Chaque 16 mai, le Maroc commémore les victimes de l’attentat terroriste qui a frappé Casablanca ce jour-là en 2003. Treize ans plus tard jour pour jour, la salle 1 de la Chambre criminelle de la Cour d’appel de Rabat (annexe de Salé) accueillait, à midi, la deuxième audience du très médiatique procès des 24 accusés dans le double assassinat terroriste d’Imlil, ouvert le 2 mai.
Ces accusés sont poursuivis notamment pour “constitution d’une bande en vue de préparer et commettre des actes terroristes visant à porter atteinte à la sûreté de l’État, l’aide préméditée à des auteurs d’actes terroristes, l’entraînement de personnes en vue de rejoindre une organisation terroriste et apologie du terrorisme”.
Barbes longues, vêtus de qamis ou des gandouras pour la plupart, les présumés terroristes, assis dans le box vitré, comparaissent tour à tour devant le juge Abdellatif El Amrani. Celui-ci s’assure de la présence des avocats engagés ou ceux commis d’office. Les principaux accusés, à savoir Abdessamad El Joud, Youness Ouziad, Rachid Afati et Abderrahman Khayati, avancent le pas sûr, le sourire en coin. Les vingt autres, plus timides, se succèdent, devant le regard inquisiteur des présents.
L’Etat au tribunal
Vers 12h20, Me Khalid El Fataoui et Me Lhoucine Raji prennent la parole. Ils représentent la famille de la victime danoise, Louisa Vesterager Jespersen, constituée partie civile contrairement à celle de la victime norvégienne, absente au procès. Devant le président de la cour, les deux avocats justifient leur requête en invoquant la responsabilité de l’Etat. “Nous sommes conscients de l’innocence de l’Etat, mais nous invoquons sa responsabilité morale”, explique Me El Fatoui, citant l’article 21 de la Constitution et les conventions ratifiées par le Royaume. “La famille de la victime cherche à s’assurer de l’indemnisation. Les accusés n’ont pas la possibilité de les indemniser”, soutient Me Raji.
Des déclarations qui font sourire les principaux accusés, détendus. Un contraste déroutant, compte tenu des lourdes sentences qu’ils encourent à l’issue du procès. Le juge lève l’audience. L’Hispano-Suisse Kevin Zoller Guervos en profite pour mimer quelques gestes à son épouse. “Je n’arrive pas à le comprendre”, dit-elle, désespérée, à la mère de l’accusé.
De retour dans la salle climatisée après délibération, la cour annonce sa décision de convoquer l’Etat, en la personne du chef du gouvernement. Le président Abdellatif El Amrani renvoie le procès au 30 mai. Quelques minutes plus tard, l’avocat de Kevin Zoller, Me Saad Sahli, réclame une traduction en vue des prochaines audiences. Ceci, poursuit l’avocat, garantira à son client et à sa famille les conditions d’un procès équitable.