Le président s’est entretenu avec son équipe de sécurité nationale et les dirigeants de la région qui partagent son inquiétude et cette désignation est en cours d’examen suivant le processus interne« , a indiqué mardi à l’AFP Sarah Sanders, porte-parole de l’exécutif américain.
Le placement des Frères musulmans sur cette liste permettrait aux Etats-Unis d’imposer des sanctions à toute personne ou organisation ayant des liens avec ces derniers. Créée en 1928, cette confrérie est le plus ancien mouvement de l’islamisme sunnite. Elle a, au cours de son histoire, oscillé entre plaidoyers pour un Etat islamique et adhésion proclamée au jeu démocratique.
Cette annonce intervient trois semaines après la visite à la Maison Blanche de M. Sissi, qui a destitué son prédécesseur islamiste Mohamed Morsi en 2013 avant d’être élu à la présidence un an plus tard. Selon le New York Times, cette initiative du président se heurte cependant à de vives objections au sein de l’administration, en particulier au sein du Pentagone.
Elle pourrait avoir de nombreuses conséquences en cascade, dont celle de tendre encore un peu plus les relations avec la Turquie et le président Recep Tayyip Erdogan. Ce dernier, qui qualifie l’actuel président égyptien de “putschiste”, dresse parfois un parallèle entre le renversement de M. Morsi et la tentative de putsch qui l’a visé en juillet 2016.
Certains élus et ONG estiment par ailleurs que traiter les Frères musulmans, qui sont composés de différents courants, comme une entité monolithique est réducteur. Pour Jonathan Schanzer, du centre d’analyse Foundation for Defense of Democracies, l’initiative présidentielle pourrait aussi se heurter à des obstacles juridiques.
“Il n’y a pratiquement aucune chance que le réseau dans son ensemble, qui est très disparate, puisse être englobé par les critères légaux exigés”, a-t-il tweeté. “Mais viser ses branches violentes est incontestablement une possibilité”.
A l’occasion de sa rencontre avec M. Sissi dans le Bureau ovale, M. Trump avait multiplié les marques de soutien à M. Sissi, louant son “très bon travail”. “Les relations entre l’Egypte et les Etats-Unis n’ont jamais été aussi bonnes”, avait-il affirmé, sans mentionner à aucun moment la question des droits humains.
Les organisations de défense des droits de l’homme dénoncent régulièrement les violations des libertés par le régime égyptien. Le Caire nie ces allégations, mettant l’accent sur l’impérieuse nécessité de la lutte antiterroriste.
Maître de l’Egypte depuis 2014, Abdel Fattah al-Sissi devrait pouvoir rester en place jusqu’en 2030 en vertu d’une réforme constitutionnelle adoptée mi-avril.
Lors de sa visite à Washington le 9 avril, le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo avait, lors d’une audition devant le Congrès, estimé qu’il avait été “remarquable en ce qui concerne la liberté religieuse”, une formule qui avait suscité la surprise et de très vives critiques dans le camp démocrate.
Le débat sur le placement des Frères musulmans sur la liste noire des “organisations terroristes” intervient moins d’un mois après la décision de l’administration Trump de placer les Gardiens de la Révolution, l’armée idéologique du régime iranien, sur leur liste.
L’Iran figure déjà depuis 1984 sur la liste américaine très restreinte des “Etats soutenant le terrorisme”. L’idée de mettre plus clairement à l’index les “Pasdaran”, armée spéciale créée en 1979 dans le but de protéger la Révolution islamique iranienne des menaces étrangères et intérieures, planait depuis l’arrivée du milliardaire républicain à la Maison Blanche.