Santé, emploi et majorité gouvernementale : El Othmani persiste dans l'autosatisfecit

Comme il y a un mois, devant  l’Union nationale de la presse francophone, El Othmani a défendu son bilan de mi-mandat, hier, jusque tard dans la nuit, face aux élus de la Chambre des représentants. L'occasion de revenir sur les questions d'emploi et de santé, au sujet desquelles il dresse un bilan positif malgré du “mieux à faire dans les années à venir”.

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Le Chef du gouvernement, Saad Eddine El Othmani avec le ministre de la Santé, Anas Doukkali Crédit: Tniouni/TelQuel

Le chef du gouvernement était appelé hier à répondre aux questions des députés à la Chambre des représentants dans le cadre de la séance mensuelle réservée à la politique générale du gouvernement. Un dialogue lors duquel Saad Eddine El Othmani s’est efforcé de défendre son bilan en matière d’emploi et de santé.

Faire mieux dans les années à venir : voilà globalement le message saillant de l’intervention du chef de l’Exécutif qui n’a cessé de valoriser les réalisations accomplies sur deux thématiques épineuses. S’il a reconnu que le secteur de la santé avait besoin d’une “profonde réforme”, El Othmani constate une tendance positive en matière d’emploi. Une “priorité” pour l’Exécutif, tant il constituerait un “point de départ fondamental vers le développement humain et la lutte contre la pauvreté et la vulnérabilité”.

Un chômage en baisse, mais …

El Othmani l’affirme, les programmes d’emploi ont contribué à la réduction du taux de chômage. Dans la fonction publique en premier lieu. Interpellé par le groupe Istiqlal sur la politique gouvernementale en matière de lutte contre le chômage, le chef du gouvernement a rappelé le recrutement de plus de 138.000 fonctionnaires sur la période 2017-2019. De 2012 à 2016, les recrutements n’avaient concerné que moins de 117.000 fonctionnaires et 71.000 entre 2007 et 2011. A noter que le mandat du gouvernement El Othmani a été marqué par le recrutement des enseignants-cadres des académies régionales.

Il entend désormais “intensifier les efforts du gouvernement dans le domaine de l’emploi public”, et constate un contexte favorable à l’employabilité. “Les écosystèmes et l’initiative de l’entrepreneuriat ont offert des opportunités d’emploi”, a déclaré El Othmani lors de cette séance qui a duré toute une soirée. Il a notamment mis en avant la nette augmentation des autoentrepreneurs dont le nombre est passé selon lui de 32.400 en 2016 à 102.500 en 2019.

Le chef du gouvernement a également saisi l’occasion pour aborder le programme “Taehil” guidé par l’ANAPEC. Ce dernier prévoit la mise en place d’une formation contractualisée pour l’emploi, mais aussi d’aider à l’insertion de jeunes diplômés en difficulté par des compléments de formations qualifiantes, voire de reconversion. Pour El Othmani, ce programme concernerait déjà quelque 45.737 demandeurs d’emploi et a affiché son souhait de le renforcer. Même son de cloche pour le programme “Soutien au travail autonome” qui aurait permis le suivi de 5.210 porteurs de projets et la création de plus de 2.000 petites entreprises ou activités génératrices de revenus.

De quoi “amplement” contribuer à la baisse du chômage, comme il a pu le dire? Entre 2017 et 2018, le taux de chômage a reculé de 10,2% à 9,8%  d’après le Haut-commissariat au plan (HCP). Il s’est même stabilisé autour des 10%, enregistrant une baisse de 0,5% entre le premier trimestre de 2018 et le premier trimestre de 2019, selon les derniers chiffres du HCP. Entre 60.000 et 70.000 demandeurs auraient accédé à l’emploi. Malgré cette baisse “minime”, le chef de l’Exécutif a affirmé que l’objectif à atteindre était de contenir le taux de chômage autour des 8,5%. L’économie du Royaume a également enregistré la création de 112.000 postes, 91.000 en milieu urbain et 21.000 en milieu rural, soit 26.000 postes de plus que l’année d’avant, toujours d’après les chiffres du HCP.

Courage et critiques

En matière de santé, El Othmani a notamment mis l’accent sur la hausse de 16% du budget accordé à ce département. Il a aussi insisté sur les 8.000 postes budgétaires créés entre 2018 et 2019.

Des points sur lequel, le ministre de la Santé Anas Doukkali était revenu pour TelQuel, il y a quelques semaines dans une longue interview.Le gouvernement s’est engagé à atteindre les 90% de la population couverte. Pour cela, il lui reste le tiers de la population à couvrir. Ce tiers concerne les indépendants, les professions libérales, les non-salariés…”, nous avait confié le ministre de la Santé. Le chef du gouvernement a lui particulièrement insisté sur le programme de couverture sanitaire des indépendants. “Un projet qui attend depuis 2005”, a-t-il d’abord évoqué, avant d’évoquer le “courage” de son gouvernement d’être passé “par des études pour le mettre en oeuvre dans la pratique”.

El Othmani a émis le souhait de sauver le Régime d’assistance médicale (RAMED), avec notamment une enveloppe budgétaire de 1,6 milliard de dirhams qui lui a été allouée en 2019. Défi majeur des prochaines années concernant ce secteur sous tension, l’extension des services de base en matière de santé était aussi au menu de l’intervention du chef du gouvernement au parlement. Il a abordé la mise en application du système d’Assurance maladie obligatoire (AMO) pour les étudiants avec la simplification des procédures en vue de les encourager à y adhérer. A la fin janvier, “le nombre d’adhérents s’élevait à 57.153 étudiants”, a souligné El Othmani, rappelant que 4,5 millions de personnes adhèrent déjà à diverses mutuelles et assurances.

Les chiffres avancés n’ont pas empêché les critiques des différents groupes parlementaires qui ont qualifié de “folkloriques” les mesures prises depuis le gouvernement Benkirane dans le secteur de la santé. Pour leur part, l’Istiqlal et le PAM se sont également montrés critiques et ont fait part de leur insatisfaction sur la gestion du domaine de la Santé par le gouvernement.

Moins de mouvements de protestations, vraiment ?

Et face aux critiques, Saad Eddine El Othmani a notamment appelé l’opposition à ne pas confondre “le gouvernement avec les partis de la majorité”. Le chef du gouvernement a souligné que le travail de l’Exécutif restait l’encadrement du programme gouvernemental, “bien que ses ministres appartiennent à des partis différents”. “Le gouvernement a un niveau acceptable d’harmonie et de cohésion. Il n’est pas affecté par ce qui peut être publié de temps à autre ou par les positions d’autres institutions”, a-t-il défendu devant les députés. Pour lui, “cohérence et harmonie” au sein de l’Exécutif serviront à mettre en place l’ensemble de “réformes, attendues depuis longtemps”.

L’action d’un gouvernement “bénéficie de la confiance des citoyens”, a rappelé Saad Eddine El Othmani. Faisant fi des récentes manifestations organisées par les enseignants-cadres, les professionnels de la santé, ou encore de celles des étudiants, El Othmani a assuré que son “gouvernement a connu moins de mouvements de protestation par rapport aux cabinets précédents”. Près d’un mois après s’être présenté devant l’Union nationale de la presse francophone pour présenter son bilan de mi-mandat, l’heure de l’autocritique n’est toujours pas d’actualité pour l’Exécutif.