autorisées à quitter la ville du centre de la Chine, même si la capitale, Pékin, reste fermée aux voyageurs originaires du Hubei, la province de Wuhan. Le voisin japonais, de son côté, devrait entrer dans l’état d’urgence ce 7 avril, dans sept régions de l’Archipel, dont Tokyo, une mesure assortie d’un plan d’aide à l’économie de 915 milliards d’euros.
La chancelière allemande Angela Merkel a souhaité une Union européenne plus forte, admettant que le bloc des 27 faisait face “à sa plus grande mise à l’épreuve” depuis sa fondation. Elle doit devenir plus “souveraine”, notamment dans la production de masques sanitaires, qui proviennent aujourd’hui majoritairement d’Asie et font l’objet d’une guerre commerciale sans pitié, voire de trafics. Angela Merkel a exigé “plus d’Europe, une Europe plus forte et une Europe qui fonctionne bien”.
Tenir bon
Les ministres européens des Finances devraient d’ailleurs surmonter leurs divisions et réussir à s’entendre ce 7 avril sur de premières mesures économiques communes face au coronavirus, même si elles ne devraient pas être aussi ambitieuses qu’espérées par Paris, Rome et Madrid. L’idée d’un “fonds de solidarité” capable d’émettre de la dette commune aux États membres, continue, en effet, de susciter l’hostilité de l’Allemagne et des Pays-Bas.
Un débat mondial s’esquisse aussi déjà sur le “déconfinement”, suscitant la crainte qu’il soit moins bien respecté chez les près de quatre milliards de personnes, soit plus de la moitié de l’humanité, aujourd’hui contraintes ou appelées par leurs autorités à rester cher elles.
L’Autriche a évoqué un assouplissement progressif de ses règles de confinement à partir du 14 avril. Le chancelier Sebastian Kurz a souhaité “une remise en marche par étapes”, tout en appelant la population à conserver “la plus grande discipline”. La République tchèque a également annoncé un allègement des mesures pour Pâques.
Mais Andrew Cuomo, gouverneur de l’État de New York, épicentre américain de l’épidémie, a prolongé jusqu’au 29 avril les mesures de confinement, jugeant que ce n’était pas encore “le moment de se relâcher”. À New York se pose dorénavant la question du sort réservé aux morts, toujours plus nombreux. Au point que la possibilité de devoir procéder bientôt à des “enterrements temporaires” dans un parc, pour soulager des pompes funèbres débordées, a même été évoquée.
Un 11-Septembre au quotidien
“Les hôpitaux nous poussent à venir chercher les corps, mais nous n’avons pas les locaux pour les gérer”, explique Pat Marmo, qui gère cinq maisons de pompes funèbres à travers la ville. Il souligne avoir actuellement “trois fois plus” de décès qu’en temps normal. “C’est comme un 11-Septembre 2001 qui durerait des jours et des jours”, résume-t-il.
Et la cathédrale Saint-Jean-le-Théologien, située à Manhattan, est en train d’être transformée en hôpital de campagne, avec des tentes médicales à température contrôlée dans sa longue nef et sa crypte souterraine. “Au cours des siècles précédents, les cathédrales étaient toujours utilisées de cette façon, comme pendant la peste”, a observé le doyen de la cathédrale, Clifton Daniel.
La pandémie multiplie aussi les angoisses ordinaires, comme celle de l’accouchement. “On m’a dit que l’examen des 20 semaines est très très important, et c’est ma première grossesse, mais je ne veux pas prendre de risque”, confie Ainhoa Martinez Garcia, 36 ans, qui attend des jumeaux à Madrid et craint d’aller faire cette échographie dans un hôpital débordé par l’afflux massif de patients atteints du Covid-19.