Peu d’analystes et observateurs parviennent à quantifier l’apport du digital au secteur. Quels impacts directs sur le paysage bancaire?
La transformation induite par le digital dans le milieu bancaire marocain n’a rien d’un épiphénomène. L’apport substantiel sur la relation de proximité vis-à-vis d’une clientèle de plus en plus mobile, peut en témoigner. Au royaume où le taux de pénétration atteint les 124% (43 millions de mobiles pour une population de 36 millions d’habitants), le réflexe de consulter son compte bancaire sur smartphone, ou encore celui de réaliser ses paiements de factures via son mobile, ne cessent de prendre de l’ampleur d’une année à l’autre. En attestent, les chiffres fournis par Al Barid Bank (ABB), pionnier et leader du mobile banking au Maroc. Au terme de l’exercice 2018, plus de 9 millions d’opérations de paiements Barid Bank Mobile (BBM) ont été effectuées, contre 3 millions une année auparavant. Autre chiffre sur cette tendance en 2019: plus de 3 millions d’opérations BBM enregistrées à fin mars 2019, contre 1,7 million en 2018.
Partant de ce postulat, peut-on évoquer une certaine maturité du segment digital?
Justement, la tendance que je viens de décrire dénote du degré de développement du canal digital qui constitue, sans nul doute, un gisement de croissance et de compétitivité pour les banques, dans un contexte où conquérir et fidéliser ses clients n’a jamais été aussi primordial.
Concrètement, quelles sont les améliorations potentielles sur le parcours client d’une banque classique?
Pour les banques de détail, le recours au mobile dépasse évidemment le périmètre des services «paiement». Fournir une expérience mobile positive est devenu, au cours des dernières années, la clé de recrutement et de fidélisation de la clientèle, en particulier auprès des jeunes. Pour parvenir à cette finalité, les approches adoptées divergent. Les réseaux historiques se servent des outils digitaux comme un moyen pour permettre aux conseillers clientèle de se focaliser sur des services à plus forte valeur ajoutée. Pour d’autres, l’enjeu de proximité client est d’autant plus important. Du fait qu’elle repose sur une logique «consumer-centric» (centrée client).
Où se positionne ABB?
L’approche d’Al Barid Bank en la matière s’avère la plus complète. Barid Bank Mobile est aujourd’hui adoptée par une majorité des clients qui ont vite saisi la valeur ajoutée des services proposés dans notre offre de mobile banking, qui par ailleurs a gagné en maturité avec les années, et ce essentiellement en raison de la commodité d’usage et une tarification avantageuse. Depuis 2014, date à laquelle ABB a investi le canal mobile, la part du digital dans les transactions du groupe est en constante évolution. Les réalisations enregistrées à fin mars 2019, montre que 16% du total des transactions réalisées par Al Barid Bank passent par le canal mobile contre 2% en 2016. Ce succès grandissant s’explique par la fluidification du parcours client, ce qui offre, in fine, une expérience client (UX) optimisée. En effet, ABB a pu capitaliser sur le déploiement d’une offre cohérente qui réinvente de bout en bout le parcours client. La banque a lancé un grand chantier de digitalisation des parcours clients qui concernent une quarantaine de process allant de l’entrée en relation jusqu’à l’octroi du crédit.
Quel périmètre est circonscrit au digital dans le cadre de la politique omni-canal du groupe?
L’amélioration du parcours client en ligne s’accompagne d’une expérience au niveau des agences. En ce sens, la stratégie digitale d’Al Barid Bank est basée sur une démarche omni-canal qui offre aux clients une expérience fluide et une meilleure qualité de service matérialisée principalement par l’instantanéité et la disponibilité à tout moment. A l’ère du «phygital», le but de l’omni-canalité étant de permettre au client de démarrer une opération sur un canal et la conclure sur un autre y compris en agence.
En 2018, le nombre total des transactions de paiement effectuées au niveau national via le canal M-Banking s’est élevé à 7,7 millions d’opérations. Al Barid Bank représente à elle seule une part de marché de 77,4%.
Vous êtes, de fait, le premier acteur d’inclusion financière au Maroc. Dans quelle mesure le digital permettra-t-il au groupe de préserver sa part de marché?
Les récentes évolutions de l’écosystème de paiement mobile initiées par la Banque Centrale et l’agence nationale de la réglementation des télécoms viennent conforter la panoplie des services offerts par ABB, dont le mobile wallet, qui, combiné au produit Barid Pay de Barid Cash (établissement de paiement filiale de Al Barid Bank), va permettre au client final de bénéficier à présent de la possibilité d’effectuer des opérations financières auprès de leur commerçant de proximité gratuitement, des transferts d’argent instantanés entre les clients des différents banques et établissements de paiement et d’effectuer des opérations de Cash in-Cash out. En cela, l’écosystème du paiement mobile apporte une grande innovation pour le marché marocain et vient pour répondre à un besoin réel de la population.
Autant dire que les marges de progression restent importantes…
Certainement. Les marges de progrès restent importantes puisque l’économie nationale est dominée par le cash. La nouveauté réside dans l’utilisation du téléphone comme moyen de paiement électronique entre le client final et le commerçant (BtoC) mais également entre le commerçant et son fournisseur (BtoB). La dématérialisation de l’argent et la possibilité de pouvoir faire ses achats par paiement mobile vont certainement encourager les clients à se servir du mobile même pour les micro-paiements du fait de la gratuité du service. De quoi peser davantage sur les habitudes de consommation, et suivre l’exemple de plusieurs pays africains, où le paiement mobile s’est avéré une vraie opportunité d’inclusion financière. Qui sait, peut-être que le changement de paradigme et la promesse d’une économie «cashless» émaneraient de nos ordinateurs de poche.
Le contexte actuel augure-t-il d’une bonne dynamique d’inclusion financière?
L’année 2018 a connu une bonne dynamique qui a consolidé davantage notre position de premier acteur de bancarisation et d’inclusion financière. C’est ainsi que ABB compte se servir du digital comme levier d’inclusion financière. Et Justement, le contexte actuel, marqué par l’avènement des établissements de paiement et le lancement du projet national de paiement mobile, s’y prête. Avec les premiers agréments délivrés par Bank Al-Maghrib en 2018, les nouveaux acteurs vont contribuer à développer davantage l’inclusion financière avec des offres simples, plus attrayantes et très accessibles.