Agape culturelle chez Akhannouch : Brainstorming ou quête d'influence ?

Le président du RNI a reçu le 26 juillet, chez lui à Casablanca, plusieurs acteurs du secteur de l'art, suscitant engouement, curiosité, mais aussi réprobation.

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Aziz Akhannouch a mis les petits plats dans les grands le 26 juillet pour recevoir à son domicile casablancais une quinzaine de professionnels du monde de l’art : artistes, galeristes, réalisateurs et chanteurs.

L’actuel ministre de l’Agriculture était, notamment, entouré des artistes Mohamed Melihi, Fouad Bellamine, Mohamed El Baz et Zineb Andress Arraki, des galeristes Fihr Kettani et Aziz Daki (également patron du site d’information Le 360 et ancien directeur artistique du Festival Mawazine), des réalisateurs Nabil Ayouch, Narjiss Nejjar (également directrice de la Cinémathèque du Maroc), Nourredine Lakhmari et Maryam Touzani. Meryem Sebti, directrice de publication du magazine Diptyk, la comédienne Latefa Ahrare, la chanteuse Oum ou encore le styliste Albert Ouknine étaient également présents.

La voix des artistes associée au projet de 2021?

À deux ans des législatives de 2021, le patron du RNI souhaitait discuter de la situation des arts et de la culture. “C’est Mehdi Qotbi qui a proposé l’initiative à Aziz Akhannouch qui a trouvé l’idée géniale”nous dit une source au fait des préparatifs de la rencontre.

Aziz Akhannouch a réuni des artistes autour de lui, car il est convaincu que la culture peut être un véritable vecteur de développement économique. Il avait donc besoin d’écouter les artistes pour que son parti ait un projet culturel clair et conforme aux réalités du secteur”confirme Mehdi Qotbi, président de la Fondation nationale des musées.

Mais avant de les écouter, Aziz Akhannouch, qui avait soigneusement révisé la biographie de chacun de ses convives, s’est exprimé en premier, histoire de cadrer le débat. Mehdi Qotbi témoigne : “il a mis l’accent sur les possibilités de rendre la culture et les arts plus accessibles à tous. Il a aussi expliqué qu’aux États-Unis ou en France, le soft power culturel est important et qu’il voulait s’inscrire dans cette dynamique”.

C’est une rencontre qui a tourné autour de l’art et la culture contemporains. On a dialogué à bâtons rompus. Je trouve l’initiative très louable, car c’est une première qu’un homme politique interpelle les artistes sur des questions qui les concernent”, confie Fouad Bellamine.

Dans la même lignée, le galeriste Fihr Kettani, secrétaire général de la Fondation pour le développement de la culture contemporaine africaine, nous dit : “L’idée de la rencontre était d’écouter les acteurs culturels conviés. Aziz Akhannouch a donc écouté nos doléances, nos sentiments vis-à-vis de nos métiers, les propositions pour améliorer les choses et construire un programme culturel. Et forcément, on est contents qu’un homme politique s’intéresse à notre secteur”.

Avant d’accepter cette invitation, j’ai demandé à savoir qui prendra part à cette rencontre. Quand j’ai vu la liste des artistes invités, j’ai dit oui, mais je savais très bien où je mettais les pieds”, explique le plasticien Mohamed El Baz. Il poursuit : “au cours de la rencontre, tout le monde s’accordait sur la situation catastrophique de l’art et la culture au Maroc. De son côté, Aziz Akhannouch a expliqué que son parti était enclin à booster la culture. Il a promis d’augmenter le budget du ministère de la Culture si jamais son parti gagnait les élections, d’œuvrer à mettre en place une régionalisation effective de la culture”.

Aziz Akhannouch entouré des artistes, chez lui à Casablanca.Crédit: Le360

Une initiative qui n’est pas du goût de tous…

Après la publication le 27 juillet sur Le360.ma d’un article très enthousiaste sur cette rencontre, des voix se sont élevées pour critiquer cette initiative sur les réseaux sociaux. “Je pense que l’idée qu’un homme politique rencontre des artistes est une bonne chose, mais la manière dont ça a été fait pose à mon sens un problème. Aller taper à la porte d’un homme puissant est une initiative révolue aujourd’hui, déclare Hicham Daoudi, patron de la maison de vente aux enchères CMOOA et fondateur de la galerie marrakchie Comptoir des Mines.

En conflit ouvert avec Mehdi Qotbi, Hicham Daoudi ajoute : “je ne comprends pas non plus le timing ni le fait que la rencontre soit organisée au domicile d’Aziz Akhannouch. On sent que sa préparation a été précipitée et c’est dommage”.

Les participants au dîner voient les choses autrement. “Je ne pense pas que cette rencontre va être exploitée à des fins politiciennes, ce n’était pas le but. Et puis, je ne suis pas né de la dernière pluie pour tomber dans le piège de la récupération”nous dit tout de go Fouad Bellamine.

Pareil pour Fihr Kettani : “il s’agit avant tout d’un échange autour de la culture, je n’y ai perçu aucune connotation politique”. De son côté, Mohamed El Baz répond : “Je ne suis pas allé à cette rencontre pour prêter allégeance à Aziz Akhannouch, mais plutôt pour l’écouter et échanger avec lui. À mon sens, c’est un exercice normal après est-ce qu’il va concrétiser ses promesses ? Je n’en sais rien”.

Dès que Aziz Akhannouch prend une quelconque initiative, on s’attend à ce que ça fasse jazzer. Cette rencontre a été organisée, car il avait envie d’écouter, mais aussi d’associer des artistes dans la conception du projet culturel du RNI. Il a fait la même chose avec des avocats, des médecins ou encore des chauffeurs de taxi”, confie une source proche du président du RNI. De sources concordantes, une prochaine rencontre sera organisée avec des écrivains. Une autre paire de manches pour un autre dîner presque parfait.

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