Quels sont les mots les plus récurrents dans les différents discours du roi Mohammed VI depuis son intronisation ? C’est sur cette question que la “communauté d’idées” Tariq Ibnou Ziyad Initiative (TIZI) s’est penchée, en analysant l’ensemble des 187 discours prononcés par le roi, depuis juillet 1999 jusqu’au dernier discours du Trône, le 29 juillet.
“L’étude vise à dégager des tendances, à travers un découpage linéaire en quatre phases de cinq ans de règne, qui a permis de tracer l’évolution de l’utilisation d’une sélection d’une centaine de mots clés, pour pouvoir ouvrir le champ aux interprétations”, détaille le communiqué de ce think-tank, qui se présente comme “patriote et indépendante, issue de la société civile”. Dans le cadre de cette étude, le règne de Mohammed VI est découpé en quatre périodes : 1999-2003; 2004-2008, 2010-2014; 2015-2019.
Développement, le maître-mot
“Développement”. Voilà le mot le plus usité par le roi lors de ses allocutions. Constamment, sur toute la période de règne, c’est même le terme qui a été le plus sollicité, parfois de loin, par le roi.
Ainsi, le terme de développement apparaît à 246 reprises sur la première période, de 1999 à 2003, puis à 332 et 323 reprises, pour les périodes 2004-2008 et 2000-2013. Depuis 2014, il a été prononcé à 311 reprises.
Dans l’ensemble, en matière de politique intérieure, les mots relatifs à la régionalisation et à l’économie ont été les plus plébiscités lors de ses deux dernières décennies. On les retrouve, en moyenne à 248 reprises sur les quatre différentes période pour la régionalisation, et à 183 reprises pour l’économie. Cependant, le terme “d’investissement” fait partie de ceux qui ont été le moins utilisés.
Le social, oublié jusque dans les propos
Si la tâche a été de développer l’ensemble du pays, la récurrence de certains termes met néanmoins en relief les différentes lacunes observées de ces vingt dernières années. En matière de politique intérieure, les termes “éducation”, “humain”, “santé”, semblent résolument à la marge. Notamment pour ce dernier terme, mentionné à 17 reprises lors des derniers cinq dernières années de règne.
De même pour les termes “jeunes”, “jeunesse”, “emploi”, “chômage” – rassemblés dans une même catégorie par l’initiative Tizi. Au total, ces quatre termes ont été utilisés à 110 reprises lors de la première période du règne (1999-2003). Entre 2004 et 2013, ces termes seront néanmoins utilisés moins de 100 fois par le souverain qui invoquera de nouveau le champ lexical du social lors de la période 2014-2019. Durant ces cinq dernières années, le souverain a fait 151 fois référence au social. Il s’agit d’une des évolutions les plus importantes dans les discours de Mohammed VI.
Un constat similaire peut être dressé pour le champ lexical de l’éducation (éducation, école, éducatif, scolaire et formation) utilisé en moyenne à 105 reprises durant les quatre périodes du règne sélectionnées par Tizi. A noter toutefois que l’utilisation de termes liés à l’éducation a chuté de près de 14% entre les cinq premières années et les cinq dernières années du règne.
Pour contraster cette analyse, Tizi note que les termes “social” et “humain” figurent parmi les adjectifs les plus employés lors des allocutions royales. Ils figurent ainsi à 589 et 401 reprises dans les discours royaux. Pourtant, ils restent bien loin du trio de tête “National” (839), “Politique” (833) et “International” (708).
Les racines africaines du Maroc, au coeur du propos
Les mots “Afrique” et “Africains” ont réalisé un grand boom lors des discours les plus récents. Ces deux termes ont été employé à 403 reprises, durant les cinq dernières années. Une hausse de 410 % par rapport aux cinq premières années du règne. L’utilisation du terme “migration” a en outre connu une croissance de 2200% entre les cinq premières et cinq dernières années de règne.
“La coopération CEE – Maghreb”, autrement dit le dialogue Europe-méditerranéen, perd quant à lui du terrain dans les discours royaux. Présent à 37 reprises au début du règne, le terme “Méditerranée/méditerranéen”, n’a figuré qu’à huit reprises lors des discours prononcés lors des cinq dernières années, soit une chute de 78%. De même pour les références aux voisins espagnols, partenaire sécuritaire et économique clé du Maroc, devenues à terme, le pays le moins cité dans le corpus retenu par le think-tank. En revanche, la mention de l’Algérie a connu un boom de 950 % depuis le début du règne.